Vie chretienne Comos Plan Engin de recherches Plan du site

Samizdat

Le cheminement spirituel de Bruce Cockburn.






Paul Gosselin (2009)

Bruce Cockburn est un chanteur canadien. Il a construit sa carrière sur une fondation folk, mais, avec les années, y a ajouté des influences rock et jazz. Au cours des années 60, Cockburn a partagé la scène avec Jimi Hendrix et Wilson Pickett. Lorsque Neil Young a cancellé son engagement au Festival Folk à Mariposa (Manitoba, Canada) pour se joindre à Crosby, Stills, & Nash à Woodstock en août 1969, cela a fourni l'occasion à Cockburn de se produire comme artiste principal. Son premier album est sorti en 1970. À cette époque, on notait beaucoup d'influence chrétienne voir biblique dans ses albums. Une des pièces de Cockburn, "Lord of the Starfields[1]", est un superbe chant de louange au Créateur... Toute une génération d'évangéliques en a été impressionnée. Pour les francophones, il faut noter que Cockburn a l'heureuse habitude de traduire toutes ses pièces en français. Peu d'artistes anglophones se donnent cette peine.

Suite à un voyage en Amérique du sud au début des années 80, Cockburn s'est beaucoup intéressé à la politique et cela s'est reflété dans sa musique, entre autres dans la pièce "If I Had A Rocket Launcher," de l'album Stealing Fire (1984). Par ailleurs Cockburn s'est aussi intéressé aux droits des amérindiens, à l'environnement, les mines anti-personnel, et, plus récemment, la guerre en Iraq. Évidemment de l'avis de bien des fans évangéliques de Cockburn de la première heure, s'intéresser à ces questions pouvait sembler, au premier abord, un indice d'un éloignement de questions spirituelles plus importantes, mais avec le temps plusieurs évangéliques admettent maintenant que le chrétien doit se concevoir non pas uniquement comme le porte-parole d'une vérité et d'un salut uniquement spirituel, mais aussi qu'il doit jouer le rôle de sel de la terre dans sa génération, dans tous les champs d'activité[2].

Dans bon nombre de ses albums l'influence des Écritures peut être décelé. J'admire sa poésie extraordinaire, sa créativité ainsi que la profondeur de sa réflexion sur certaines questions. Les paroles de plusieurs pièces m'ont d'ailleurs impressionné au point d'obtenir la permission de sa compagnie de disques de les citer dans deux de mes livres. Mais comme mon pasteur favori, avec le passage du temps, j'ai noté des points de désaccord avec certaines de ses prises de position. Il m'a semblé parfois trop attiré par le "politiquement correct". Comme bien des artistes chrétiens en vue, on peut aussi noter des indices d'un manque d'ancrage dans une assemblée locale solide.


Scandales et pierres d'achoppement
Dans une interview avec Bob Gersztyn, Cockburn relate son expérience de jeune chrétien dans les années 70 ainsi que les épreuves et déceptions qu'il a traversé (Gersztyn 2007: 12)

    Une des choses qui m'emmerdait au sujet des chrétiens, à l'époque où je tentais essayer d'être un chrétien zélé – c'est-à-dire dans la période des années 70, au moment d'écrire "Lord of the Star Fields"- est la suivante: je voyais ces gens à la télévision disant, “ Ma vie était un gâchis, j'étais un alcoolique. J'ai perdu mon emploi, ma femme me quittait et allait prendre les enfants. Mais j'ai rencontré Jésus et tous ces problèmes sont disparus. Maintenant, mon épouse est de retour, les enfants sont heureux et j'ai trouvé un excellent travail, blah, blah, blah. ”
    À la fin des années 70, lorsque j'ai été divorcé, tout en étant très dévoué et explorant avec sérieux ce que signifie croire en Dieu et d'avoir une relation d'amour avec Dieu, je pouvais rester là, regarder ces gens à la télé et j'aurais pu me lever et dire, “ Ouais, je suis devenu chrétien et mon mariage s'est brisé, et maintenant, je bois et je fume (ce que je ne faisait pas avant), et tout s'est passé exactement le contraire pour moi.[3] ”

J'ai beaucoup d'empathie pour ce que Cockburn exprime ici, car moi-même je me suis converti en 1975 et peu d'années plus tard dans mon assemblée, on se gavait justement de ces mêmes prédicateurs superficiels promettant, guérison, prospérité, bénédictions et le paradis sur terre aux jeunes chrétiens qui nous étions. Ce discours nous affirmait en somme, “ Eh oui, deviens chrétien et tous tes problèmes seront finis! Suffit de crier Alléluia et désormais c'est le paradis sur terre. Tu as le droit d'être heureux! ” Et dans cette période où mon assemblée se gavait de prédicateurs superficiels et de pushers de camelote spirituel[4], j'ai traversé une des périodes les plus noir de ma vie; difficultés relationnelles et épreuves dans mes études universitaires. Et dans ces épreuves, la prédication dans mon assemblée ne m'était d'aucun secours. Comme Cockburn, avant ma conversion, à bien des égards ma vie baignait dans l'huile et ce n'est qu'après ma conversion que les tuiles se sont mise à tomber... Tout le contraire du message de ces prédicateurs de théologie superficielle. Et dans un tel contexte, cette théologie fait souffrir d'avantage celui ou celle qui souffrent déjà, car de manière subliminale elle suggère que si on est dans une telle situation c'est qu'on a sans doute manqué de foi... Alors non seulement on souffre, mais on se culpabilise de souffrir car, au fond, c'est de notre faute si on est dans la merde... Si j'ai survécu spirituellement cette période, à bien des points de vue, c'est en dépit de ce qui était prêché dans mon assemblée[5].

