Leur signification biblique[1]
Douglas Kelly (2012)
L'œuvre du premier jour de la création nous met face à la différence majeure qui existe entre le christianisme biblique et le naturalisme séculier : une création ex nihilo par un Dieu infini et personnel, en totale contradiction avec le concept de l'éternité de la matière et de l'énergie. L'autre grande différence, probablement irréductible, entre la présentation biblique de la réalité et celle de la philosophie humaniste est la question du temps, et plus particulièrement l'âge de l'univers. D'immenses périodes de temps sont nécessaires pour que la théorie de l'évolution puisse valider une alternative impersonnelle, sécularisée et vraisemblable à la création divine. En raison d'une conception du monde très largement modifiée au XIXe siècle par l'adoption du grand âge de la terre, d'abord en géologie, puis en biologie, et bientôt dans tous les autres domaines, ceux qui prenaient les Écritures au sérieux ont été confrontés à des questions difficiles quant à l'interprétation des six jours de la création.
D'où, dès le début ou le milieu du XIXe siècle, toute une gamme d'interprétations du mot “ jour ”, même parmi les commentateurs traditionnels de la Bible. Mais avant d'examiner ces interprétations, nous nous intéresserons à l'emploi du mot “ jour ” dans la Genèse et plus généralement dans la Bible.
Utilisation biblique du mot “jour”
D'une manière générale, la Bible utilise le mot “ jour ”
(yom en hébreu) pour désigner soit un jour solaire de
vingt-quatre heures, soit sa partie diurne. Lorsque le mot “ jour ”
est modifié par un nombre ordinal (comme “ jour un ”
ou “ jour deux ”), il correspond, sur le plan scripturaire
et universel à un jour[2] solaire normal.
Parfois, “ jour ” est utilisé dans les Écritures
pour indiquer une période de temps indéfinie (comme dans Job
7:6 : “ Mes jours sont plus rapides que la navette du tisserand... ”,
ou bien dans Psaumes 90:9 : “ Car tous nos jours déclinent
par ton courroux ”). Mais dans ces cas-là, “ jour ”
désigne encore une succession de jours normaux, et non pas de très
longues périodes, au gré de l'imagination des exégètes.
“Jour” (yom) peut aussi à l'occasion désigner
une partie de l'année, comme pour la moisson du blé (Genèse
30:14), mais là encore, il s'agit de quelques semaines de jours solaires
et non pas de milliers ou de millions d'années.
Le “ jour du Seigneur ”, expression fréquente chez les prophètes, est bien évidemment un jour très particulier qui, hormis sa signification prophétique, n'est pourtant rien d'autre qu'un jour ordinaire, rendu extraordinaire par l'intervention finale de Dieu. Elle n'indique en aucun cas de vastes périodes et ne contredit pas davantage l'usage biblique courant du mot “ jour ” comme un jour solaire ordinaire. Comme le disait Saint Hilaire de Poitiers au IIIe siècle : “un jour est caché afin que tous les autres soient révélés.”
Quelques textes bibliques disent clairement que le mot “jour” signifie quelquefois autre chose qu'une période de vingt-quatre heures. 2 Pierre 3:8 en est un exemple typique : “ (...) devant le Seigneur, un jour est comme mille ans...” Mais ici le contexte indique clairement que le mot dépasse sa signification historique, littérale. Ce jour exceptionnel ne peut être légitimement interprété comme une succession normale de jours (comme si, par exemple, à cause de 2 Pierre 3:8, les sept jours de la création avaient automatiquement duré sept mille années), à moins que le contexte littéral et grammatical du passage ne requière une telle transformation. Les textes de Genèse 1 et 2 n'attestent aucun changement de ce genre, mais requièrent, au contraire, une séquence normale de jours solaires.
Le scientifique Henry M. Morris semble avoir raison, lorsqu'il souligne le fait que “jour” dans Genèse 1 et 2 signifie un jour solaire normal :
“ De plus, Dieu appela la lumière jour et il appela les ténèbres nuit. Comme s'il prévoyait la méprise future, Dieu a soigneusement défini les termes! Ainsi “jour” (yom en hébreu) est, dès sa première utilisation, défini comme la “lumière”, pour le distinguer des ténèbres appelées “nuit”.
La séparation opérée par Dieu entre le jour et la nuit marque l'achèvement de l'œuvre du premier jour. “Il y eut un soir, il y eut un matin : ce fut le jour UN.” La même formulation se retrouve à la fin de chacun des six jours; il est clair qu'à partir du premier jour, un ordre cyclique de jours et de nuits s'est instauré, soit des périodes alternées de lumière et de ténèbres.
Ce genre de disposition cyclique lumière-ténèbres montre clairement que la terre était maintenant en rotation autour de son axe et qu'il existait une source de lumière sur un des côtés de la terre correspondant au soleil, bien qu'il ne fût pas encore créé (Genèse 1:16). Il ne fait également aucun doute que chacun de ces jours équivalait nécessairement à un jour solaire normal.
