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Samizdat

CONCLUSION




Nous arivons maintenant à la conclusion et en fonction de la revue des écrits réalisée dans cette étude, nous tenterons de répondre à notre question de recherche : Quel type de pratique favorise le plus l'apprentissage d'une langue seconde ? D'abord, il est évident que la pratique de classe efficace pour l'acquisition d'une L2 ne correspond pas à une utilisation pure et simple de la langue. L'apprenant doit recevoir une influence de la part du professeur pour porter son attention sur le code linguistique. Cette influence pédagogique peut s'exercer de plusieurs façons. Le type de tâche exécuté par l'apprenant et les consignes liées à celle-ci peuvent l'influencer à diriger son attention vers la forme. L'implication de l'enseignant à l'aide de la rétroaction influencera également l'apprenant. Il y a aussi le degré d'explicité de la tâche qui aidera l'apprenant en ce sens. Le degré d'explicité de la tâche se réfère à la quantité de réflexion métalinguistique incluse dans l'exécution de la tâche, c'est-à-dire la quantité de réflexion que l'apprenant fait sur la langue tout en utilisant cette langue dans le contexte d'un comportement linguistique normal, c'est-à-dire dans une activité communicative. Les techniques qui peuvent produire ce genre d'union entre le sens et la forme sont par exemple le dictogloss proposé par Swain (1998; Swain et Lapkin, 1995), l'enseignement par le traitement de l'input proposé par VanPatten (1992, 1996, 2002, 2004), les différentes techniques de la pédagogie de la tâche, surtout celles de Skehan (1996, 1988a, 1998b) et Willis (1996), et aussi la rétroaction explicite dont nous avons vu l'efficacité dans l'étude de Rosa et Leow (2004) et la rétroaction implicite suggérée par Long (1996).

Il y a également une technique d'enseignement proposée par Tomasello et Herron (1988, 1989) qui est très intéressante. Leur technique, qui s'appelle le garden path (chemin du jardin), sert à enseigner les exceptions des règles grammaticales. Au lieu d'enseigner une règle et ses exceptions dans une seule explication grammaticale, avec le garden path on enseigne seulement la règle et ensuite on passe immédiatement à la pratique. Dans la pratique, le professeur amène délibérément les apprenants à faire des sur-généralisations de la règle pour pouvoir les corriger et leur enseigner les exceptions. Dans une première étude pour vérifier l'efficacité de leur technique, Tomasello et Herron (1988) ont comparé un enseignement garden path avec un enseignement avec des explications de la règle et de ses exceptions dans une seule explication. Les structures cibles qui ont été choisies étaient des structures en français comprenant des exceptions. Les résultats indiquaient clairement que la technique du garden path était plus efficace que le groupe contrôle pour enseigner les exceptions grammaticales. Dans une autre étude, Tomasello et Herron (1989) ont comparé les deux mêmes techniques, mais ont utilisé des structures qui provoquaient une autre type de sur-généralisations, des erreurs de transfert avec la L1. Les résultats de cette deuxième étude ont été tout aussi concluants. Les auteurs pensent que l'efficacité de leur technique est due au fait que, lors de la pratique, les apprenants font des hypothèses en tentant d'appliquer une règle, et lorsque leurs hypothèses s'avèrent fausses, ils reçoivent immédiatement une rétroaction leur indiquant “ sur le terrain ” dans quelle circonstance elles sont fausses. En leurs propres mots, ils affirment : “ Pendant que les structures de langage peuvent s'apprendre de plusieurs façons, nous faisons l'hypothèse que les situations d'apprentissage provoquant des comparaisons cognitives vont faciliter l'apprentissage ” (Tomasello et Herron, 1989, p.387). Avec le garden path, les apprenants peuvent comparer leurs propres hypothèses avec la rétroaction immédiate du professeur. Dans cette technique, on retrouve tous les ingrédients qui facilitent l'acquisition des L2. Il y a d'abord un haut degré d'explicité, ensuite une utilisation normale de la langue et finalement la rétroaction.