Plus d'une fois, l'Ennemi est venu chuchoter "Met fin à tout ça. Pourquoi faire le maso? Pourquoi continuer dans cette merde?" Avec la cosmologie dominante qui nous affirme de toutes parts: "Tu viens du néant et tu t'en vas vers le néant!" il est facile de succomber. Et plus on est éduqué, plus on a été exposé à cette philosophie... Mais j'ai rejeté l'offre de l'Ennemi et j'ai décidé de confier mon petit cœur à Christ malgré le fait que je ne comprenais rien à tout ce qui m'arrivait et à tous ces trucs qui me tombaient sur la tête. J'ai accepté l'humiliation de mes projets et l'anéantissement de mes attentes d'alors. Sans avoir subit un divorce comme Cockburn, j'ai traversé la destruction de bon nombre de mes attentes et projets. Et dans cette génération de chrétiens dont la théologie superficielle a gavé d'attentes irréalistes, la déception de ces attentes aboutie à un résultat presque inévitable; l'amertume. Pour ma part, j'ai fait ma thérapie et en quelque sorte exorcisé ces démons dans l'article (assez décousu, il faut admettre) Attentes déçues. Mais j'ai vu le scénario décrit par la vie de Cockburn répété des centaines de fois dans la vie d'autres chrétiens.

Et à ces prédicateurs de théologie superficielle qui ne tiens pas ses promesses, les Écritures avertissent : “ Mais, si quelqu'un scandalisait un de ces petits qui croient en moi, il vaudrait mieux pour lui qu'on suspendît à son cou une meule de moulin, et qu'on le jetât au fond de la mer. ” (Mt 18:6) Et il y a des milliers de “ ces petits ” comme Cockburn qui ont été scandalisés. On a semé dans l'église de l'ivraie et l'on a récolté des tas de chrétiens mal préparés aux épreuves de la vie si ce n'est des chrétiens superficiels qui tournent 4-5 ans max dans un église et ensuite disparaissent pour chercher quelque chose de plus intéressant. Combien de naufrages dans la foi? Combien de divorces? Combien de suicides sont liés à cette vague de théologie superficielle? Chose certaine; à ceux qui ont prêché un tel message dans une église, un jour vous aurez des comptes à rendre devant Dieu de votre enseignement[6]. À ces prédicateurs de théologie superficielle, il est encore temps de se repentir en publique[7] de leur péché et de l'influence néfaste qu'ils ont pu avoir dans la vie de toute une génération de jeunes chrétiens. Ce n'est pas la place pour examiner à fond cette doctrine (avec ses variantes Baptistes ou Pentecôtistes), mais on peut noter deux problèmes majeurs :

  1. Cette théologie évite les questions de péché et de repentance. L'évangélisation se réduit à la recette, Viens à Jésus et il te bénira...
  2. Cette théologie promet le paradis ici-bas et donc ne prépare d'aucune manière les chrétiens à faire face au fait que le chrétien aussi vit dans un monde déchu. De telles attentes seront inévitablement déçues...

Dans ses Pensées, le mathématicien et philosophe français Blaise Pascal a exprimé une vérité sur le christianisme qui échappe à beaucoup de chrétiens ainsi qu'à plusieurs grands prédicateurs à la théologie superficielle de notre génération.

Voilà ce que c’est que de connaître Dieu en Chrétien. Mais pour le connaître de cette manière, il faut connaître en même temps sa misère, son indignité, et le besoin qu’on a d’un médiateur pour se rapprocher de Dieu, et pour s’unir à lui. Il ne faut point séparer ces connaissances?; parce qu’étant séparées, elles sont non seulement inutiles, mais nuisibles. La connaissance de Dieu sans celle de notre misère fait l’orgueil. La connaissance de notre misère sans celle de JÉSUS-CHRIST fait le désespoir. Mais la connaissance de Jésus-Christ nous exempte et de l’orgueil, et du désespoir; parce que nous y trouvons Dieu, nôtre misère, et la voie unique de la réparer.

Et de cette théologie superficielle on a souvent[8] fait des convertis sans repentance, cherchant leurs intérêts propres, leur épanouissement, mais ayant assimilés le langage et la culture évangélique. Dans son interview Cockburn, laisse entendre qu'il a dépassé et surmonté les déceptions et épreuves du passé et même qu'il en a profité pour y apprendre bien des choses utiles, entre autres, que nos conceptions de Dieu doivent souvent être dérangées ou déstabilisées (Gersztyn 2007: 12):

    Il n'y a pas de raison de supposer que ces transformations fréquentes ne viennent pas de Dieu. Cela fait partie de la vie et Dieu s'intéresse à toute la vie, il me semble. Et si vous devenez tout amer à ce sujet et refusez d'apprendre quelque chose [de l'expérience], alors ce sera perdu. Mais toutes ces choses qui nous arrivent constituent des occasions d'apprendre et de grandir.[9]

Il est tout à fait vrai que certaines de nos conceptions de Dieu doivent basculer, car elles ne sont pas véritablement fondées dans la vérité. C'est un peu d'ailleurs la conclusion du livre de Job. Mais les Écritures doivent toujours rester juge de ce processus, sinon tous les dérapages sont possibles. Et dans cette citation que nous venons de lire Cockburn laisse échapper ici un très gros mot: amer[tume]. Oui il laisse entendre ci-dessus que dans son cas particulier tout est réglé, qu'il a dépassé cette étape de sa vie et qu'il est désormais zen. Mais si on juge par son comportement et ses déclarations dans cette même entrevue, l'amertume montre clairement son visage ici et là. Par exemple, dans la citation qui suit, Cockburn déballe, sans trop de fard, son amertume vis-à-vis le mainstream évangélique (Gersztyn 2007: 13):

    J'ai entendu un type l'autre jour. Je ne me rappelle pas de son nom maintenant. Il s'agissait de l'une de ces grands gueules célèbres de la droite chrétienne aux États-Unis et il a dit... bien, j'ai oublié ce que c'était. Je ne peux même pas me rappeler ce dont il était question, quelque chose ou d'autres qui l'irritait et il en a fait “ une insulte à Dieu ”. À mon avis c'est exactement le langage des ayatollahs. C'est exactement ce que l'ayatollah Khomeiny a dit à propos de telle ou telle chose, et c'est exactement ce que les dirigeants fondamentalistes affirment partout dans le monde, dans chaque foi. Il me semble, que toute personne qui pense comprendre ce qui insulte Dieu a sérieusement laissé son ego obscurcir toute la compréhension de Dieu qu'ils ont pu avoir[10].

