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Samizdat

Des arrières pensées:




Un ami biologiste m'a fait les remarques suivantes sur ce texte: "Ouais, tu sais dans le domaine des statistiques ont peut faire dire n'importe quoi (ou presque) aux chiffres. Si on prend une population de phoques ou de souris par exemple et qu'on prend un taux de croissance ponctuel et on l'extrapole sur une période plus longue on arrive à des résultats aberrants car ces populations sont souvent près de leur niveau d'équilibre ressources alimentaires / prédateurs."

Oui certainement, lorsqu'il s'agit de populations d'organismes sauvages la question d'un niveau d'équilibre se pose pour la population. On peut faire deux observations à ce titre.

1) Les animaux peuvent très rarement s'inventer de nouvelles ressources ou se trouver de nouvelles sources d'alimentation. Mais d'un autre coté, lorsqu'on met une espèce dans un environnement nouveau, où il existe de nombreuses ressources inexploités par d'autres espèces, parfois une explosion de population surprenante peu se produire comme se fut le cas lors de l'introduction des lapins en Australie, ou les moules zébrés dans les Grands Lacs canadiens. Tant que le niveau d'équilibre n'est atteint, une croissance exponentielle est certainement possible. Après le Déluge évidemment on postule de grands territoires où pouvaient migrer des populations humaines et exploiter les ressources inutilisés.

2) Dans le cas de l'espèce humaine y a-t-il raison de croire que la croissance démographique humaine soit sujet aux mêmes règles que des populations sauvages? Peut-on dire qu'on observe des populations humaines qui ont atteint un niveau d'équilibre sans faire intervenir des facteurs artificiels comme la guerre ou la contraception et l'avortement ? Comme on l'a noté plus haut, cette situation existe effectivement dans bon nombre de pays développés (qui comportent, entre autres, des populations très scolarisés - facteur contribue souvent à retarder le mariage et diminue le taux de natalité) mais dans les pays du tiers monde généralement le taux de croissance est très élevé. Très souvent dans ces pays les conditions de vie sont assez difficiles (par rapport aux attentes du nord américain ou européen moyen disons) et pourtant leur taux de natalité est loin d'être près du zéro. Règle général, les pays plus pauvres ont les ont les taux de croissance les plus élevés (sauf là où il y a la guerre ou la famine évidemment).

Chez les populations humaines ce qu'il faut constater c'est que deux séries de facteurs affectent le taux de croissance. Comme chez les populations d'animaux sauvages les facteurs environnementaux jouent un rôle évident mais limité, c'est-à-dire disponibilité de nourriture, eau, O2, hygiène etc.

D'autre facteurs qui sont particuliers à l'homme jouent un rôle très important, ce sont les facteurs culturels ou sociaux. Par exemple au Québec du 19e siècle deux cultivateurs travaillent dans leurs champs, côte à côte. Ils investissent le même temps à travailler, leurs terres sont de qualité similaires et ils sont mariés aussi longtemps l'un que l'autre. Mais l'un a 3 enfants et l'autre 12. Pourquoi ? La réponse ne tarde pas car en peu de temps on constate que le premier est protestant (et ne bénéficie pas des visites du curé) et l'autre est catholique. En conclusion, certainement les facteurs environnementaux ont une influence sur le taux de natalité (et le scientifique peut être porté d'y donner plus d'attention car ils sont plus facilement quantifiables, et les scientifiques aiment les chiffres…) mais cette influence est de beaucoup inférieur aux facteurs culturels ou sociaux qui ont un très grand impact sur le taux de croissance des populations humaines (qui sont malheureusement moins facilement quantifiables).

Puisque les données sur la démographiques précises ne remontent pas plus de cent ans pour la majorité des pays du monde, d'un côté et de l'autre du débat, on ne peut que spéculer sur ce qu'était la croissance des époques reculés. Mais les données sur la croissance démographique provenant des pays du tiers devraient nous faire réfléchir sur la possibilité d'un taux de croissance bien au-delà du 0,5 % postulé ci-dessus. Tout porte à croire que les pays développés, avec leurs populations scolarisés et qui investissent des ressources dans les moyens de contraception sont l'exception. Ces conditions ont-elles pu exister dans le passé? Les populations humaines ont-elles jamais été aussi scolarisés qu'à présent ? Les sociétés du passé ont-elles pu dénigrer la maternité et soin des enfants comme c'est le cas dans les pays développés aujourd'hui ou, au contraire, l'ont-ils valorisés ? Il y a-t-il lieu de croire que dans le passé que les facteurs culturels ou sociaux aient favorisés des taux de natalité près de zéro comme on voudrais nous le faire croire ? Sur le plan historique, les attitudes modernes vis-à-vis la maternité et la famille (favorisant de petites familles et les familles mono-parentales, acceptation élargie de l'homosexualité) semblent être fort marginales. Beaucoup plus l'exception que la règle.

Autre détail: dans le cas d'une population dont le taux de natalité ne fait qu'assurer le remplacement des adultes pendant un très longue période, une telle situation rendrait l'espèce en question à la merci d'un ensemble de facteurs dont: les mutations génétiques transmis de génération en génération (pensez au Lac St-Jean au Québéc...), guerres, famines, tremblement de terre ou tout autre cataclysme naturel. Les mutations en particulier sont dangereux car sur une population avec un taux de natalité élevé la sélection naturelle peut opérer sans risque d'éliminer tout le monde, mais dans une population ou le taux de natalité assure seulement le remplace des adultes alors la sélection peut éliminer une génération complète si elle est inadaptée (pensez dynasties égyptiennes ou descendants de la Reine Victoria). C'est un très gros risque à prendre.

Il est aussi utile de souligner que le taux de croissance de 0,5% utilisé pour évaluer la croissance de la population mondiale après le Déluge dans notre discussion ne peut servir que pour établir une vision globale de la situation. Dans les faits, il est probable que la croissance réelle n'a jamais suivi une courbe régulière qui se manipule si bien d'un point de vue mathématique, mais a plutôt suivit une "courbe" en dents de scie. On ne peut donc s'attendre à l'utiliser pour établir la population à une date précise dans le passé. Si on s'adresse à une époque précise il faut plutôt s'attendre à des taux de croissance de beaucoup supérieur à 0,5% suivit de cataclysmes, épidémies, guerres, etc.

Liens additionnels sur la question (anglais)

World Population Since Creation.

Population of the PreFlood World.

Crenson, Matt (2006) Roots of human family tree are shallow.

Douglas L. T. Rohde, Steve Olson & Joseph T. Chang (2004) Modelling the recent common ancestry of all living humans. Nature 431, 562 - 566 (30 September)

Natasha Pinol (2011) L’avantage d’être les premiers arrivés: La genealogie revele un gain en terme de descendance pour les pionniers du Quebec. American Association for the Advancement of Science novembre

Jennifer Carpenter (2011) Pioneers boast high fertility, say scientist. BBC News