Des pistes pour la recherche

En premier lieu, il est clair que les recherches devraient se faire dans le cadre de la pédagogie basée sur la tâche. La tâche est devenue maintenant le point de référence en matière de syllabus puisqu'elle a la vertu d'unir les différentes options d'enseignement abordés dans cette étude, sauf bien sûr la proposition de DeKeyser sur l'acquisition des habiletée complexes qui fait bande à part. Avec la pédagogie basée sur la tâche peuvent s'unir l'utilisation de la langue dans une situation communicative et l'attention portée sur les formes linguistiques. Sur cette question, Ellis affirme : “ ...l'argument qui stipule que le syllabus basé sur la tâche doit remplacer le syllabus linguistique n'est pas un argument nécessaire puisqu'il est possible de construir un syllabus contenant les deux types ” (2003, p. 210).

Dans les recheches sur la pédagogie basée sur la tâche, il faudrait premièrement faire l'évaluation de cette proposition d'enseignement. Il y a plusieurs études en didactique des L2 qui ont été réalisées jusqu'à maintenant, mais toutes au niveau de la tâche prise comme unité et aucune au niveau de l'ensemble d'un programme d'enseignement. Il faudrait également comparer les différentes options proposées dans cette proposition d'enseignement. À ce chapitre, l'étude de Rosa et Leow (2004), qui compare les différentes options d'expositions dans la réalisation d'une tâche, est un excellent commencement et comme nous l'avons mentionné, la duplication de cette étude serait une piste intéressante à suivre. Il serait souhaitable de réaliser une recherche à plus long terme et avec des structures grammaticales différentes à celle de Rosa et Loew.

Dans le domaine de la pédagogie basée sur la tâche, il reste également beaucoup de recherche à faire au niveau des caractéristiques des tâches avec la finalité de développer un système de classification par ordre de difficulté. Plusieurs systèmes sont proposés et il reste à établir un consensus. Également, il serait intéressant de vérifier la proposition de Skehan au sujet des tâches et de leurs consignes comme éléments déclencheurs au développement de la précision, de la complexité et de l'aisance.

Dans cette étude, nous avons mis l'accent sur la pratique dans des circonstances qui s'apparentent à des situations de communication réelle et nous avons presque complètement omis les activités contrôlées et hors contexte. Selon l'approche de DeKeyser, ce type de pratique pourrait avoir de l'utilité pour affermir les connaissances déclaratives pour qu'elles puissent ultérieurement se développer en connaissances procédurales. Mais qu'en est-il vraiment de ce type de pratique ? Est-ce que ces activités sont de quelconque utilité en acquisition des L2 ? Il serait intéressant de faire des études en ce sens en comparant par exemple l'efficacité de la pratique en situation de communication et la pratique mécanique.

Dans cette étude, nous avons également négligé la question des structures participatives dans la réalisation des tâches. Une pratique de classe peut se réaliser en équipe de deux personnes, en petits groupes, la classe au complet ou encore seul. Quand est-il préférable de faire pratiquer la langue de telle ou de telle autre façon ? Quels sont les inconvénients et les avantages du travail en équipe ? Ces questions ont été peu soulevées dans les recherches en didactique des L2 et il serait très utile de s'y attarder étant donné leur importance dans la pédagogie basée sur la tâche.

Un autre domaine d'étude que nous considérons intéressant concerne la suggestion d'Ellis (1999) au sujet de l'interaction intra-personnelle. Nous croyons qu'il est très important de développer un discours intérieur chez l'apprenant en réaction à l'input qu'il reçoit puisque c'est ce que l'apprenant fait avec l'input qui peut causer sa transformation en intake et ensuite en apprentissage. La recherche en ce domaine pourrait nous indiquer les façons les plus appropriées de provoquer ce discours chez les apprenants.