Et les églises évangéliques ne sont certes pas au-dessus de toute critique. Je ne saurai pas lancer la pierre à Cockburn sur ce plan en tout cas. Il faut parfois justement remettre en question certaines attitudes ou comportements, mais la reste, critique t-on de l'intérieure ou de l'extérieure, pour la rejeter en bloc? Et ici, Cockburn laisse échapper quelques sous-entendus peu flatteurs au sujet de ceux qui n'adhèrent pas à sa conception de la vie chrétienne (Gersztyn 2007: 13):

    Je ressens Dieu. J'ai l'impression que Dieu est dans ma vie, mais jusqu'ici Il n'a pas eu de propension à me dire d'aller tuer quelqu'un en son nom ou recueillir des fonds en son nom ou des choses de ce genre[11].

Cockburn semble préférer son sentiment de Dieu au Dieu objectif (et plus difficilement manipulable) que nous rencontrons dans les Écritures. Rien dans son discours ne laisse entendre que son concept de Dieu dépasse vraiment ce sentiment [inévitablement subjectif] de Dieu. Si on s'oppose à la conception cockburnienne de Dieu, cela implique que... Tiens, pour ma part l'idée ne m'est jamais venu des faire des levés de fonds marketing ou d'embaucher des tueurs à gages. Mais je constate que bien des évangéliques, éduqués et critiques, convertis dans cette génération, gavés de la théologie superficielle des années 70 et 80[12] et ayant traversés des épreuves semblables, se retrouvent comme Cockburn isolés de toute assemblée et aliénés du mouvement évangélique de manière générale. Et, comme Cockburn, ils nieront haut et fort toute amertume de leur part. Mais il suffit d'examiner leur comportement et leur discours pour voir qu'il n'en est rien. Avec le temps, ils sont devenus inconscients de leur amertume, mais il est là malgré tout... Abordez avec eux la possibilité d'une implication personnelle avec une église locale concrète et le venin dans leur discours à l'égard du mouvement évangélique mainstream deviendra rapidement manifeste. Et, il va sans dire que souvent cette réaction sera motivée par des événements tout à fait réels. Il en résulte que pour bon nombre d'entre eux, le mot évangélique ou born-again est devenu presque une insulte. Et la question d'une orthodoxie, d'une vérité, leur pue au nez et les étouffe comme une camisole de force. Certains auront peut-être le courage d'admettre que l'attitude méprisante à l'égard des évangéliques que l'on retrouve dans l'émission de dessins animés Simpson's leur convient parfaitement. S'identifier au mouvement évangélique ou encore à une église locale leur est devenu impossible, sinon sujet à des contraintes et exigences irréalistes. Cela est manifeste chez Cockburn, car lorsqu'on lui demande (indirectement) quelle relation entretient-il avec l'église, il répond (Gersztyn 2007: 12-13):

    DOOR: Avez-vous des leaders religieux que vous respectez ou que vous écoutez ce qu'ils disent?
    COCKBURN: j'écoute beaucoup de ce que plusieurs gens disent et j'essaie d'en tirer de ce qui me semble utile - ou ce dont je peux saisir. (...) J'ai un mentor, dont j'estime les avis, avec qui je suis engagé dans une sorte de travail d'analyse de rêve Jungien. C'est ce qui s'approche le plus d'un chef spirituel dans ma vie actuellement. Dans le passé, je ne pense pas que j'en aie eu du tout. En quelque sorte j'ai fait confiance à Dieu de me conduire là où j'avais besoin d'aller[13] - et je continue de le faire[14].

Tout ça est exprimé avec grande noblesse, mais il n'est donc pas question d'adhérence à une église locale et il semble qu'il n'en a pas été question depuis fort longtemps [15]. Et ce qui importe dans tout ça ce n'est pas la recherche de la vérité, mais plutôt mes besoins et aspirations. Dans une interview avec Morton, Cockburn commenta sur sa relation avec tout ce qui est corporatif/l'Église (Morton 1994) :

    J'ai toujours été conscient de l'aspect spirituel de la vie, et parfois cette sensibilité a été très concrète et vivante. Mais c'est une chose d'avoir l'expérience directe de contact avec quelque chose qui semble être au centre de l'existence, mais ensuite il y a tous ces uniformes que les gens portent et les coutumes qu'ils adoptent. Pour moi, une partie du parcours a été de décider où je dois m'intégrer. À la fin, j'ai décidé que je ne suis pas apte à m'intégrer nulle part. Le bon endroit pour moi, c'est en dehors de tous ces groupes[16].

Évidemment, bien souvent on justifie sa coupure avec le Corps du Christ à l'aide de l'alibi tout usage : les scandales divers commis par les leaders évangéliques. Évidemment ces scandales existent bel et bien et trop souvent leurs auteurs ne démontrent pas le moindre indice de reconnaître leur péché ou chercher à s'en repentir[17]. Cela aboutit chez Cockburn et à bien d'autres à une attitude de mépris à l'égard du Corps du Christ. Les Écritures expliquent cette tentation de la manière suivante:

    L'oeil ne peut pas dire à la main: Je n'ai pas besoin de toi; ni la tête dire aux pieds: Je n'ai pas besoin de vous. Mais bien plutôt, les membres du corps qui paraissent être les plus faibles sont nécessaires; (1Cor. 12 : 21-22)

Ce n'est pas pour rien que les Écritures émettent l'avertissement qui suit:

    N'abandonnons pas notre assemblée, comme c'est la coutume de quelques-uns; mais exhortons-nous réciproquement, et cela d'autant plus que vous voyez s'approcher le jour. (Heb 10: 25)

Si on se coupe de l'église locale, on n'a pas que perdu un abonnement à un club social un peu vieux jeu, on se coupe d'un canal de grâce important. Malgré tous ses défauts manifestes, tout chrétien a besoin de l'Église, même les grands artistes. Il reste, tout au plus, à des chrétiens tels que Cockburn, quelque respect pour l'aspect social/entraide des églises évangéliques, mais lorsqu'on laisse entrer l'amertume dans notre cœur, il suffit de l'entretenir quelques années afin qu'elle commence à éroder, comme de l'acide sulfurique, toutes sortes d'aspects de la vie du chrétien. L'amertume ne fait pas que marginaliser son sujet du Corps du Christ, mais il poursuit son travail et pousse ses racines jusqu'à attaquer les convictions fondamentales du chrétien. Comme c'est le cas de Cockburn, pour ces chrétiens désormais la saine doctrine leur pue au nez. À leur avis, c'est un truc qui intéresse uniquement les gens bornés et manquant d'assurance ou de maturité[18]. Exprimée selon les règles de l'art politiquement correcte, Cockburn relate ainsi son évolution spirituelle plus récente (Gersztyn 2007: 12):

    Et comment les choses ont changés depuis ? Et bien, ça a été un processus de croissance continu, et au fil du temps, j'ai appris autant de choses à propos de Dieu de la part d'hindous, et de Sufis que de la part des chrétiens, voir même des expériences de la vie, dans tous les lieux différents que j'ai vus et les paysages différents où je me suis retrouvé. On constate que ce n'est pas aussi simple que les livres le disent, et c'est la raison pour laquelle mon coeur me dit que Dieu est trop grand pour se tenir dans un livre[19].