Le premier chapitre de la Genèse notifie la fin de l'œuvre de chaque jour par la formule : “Il y eut un soir, il y eut un matin : ce fut un (un deuxième, etc.) jour.” Ainsi chaque “jour” avait des limites distinctes et s'inscrivait dans une série. Ces critères ne sont jamais présents dans l'Ancien Testament, sauf lorsqu'il s'agit de jours solaires. L'auteur de la Genèse voulait empêcher, de toutes les manières possibles, chacun de ses lecteurs d'en induire la possibilité de jours non solaires, d'immense durée. ”[3]
Une confirmation supplémentaire des jours solaires de la Genèse est fournie par le motif annexé au quatrième commandement (“Souviens-toi tu jour du Sabbat pour le sanctifier ”) dans Exode 20:11 : “Car en six jours, l'Eternel a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qui s'y trouve, et il s'est reposé le septième jour; c'est pourquoi l'Eternel a béni le jour du Sabbat et l'a sanctifié. ”[4]
Ici, le point crucial est que l'œuvre créatrice de Dieu, suivie d'un temps de repos, forme le modèle d'une vie saine pour les porteurs de son image, savoir l'humanité. L'humanité est si importante pour le Dieu infini qu'il a explicitement organisé son activité créatrice dans le but précis de structurer l'existence humaine. C'est la raison principale qui a présidé à la totalité de la création en six jours, au lieu d'une fraction de seconde (ou de dix milliards d'années).
Cette conclusion est loin d'être absurde lorsque l'on prend au sérieux l'incarnation du Fils éternel de Dieu en un véritable être humain, pour la rédemption de l'humanité. Si le Dieu infini a daigné prendre sur lui notre humanité, en la personne de son Fils, le fait d'avoir organisé la durée de la semaine de la création autour des intérêts de la race humaine (la future épouse du Fils de Dieu) n'est pas – bien que merveilleux à contempler – incompatible avec l'alliance d'amour et de grâce. En effet, l'incarnation de l'Auteur de la création dans les limites du temps (sans qu'il cesse lui-même d'être infini) semble être un bien plus grand miracle que la création elle-même. En regard d'un Dieu qui s'accommode lui-même de la poussière de la terre, nous devrions admettre sans réticence qu'il a pu soumette sa puissance redoutable et infinie à une certaine période de temps. Le temps et la poussière sont des éléments du créé dont Dieu dispose; ce ne sont pas ses maîtres.
Trois autres arguments tirés des Écritures ont permis de ne plus donner aux jours le sens de jours solaires. Deux d'entre eux peuvent être mentionnés brièvement, mais le troisième appelle à davantage de réflexion. Premièrement, il est exact que le soleil n'a été placé dans les cieux qu'au quatrième jour, et qu'ainsi on ne peut parler des trois premiers jours comme étant strictement des “jours solaires normaux”. C'est pourquoi, certains en ont déduit que les trois premiers jours ont pu durer très longtemps. Si le contexte du chapitre 1 de Genèse ne nous donnait pas plus d'informations, cette observation aurait une incidence sérieuse. Mais le fait même, comme nous l'avons déjà vu, que “(...) chaque “jour” avait des limites distinctes et faisait partie d'une série de jours (deux critères jamais présents dans l'Ancien Testament, sauf s'il s'agit de jours pris au sens littéral)”[5], ce fait donc apporte une réponse issue du contexte même de la Genèse. Exode 20:11 vient confirmer, si besoin était, une lecture littérale des sept jours comme des jours normaux, d'égale durée.
Un deuxième argument favorable à l'allongement des jours en longues périodes est l'argument du silence, car la formule finale : “Il y eut un soir, il y eut un matin : ce fut le septième jour” est absente du texte après la création du Sabbat. Le Dr Hugh Ross, par exemple, dit que l'absence de cette formule “suggère fortement que ce jour n'a (ou n'avait) pas encore pris fin ”[6]. Il en tire alors la conclusion suivante : “De ces passages (Psaumes 95 et Hébreux 4), nous déduisons que le septième jour de Genèse 1 et 2 représente un minimum de quelques milliers d'années, et un maximum qui reste ouvert (mais limité). Il semble donc raisonnable de conclure, étant donné le parallélisme du récit de la création dans la Genèse, que les six premiers jours ont pu également durer de longues périodes de temps.” [7]
Le moins que l'on puisse dire, c'est que cela pèse d'un grand poids théologique sur un pont exégétique aussi étroit que léger! N'est-il pas plus plausible, avec le sens manifeste du contexte de Genèse 2 (et d'Exode 20), d'en déduire que la légère différence qualitative - et non quantitative - du Sabbat (car rien dans le texte lui-même ne le laisse entendre) a réclamé une conclusion légèrement différente pour marquer cette différence qualitative (six jours de travail, un jour de repos)?
La formule pour la fin de ce premier Sabbat : “Le septième jour, toute l'œuvre que Dieu avait faite était achevée et il se reposa au septième jour de toute l'œuvre qu'il avait faite” (Genèse 2:2) semble, selon toutes les normes de l'interprétation biblique, indiquer une fin tout aussi précise que : “Il y eut un soir, il y eut un matin : ce fut le premier jour.”