Ces quelques phrases en disent très long... La Bible ne suffit plus. Et la vérité? oubliez ça. Il faut élargir ses horizons[20]. Et il y a une demi-vérité perverse dans l'affirmation de Cockburn. Tout chrétien peut admettre que Dieu ne se réduit pas à la Bible, mais dans le contexte de l'interview, l'affirmation de Cockburn laisse clairement entendre que la Bible ne suffit plus comme révélation sur Dieu et qu'il est nécessaire de chercher de la sagesse ailleurs[21]. Logiquement Cockburn rejetterait comme trop étroit l'affirmation de Jésus : “ Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi! ” (Jean 14:6) Mais en cela Cockburn ne fait que se conformer aux conceptions postmodernes qui dominent tant en Occident, particulièrement dans les milieux artistiques. Karen Armstrong, autrefois une sœur catholique, écrit maintenant des livres sur la religion et ses conceptions sont complètement dominées par la perspective postmoderne. Elle affirme (dans Neuhaus 2006) :

Je me décris généralement comme une monothéiste libre de tout port d'attache. Je m'inspire des trois courants de pensée issue d'Abraham. Je ne peux concevoir que l'un d'entre eux puisse avoir un monopole de la vérité ou que l'un d'entre eux puisse être supérieur. Tous ont leur génie particulier et leurs défauts et lacunes. Récemment j'ai rédigé une brève biographie de la vie de Bouddha et j'ai été captivée par ce qu'il a dit sur la spiritualité, sur l'ultime, sur la compassion et la nécessité de la perte de soi avant la rencontre du divin. À mon avis, toutes les grandes traditions religieuses disent la même chose et de la même manière, malgré leurs différences superficielles.

Voici un autre exemple. Il y a quelque temps la revue culturelle québécoise Voir[22] a interviewé le chanteur Jon Anderson du groupe rock Yes. Le journaliste nota que “ la spiritualité a toujours été au cœur de l'œuvre d'Anderson. ” mais Anderson s'empressa d'ajouter “ Je suis un vieux hippie incorrigible et je ne changerai pas (...) Mais je ne suis pas porteur de vérité ”. Anderson aussi est donc un postmoderne qui s'ignore. Il aime la “ spiritualité ” comme il dit, mais la vérité... Le postmoderne DÉTESTE le concept de jugement, tout aussi bien que le concept de vérité. Le postmoderne affirme plutôt que “ chacun a sa vérité ”. Pour le postmoderne, l'individu est le seul point de repère absolu qui subsiste. Il rejette tout autre autorité. Le postmoderne ne peut tolérer se sentir attaché, privé de sa marge de manœuvre. Il rejette donc l'idée que Quelque Chose ou Quelqu'un puisse avoir un mot à dire sur ses attitudes et son comportement. Le postmoderne rejette toute limite, toute contrainte et, surtout, tout autorité.

Devant la religion, le postmoderne adopte une perspective de consommateur. C'est un peu comme lorsque vous allez au restaurant-buffet. Vous prenez un plateau, vous prenez une assiette et vous vous dites : Hmm, ce soir, un peu de chinois serait bon, tiens un taco, ça me tente aussi. Ah, une pointe de pizza, pourquoi pas ! Et un peu de poutine[23] avec ça... Et le postmoderne aborde la religion exactement de la même manière pour se faire une religion sur mesure. Il rejettera complètement l'idée qu'un autre puisse déterminer ce qu'est la vérité pour lui...Cela implique que l'on peut être postmoderne à saveur Nouvelle Âge, postmoderne à saveur catholique, postmoderne à saveur musulmane et, sans aucun doute, postmoderne à saveur évangélique... C'est une question qui mérite une réflexion sérieuse.

Si on laisse croître l'amertume dans nos cœurs, cela nous pousse d'abord dans l'isolation sur le plan social et nous éloigne, lentement, mais sûrement, de l'église, de Dieu et parfois de notre conjoint si on est marié. Évidemment Cockburn, et bien d'autres dans de telles situations, affirmeront haut et fort qu'ils se sentent près de Dieu, mais de quel Dieu au juste? That is the question... Et cet isolement de l'église locale nous place dans une situation de grande vulnérabilité. La Parole nous avertit solennellement:

    "Veillez à ce qui nul ne se prive de la grâce de Dieu; à ce qu'aucune racine d'amertume, poussant des rejetons, ne produise du trouble, et que plusieurs soient infectés;" (Heb. 12: 15)

Les Écritures disent encore: "N'attristez pas le Saint-Esprit de Dieu, par lequel vous avez été scellés pour le jour de la rédemption. Que tout amertume, toute colère, toute calomnie, et toute espèce de méchanceté, disparaissent au milieu de vous. Soyez bons les uns envers les autres, compatissants, vous pardonnant réciproquement, comme Dieu vous a pardonné en Christ." (Éph. 4: 30-32) Il ne faut en aucun cas sous-estimer le pouvoir destructeur de l'amertume dans la vie du chrétien. Mais chez les artistes et gens créatifs de manière générale, il leur est souvent difficile de s'identifier à une église locale. Ils s'y sentent incompris, quelquefois rejetés. Dans les années 70 et 80, sur le plan culturel, bien des églises évangéliques sont restés en 1950, si ce n'est en 1850...

Une église locale est souvent une chose étrange. C'est un peu comme si on prend, au hasard, un autobus pleine de gens et on décide, comme ça, d'en faire une communauté. Et c'est ainsi que Dieu semble agir parfois, en mettant ensemble des gens de niveaux d'éducation, d'arrière-plans culturels et points de vue politiques différents pour en faire une communauté. Rien ne semble vraiment les lier ensemble sauf leur décision de mettre en pratique dans leur vie les enseignements de Christ. Dieu semble avoir un sens d'humour assez étrange parfois. Il faut bien s'entendre, l'appartenance à une église locale n'est pas le salut. On peut trouver des prisonniers et des gens isolés dans des hôpitaux qui soient de bons chrétiens et qui n'ont pas d'église locale, mais ce n'est pas par choix. Mais si l'appartenance à une église locale n'est pas le salut, cela reste que c'est une chose TRES utile et nécessaire pour la vie du chrétien malgré tout. Mais je ne vais pas en discuter plus longuement ici, car j'en ai longuement discuté au chapitre 7 dans mon livre Hors du ghetto.


Un évangélique à la dérive
Et le rejet de la vérité dans la vie de Bruce Cockburn a ouvert la porte à des choses insolites, des choses interdites. Dans l'interview avec Bob Gersztyn, Cockburn fait le commentaire suivant sur l'exploitation de drogues pour aider la créativité ainsi qu'une certaine visite chez un chaman amérindien (Gersztyn 2006):

    FW: Tandis qu'on discute de LSD, j'ai une question à vous poser. Les vers de la pièce "Mystery" qui disent "Je me suis tenu devant le chaman et j'ai vu l'espace parsemé d'étoiles, derrière les orbites de ses yeux", ça me fait penser à une sorte de vision peyotl. Que pensez-vous de l'utilisation de substances comme ça [drogues] pour accroître la créativité?

    BC: Je pense que c'est bien, si c'est dirigé et conscient. Beaucoup de gens prennent ce genre de choses juste pour s'intoxiquer, pour se défoncer. À l'époque, j'ai expérimenté avec le LSD, mais pas à l'occasion auquel fait référence la chanson. J'étais totalement sobre, c'était au milieu de l'après-midi. (...) Nous sommes allés à son appartement, du moins à un appartement à Toronto où il séjournent temporairement. À un moment donné, au cours de la conversation avec lui, j'ai eu cette vive... Je regardais son visage, et nous parlions de thé ou quelque chose sans conséquences et j'observais son visage et j'ai eu cette expérience où je voyais les orbites de ses yeux comme des fenêtres laissant voir l'espace [interstellaire] et ça m'a fait paniquer et je n'ai rien dit, mais il a dû me voir réagir. Il a dû voir une réaction à mon visage, je crois, et il m'a fait un sourire subtil et n'a rien dit. C'était le regard de celui qui a tout compris et ça c'est limité à ça, mais cette expérience m'a secouée. J'ai dû admettre que c'était quelque chose de réel, car je n'avais rien pris[24].

L'ouverture de Cockburn à l'utilisation des drogues est certes décevante, mais c'est un indice clair du manque de discernement de sa part qu'il ne sache même pas reconnaître une manifestation occulte, chose interdite dans les Écritures (Deut. 18 : 10-14; Actes 19 : 19). Il est assez évident que Cockburn n'a pas rejeté cette expérience, mais il semble en avoir été impressionné au point de l'inclure dans une chanson paru dans l'album Life Short Call Now (2006). Et chez Cockburn, comme chez bien d'autres touchés par l'évangile dans cette génération, les épreuves sont devenus des pierres d'achoppement. Et nourrissant leur amertume, cela les a conduit à jeter le bébé avec l'eau du bain, c'est-à-dire à l'abandon de la vérité comme le laisse entendre la citation qui suit (Gersztyn 2007: 12):

    COCKBURN: La rupture de mon mariage a été un moment de découverte. Ce fut clair pour moi que, malgré la douleur et le traumatisme, que cet événement a été une grande opportunité d'apprentissage et la chose la plus importante à en tirer est que vous pouvez essayer tant que vous voulez d'imposer votre point de vue sur le monde, mais un de ces jours, un grand vent va venir et tout démolir et vous laisser là en disant: “ Qu'est-ce qui n'allait pas avec la façon dont je voyais les choses? ”. Ce que j'ai appris à ce moment-là est de ne pas trop s'attacher à ma perception des choses, car nous les êtres humains avons une perspective très étroite et elle est assujettie à de transmutations fréquentes[25].

Chose certaine, on trouve effectivement une influence chrétienne dans bon nombre d'albums de Cockburn, mais on retrouve bien d'autres influences aussi. Il ne faut pas être dupes. Mais pour être équitable, il faut aussi noter que même proposer le contenu chrétien dilué chez Cockburn exige un courage réel dans le contexte culturel si anti-chrétien[26]. Le fait de trouver, chez un artiste (que l'on aime bien) une influence chrétienne n'en fait pas un chrétien. Si on fait le naïf et l'on néglige tout effort de discernement, alors ça impliquerait que si la chanteuse pop Madonna porte une croix au cou, cela suffit pour faire d'elle une chrétienne... Il faut avoir un peu de discernement tout de même. Cela n'exclut pas, à mon avis, acheter à l'occasion des CDs d'un artiste qui ne fait que montrer des traces d'influence chrétienne, mais il ne faut pas se faire d'illusions, ni laisser un tel artiste avoir trop d'influence sur nous. Il faut garder une distance critique. Et pourquoi ne pas appuyer des artistes évangéliques qui n'ont pas coupé avec la vie de l'église ou flirté avec des croyances postmodernes?

Évidemment cela va sans doute choquer quelques artistes qu'on ose les JUGER ou poser des limites sur leur créativité. Mais devant Dieu, eux aussi, tout comme les télé évangélistes qu'ils méprisent tant, ils auront des comptes à rendre un jour sur la vision du monde et la perspective qu'ils auront communiquée à leur public[27]. À mon avis, les versets qui suivent ne s'appliquent pas qu'aux dirigeants religieux officiels : “ Mes frères, qu'il n'y ait pas parmi vous un grand nombre de personnes qui se mettent à enseigner, car vous savez que nous serons jugés plus sévèrement. ” (Jacques 3:1)


Conclusion

    C'est pourquoi nous devons d'autant plus nous attacher aux choses que nous avons entendues, de peur que nous ne soyons emportés loin d'elles. Car, si la parole annoncée par des anges a eu son effet, et si toute transgression et toute désobéissance a reçu une juste rétribution, comment échapperons-nous en négligeant un si grand salut, qui, annoncé d'abord par le Seigneur, nous a été confirmé par ceux qui l'ont entendu. (Heb 2: 1-3)

Il faut bien comprendre que le but de cet article n'est pas de s'amuser, aux dépens de Cockburn, à répandre des cancans sur une célébrité chrétienne. Si tel avait été le but, j'aurais perdu mon temps à écrire ce texte et le lecteur aurait perdu son temps à lire jusqu'ici. L'intérêt du cas de Cockburn est bien plus large, car il est représentatif de l'expérience de toute une génération d'évangéliques et constitue en quelque sorte, un archétype du cheminement de milliers de convertis des années 70 et 80 et dont une bonne part vit, aujourd'hui, en marge de la vie de l'église et, c'est plus pénible à dire, en marge de la saine doctrine biblique. Dans bien des cas, si on pousse trop loin les questions avec eux sur ce qu'ils croient maintenant (en contraste à ce qu'ils croyaient, il y a bien des années lorsque jeunes chrétiens), très souvent cela provoque des réactions émotives très fortes, car ces questions exposent à la lumière du jour le fait pénible de leur dérive spirituelle et à quel point ils se sont éloignés de leurs convictions d'autrefois et de la saine doctrine. Et le masque de "bon chrétien" tombe à terre. Souvent le mot “ vérité ” provoque, au mieux, de leur part, un sourire cynique, mais cela peut aller jusqu'à un sermon postmoderne sur l'étroitesse d'esprit et la nécessité d'atteindre l'illumination de l'ouverture... Et dans ces sermons, le mot “ vérité ” sera considéré uniquement sous l'angle d'une chose/abstraction[28] qu'une personne imbue d'elle-même prétend posséder, plutôt que la perspective biblique d'une Personne[29] qui ne peut être la possédé par personne, mais à qui l'on peut décider d'appartenir... Et dans la théologie actuelle de Cockburn (et de bon nombre de ses semblables), si le mot repentance existe toujours cela s'applique exclusivement aux fascistes, aux méchants capitalistes, aux télé évangélistes véreux, aux autres... La repentance n'est plus une exigence pour tout le monde ou pour soi-même...

Et peut-il y avoir des gens dans l'église, et même des dirigeants, qui ont pu adopter des conceptions postmodernes telles que celles promues par Cockburn? Dans certains cas, eux aussi ont vécu leurs déceptions, mais pour diverses raisons ont trouvé avantage (financier ou social?) à rester dans l'église, mais chez eux également l'amertume a fait son chemin et a érodé leurs convictions d'alors. Parfois ces personnes peuvent occuper des postes importants dans nos églises. Cela n'a rien d'étonnant, car les conceptions postmodernes sont actuellement diffusées de manière très puissante dans la culture populaire et dans le système d'éducation. Rien n'exclut non plus que des versions évangéliques s'infiltrent dans les collèges bibliques et les milieux pastoraux pour ensuite atteindre l'église. Un des moyens d'accès, ce sont les pasteurs qui font des études graduées en milieu universitaire séculier sans être bien armé sur des questions d'apologétique. Dans les générations récentes, bien d'autres trucs néfastes ont déjà fait leur entrée dans les églises évangéliques, sans que les chiens de garde se soient réveillés pour sonner l'alarme alors pourquoi en serait-il autrement maintenant? Il y a un esprit de séduction très fort dans notre génération pour nous éloigner de la vérité. Saurons-nous y résister? Mais Bruce n'as pas terminé son cheminement spirituel, et nous non plus. Que la grâce de Dieu nous garde et nous secours dans notre marche et nous aide à marcher dans toute la lumière de sa Parole et non pas seulement à la lumière de ces quelques versets qui nous plaisent!

Jérémie a bien décrit notre génération, il me semble...

    Pourquoi donc ce peuple de Jérusalem s'abandonne-t-il à de perpétuels égarements? Ils persistent dans la tromperie, Ils refusent de se convertir. Je suis attentif, et j'écoute: Ils ne parlent pas comme ils devraient; Aucun ne se repent de sa méchanceté, Et ne dit: Qu'ai-je fait? Tous reprennent leur course, Comme un cheval qui s'élance au combat. Même la cigogne connaît dans les cieux sa saison; La tourterelle, l'hirondelle et la grue observent le temps de leur arrivée; Mais mon peuple ne connaît pas la loi de l'Éternel. Comment pouvez-vous dire: Nous sommes sages, la loi de l'Éternel est avec nous? C'est bien en vain que s'est mise à l'oeuvre la plume mensongère des scribes. Les sages sont confondus, ils sont consternés, ils sont pris; Voici, ils ont méprisé la parole de l'Éternel, et quelle sagesse ont-ils? C'est pourquoi je donnerai leurs femmes à d'autres, et leurs champs à ceux qui les déposséderont. Car depuis le plus petit jusqu'au plus grand, tous sont avides de gain; Depuis le prophète jusqu'au sacrificateur, tous usent de tromperie. Ils pansent à la légère la plaie de la fille de mon peuple: Paix! paix! disent-ils. Et il n'y a point de paix. (Jér. 8 : 5-11)

Peut être qu'un jour le verdicte qui tombera sur notre génération sera celle-ci:

    Toutefois, de même que le serpent séduisit Eve par sa ruse, je crains que vos pensées ne se corrompent et ne se détournent de la simplicité à l'égard de Christ. Car, si quelqu'un vient vous prêcher un autre Jésus que celui que nous avons prêché, ou si vous recevez un autre Esprit que celui que vous avez reçu, ou un autre Évangile que celui que vous avez embrassé, vous le supportez fort bien. (2Cor. 11: 3-4)


Références




Cockburn, Bruce (1994) Faith in Practice : Holding on to the Mystery of Love. (as told to Cole Morton). Third Way, September, p. 15 Middlesex Great Britain

Cockburn, Bruce (1988) Singer in a Dangerous Time: A Canadian Poet's Journey in Faith and Politics. An Interview with Bruce Cockburn with Vicki Kemper C Sojourners January

Gersztyn, Bob (2006) Interview With Bruce Cockburn. FolkWax Ezine (March)

Gersztyn, Bob (2007) Life Short, Call Now: The Wittenburg Door Interview. pp. 8-13 The Wittenburg Door no. 210 March/April

Gosselin, Paul (1992) Ruminations hétéroclites sur le suicide, l'amertume, le divorce et la souffrance en milieu évangélique: Épître de décembre

Gosselin, Paul (2001) J'ai le droit d'être heureux(se)!

Gosselin, Paul (2006) L'absorption des croyances dans une culture postmoderne.

Neuhaus, Richard John (2006) While We're At It. (The Public Square) pp. 59-76 First Things 164 (June/July)



Autres articles sur Cockburn



Notes

[1] - Tiré de l'album In The Falling Dark (1976). Et la chanson Creation Dream (Album: Dancing In The Dragon's Jaws - 1979) n'est pas sans rappeler des scènes de la création du monde de Narnia par Aslan dans le roman Le neveu du magicien, Chronique des Narnia par CS Lewis.

[2] - On n'a qu'à penser au Notre Père “ Que ton règne vienne; que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. ” (Mt 6:10)

Et il n'y a aucun doute que Dieu s'intéresse à la justice sociale. Dans Ésaïe 10 : 1-4 on avertit :

    “ Malheur à ceux qui prononcent des ordonnances iniques, et à ceux qui transcrivent des arrêts injustes, pour refuser justice aux pauvres, Et ravir leur droit aux malheureux de mon peuple, Pour faire des veuves leur proie, Et des orphelins leur butin! Que ferez-vous au jour du châtiment, Et de la ruine qui du lointain fondra sur vous? Vers qui fuirez-vous, pour avoir du secours, Et où laisserez-vous votre gloire? Les uns seront courbés parmi les captifs, Les autres tomberont parmi les morts. Malgré tout cela, sa colère ne s'apaise point, Et sa main est encore étendue. ”

[3] - Texte original :

    One of the things that used to bug me, about some Christians, back when I was trying to be a "By-the-Book-Christian" - which is in that period of the '70s when I wrote "Lord of the Star Fields" - is this: I'd see these people on TV saying, "My life was a mess. I was an alcoholic. I lost my job. My wife was leaving me and taking the kids. But I found Jesus and it turned everything around. Now my wife is back, the kids are happy and I've got this great job, blah, blah, blah."
    By the end of the '70s, when I was divorced, and had been pretty devoted, and seriously exploring what it meant to believe in God, and to have a loving relationship with that God, I could stand there, I could watch these people on TV, and I could stand up and say, "Yeah and I became a Christian and my marriage broke up, and now I drink and smoke and I didn't used to, and everything was exactly the opposite for me."

[4] - Dans cette catégorie, on peut mettre bon nombre de prédicateurs du mouvement Word-Faith, l'Évangile de la prospérité et bien d'autres.

[5] - Mais la présence de copains chrétiens intègres dans mon entourage faisant montre de compassion a certes été un facteur important dans ma survie.

[6] - Dans l'épître de Jacques (3:1) on déclare: "Mes frères, qu'il n'y ait pas parmi vous un grand nombre de personnes qui se mettent à enseigner, car vous savez que nous serons jugés plus sévèrement."

[7] - Car leur prédication s'est bien faite en publique.

[8] - Mais pas toujours évidemment. Malgré notre incompétence, la grâce de Dieu peut agir et toucher les cœurs à la lecture de la Parole de Dieu. Mais cela soulève la question capitale, sur quelle fondation construit-on l'Église? La construit-on sur le Roc, comme dans le parabole des deux maisons (Matt 7 : 24-27), ou faisons-nous des compromis marketing pour le rendre plus populaire auprès de la génération qui nous entoure? Il ne faut pas oublié que ceux qui font de telles choses auront un jour des comptes à rendre devant leur Créateur:

    Car personne ne peut poser un autre fondement que celui qui a été posé, savoir Jésus-Christ. Or, si quelqu'un bâtit sur ce fondement avec de l'or, de l'argent, des pierres précieuses, du bois, du foin, du chaume, l'oeuvre de chacun sera manifestée; car le jour la fera connaître, parce qu'elle se révèlera dans le feu, et le feu éprouvera ce qu'est l'oeuvre de chacun. Si l'oeuvre bâtie par quelqu'un sur le fondement subsiste, il recevra une récompense. Si l'oeuvre de quelqu'un est consumée, il perdra sa récompense; pour lui, il sera sauvé, mais comme au travers du feu. (1Cor 3 : 13-15)

[9] - Texte original :

    There's no reason to assume that that frequent modification doesn't come from God. It's part of life, which is what God is all about, it seems to me. If you get all bitter about it and don't learn anything, then it's wasted. But all of these things that happen to us are opportunities to learn and grow.

[10] - Texte original :

    I heard this guy the other day. I don't know who it was now. It was one of the sort of high-profile loudmouths of the Christian right in the U.S. and he was quoted as saying... well, I forget what it was. I can't even remember what the issue was-something or other that he didn't care for-was "an insult to God." Which to me is exactly the language of the Ayatollahs. It's exactly what Ayatollah Khomeini said about this or that or the other thing, and exactly what fundamentalist leaders like to say all around the world, in every faith. It seems to me, anybody who thinks that they understand what insults God has seriously let their ego come between them and any understanding of God that they might have.

[11] - Texte original :

    I feel God. I feel like God is in my life, but He, so far, hasn't any inclination to go and tell me to go and kill anybody on His behalf, or go and raise money on His behalf, for that matter, or any of that stuff.

[12] - Et il ne faut pas se tromper cette influence reste toujours présent dans les églises évangéliques à ce jour sauf qu'elle est devenue un peu moins à la mode.

[13] - Ou encore, je voulais aller...?

[14] - Texte original :

    DOOR: Do you have any particular religious leaders that you respect, or listen to what they say?
    COCKBURN: I listen to a lot of what a lot of people say and try to take from it what is useful to me - or what I can grasp. (...) I have a teacher, whose opinion I value, who I'm engaged in a kind of Jungian dream analysis work with. That's kind of the closest thing I have to a spiritual leader at the moment. In the past, I don't think that I had one at all. I kind of just trusted God to take me where I needed to go - and I still do that.

[15] - Et bien des gens voient Cockburn comme une influence spirituelle majeure...

[16] - Texte original :

    I've always been aware of the spiritual side to life, and that awareness has sometimes been very tangible and vivid. But it's one thing to have this direct experience of contact with something that appears to be central to existence, but then there's all the uniforms people wear and the customs they adopt. For me, part of the journey has been deciding where I fit in. In the end, I've decided that I don't fit in at all. The proper place for me is outside all the groups.

Cockburn semble fort éloigné des convictions exprimées autrefois dans la chanson Gavin's Woodpile (In The Falling Dark 1976)

    “ But there's a narrow path to a life to come,
    That explodes into sight with the power of the sun. ”

[17] - Un tel état des choses contribue évidemment à l'aliénation ressentie par des gens comme Cockburn.

[18] - À moins que, d'un autre point de vue, l'insécurité véritable consiste à résister de toutes ses forces l'idée qu'il soit nécessaire de faire confiance à un Autre pour diriger sa vie?

[19] - Texte original :

    And how it's changed since then, well, it's been an ongoing process of growth, and over time I've learned as much about God from Hindus, and Sufis as I have from Christians, and from just the experience of life. In all the different places I've seen and the different landscapes I've found myself in. You think it's not as simple as the books like to say, and that's why it says in my heart that God is too big to fit in a book.

[20] - Dans le langage technique de l'anthropologie, on dirait que Cockburn a adopté une religion syncrétique, c'est-à-dire un système de croyances où tout peut s'ajouter et rien n'est exclu priori.

[21] - Dans la chanson Maybe the Poet (album : Stealing Fire 1984) Cockburn fait l'apologétique de la sagesse venue d'ailleurs et de l'ouverture postmoderne.

[22] - vol. 17 no. 11 - 13/3/2008 p. 14

[23] - Mets québécois typique fait de frites, sauce à la viande et fromage en crottes. Très lourd et très gras, pour estomacs blindés et suicidaires seulement...

[24] - Texte original :

    FW: Speaking of LSD, I have a question that I wanted to ask you. The line in "Mystery" that goes "I stood before the shaman, saw star-strewn space, behind the eyeholes in his face" sounds to me kind of like a peyote vision. How do you feel about the usage of substances like that for creative purposes?
    BC: I think that it's perfectly fine, if it's directed and conscious. A lot of people take those kinds of things just to get stoned. I did my share of LSD back in the day, but not on the occasion that the song refers to. I was totally straight, in the middle of an afternoon. (...) We went to his apartment; well, at least to an apartment that he was temporarily staying in, in Toronto. At one point during the conversation with him I had this vivid... I was looking at his face and we were talking about tea or something totally inconsequential, and I'm looking in his face and I had that experience of where his eyes were windows into space and it freaked me right out and I didn't say anything, but he saw me react or something. He saw a look come over my face I guess, and he kind of smiled and didn't say anything. He kind of smiled a knowing smile and that was the extent of it, but it was shocking. I had to assume it was something real because I wasn't stoned.

[25] - Texte original :

    COCKBURN: That was a moment of discovery when my marriage was breaking up. was clear to me a that as painful as it was, and as traumatic as it was, it was a grand learning opportunity, and the chief thing to be learned was that you can try to impose your view on the world all you want, but one of these days a big wind is going to come along and blow it all away and you'll be left sitting there saying, "What was wrong with the way I pictured things?" What I learned right then was don't get too attached to your picture of things, because it's a very narrow view that we have as human beings and it is subject to frequent modification.

[26] - Cockburn s'en sort adroitement en restant très politiquement correct sur un grand nombre de questions. Par exemple, Cockburn a appuyé l'avortement.

    Written statement by BC in the program of a Voters for Choice Concert at which he performed: "God has given us life, and has permitted death in the world. The 'sanctity of life' therefore must refer not to whether we die, but to the quality of what our lives contain. The state has no more right to say people must be born than it does to say they must be put to death."

S'il avait osé remettre en question le politiquement correct dominant tant les médias et milieux artistiques, qu'en serait-il de sa carrière?

[27] - Cockburn semble avoir été tout à fait conscient de cette responsabilité. Il nota en 1979.

    Seems as though that I've always kind of felt that artists of any kind were saddled with a fairly serious responsibility to be fairly careful of what they put in their art in the sense that....it has such a capacity for influencing people, in the subtle ways maybe not in obvious ways, like you don't, you know, change the world by writing songs or painting paintings but.... in a deep kind of subtle way it has an effect on large numbers of people. And therefore, an artist, especially an artist with religious convictions, has to pay kind of close attention to what it is they are saying in their art. What they are influencing people to do. The way that sort of manifests itself in the writing of songs for me is it.....well one way anyway is that I have to kind of look at the songs from the point of view, when they are done, you know, from the point of view of whether or not that what's being said is true. And true for me has a lot to do with whether it coincides, you know, at least in some subtle way, with scripture. I don't see myself as particularly involved with, writing gospel songs, as such. But when I do write a song I kind of look at it and go "well is that, it that right or isn't it".

-- transcribed from a live taping of a concert in Hastings Lake, Alberta, Canada, August 30, 1979. Transcribed by Doug Stacey.

[28] - Conception due aux philosophes grecs à vrai dire. L'idée d'une Vérité incarnée leur échappait...

[29] - Et lorsque Pilate a lancé à Jésus sa question : Qu'est-ce que la vérité?, j'ai toujours considérée que le silence de Jésus dans cette situation n'était pas indicatif d'un refus de répondre de la part de Jésus, mais plutôt qu'une réponse verbale était superflue dans ce contexte, car la réponse était déjà visible, en chair et en os, devant Pilate...














Bruce Cockburn (1970)




















Night Vision (1973)















Joy Will Find A Way (1975)




















In The Falling Dark (1976)















Dancing In The Dragon's Jaws (1979)






















Stealing Fire (1984)


















Nothing But A Burning Light (1991)