Nous avons là encore une contrainte d'autant plus forte que l'objectif de Dieu, dans l'œuvre des six jours et le repos d'un jour, était, nous nous en souvenons, d'offrir un modèle bien réglé, capable de structurer la vie des porteurs de son image. En revanche, si l'absence de cette formule finale signifie que le Sabbat, en tant que modèle divin, a duré des milliers d'années, alors comment les hommes pouvaient-ils se conformer au commandement divin de travailler six jours par semaine et de se reposer le septième (Exode 20:9)?
De tels arguments pour transformer la semaine de la création en quelques milliers (ou millions) d'années paraissent très sophistiqués et très artificiels au vu du contexte de la Genèse et de la Bible en général. Les exégètes doivent se lancer dans une sorte de casuistique moderne, s'ils veulent faire du “jour” de la Genèse autre chose qu'un jour solaire ordinaire. Après s'être colleté avec ce genre de reconstructions évangéliques de la semaine de création, il faut d'autant plus apprécier l'honnêteté de l'exégète libéral, le professeur écossais Marcus Dods, lorsqu'il écrit : “Si, par exemple, le mot “jour” dans ces chapitres ne signifie pas une période de vingt-quatre heures, l'interprétation des Écritures est sans espoir.”
Un père de l'Église du IVe siècle, Saint Ambroise de Milan, a fidèlement résumé l'usage biblique du mot jour dans son Hexameron :
“Le commencement du jour repose sur la Parole de Dieu : ‘Que la lumière soit! Et la lumière fut.' La fin du jour est le soir. Maintenant le jour suivant suit la fin de la nuit. La pensée de Dieu est claire. En premier lieu, il appelle la lumière “jour” et ensuite il appelle les ténèbres “nuit”. Il faut remarquer que les Écritures ont parlé du “Jour Un” (Yom Ehad, jour cardinal) et non d'un “premier jour ” (ordinal). Parce que le deuxième, et ensuite le troisième jours et finalement le reste des jours allaient suivre, on aurait pu mentionner un “premier jour” et suivre ainsi l'ordre naturel. Mais les Écritures ont établi une loi pour ne donner le nom “jour” qu'à une période de vingt-quatre heures, incluant un jour et une nuit, comme pour dire que la longueur d'un jour serait de vingt-quatre heures.”
L'hypothèse du cadre
L'hypothèse du cadre (“ Framework Hypothesis ”)
représente une troisième méthode pour parer à
la force normative du mot jour pendant la création. Cette méthode
esquive la séquence chronologique de six jours de vingt-quatre heures
(et un jour de repos), en créant une rupture entre l'ordre chronologique
“littéral” et le cadre “littéraire”
des Écritures. Arie Noordizij, professeur à l'Université
d'Utrecht en 1924, est le premier à avoir développé cette
“théorie du cadre”. Ayant constaté un parallélisme
entre les trois premiers jours et les trois autres jours de la création,
il en a tiré des conséquences inhabituelles.
E. J. Young paraphrase la théorie de Noordzij :
“Noordzij pense que les six jours ne correspondent pas à un processus naturel, d'après la façon dont l'auteur a rassemblé ses données. Nous avons deux séries de trois jours, avec un parallélisme prononcé dont le but est de mettre au premier plan la gloire prééminente de l'homme, qui accomplit ainsi sa destinée dans le Sabbat, car le Sabbat est le point culminant de l'œuvre créatrice de Dieu (...). Ce qui compte n'est pas le concept de “jour” pris isolément, mais plutôt le concept de six plus un.
Dans la mesure où l'auteur parle de soirs et de matins, avant les corps célestes du quatrième jour, continue Noordzij, il est clair qu'il utilise les termes “jours” et “nuits” comme cadre (kader). La division du temps, conçu ici comme une simple projection, n'a pas pour but de nous montrer la création dans son déroulement historique, mais comme ailleurs dans les Saintes Écritures, de révéler la majesté de la création, à la lumière du grand dessein salvateur de Dieu (...). Pourquoi alors les six jours sont-ils mentionnés, dira-t-on? D'après Noordzij, ils ne sont mentionnés que pour nous préparer au septième jour.”[8]
Cette approche a été largement popularisée durant les trente dernières années par les écrits du professeur Meredith Kline de la Faculté théologique de Westminster Ouest, très connu comme spécialiste de l'Ancien Testament et auteur de recherches importantes sur la théologie de l'Alliance. Dans son Commentary on Genesis, il dit :
“ (...) Cependant le caractère littéraire du prologue (= Genèse 1:1 - 2:3) n'en permet qu'une utilisation limitée dans la construction de modèles scientifiques, car son langage est celui de la simple observation, et sa qualité poétique, reflétée dans sa structure en strophes, pénètre son style. L'exégèse note que le schéma de la semaine de la création est lui-même une figure poétique, et que les différents tableaux de l'histoire de la création s'insèrent dans des cadres de six jours œuvrés, non pas chronologiquement, mais par thèmes...”[9]
Cette “hypothèse du cadre”, où le sens chronologique “littéral” est déconnecté de sa signification “littéraire”, a été largement développée par le professeur Henri Blocher,[10] de la Faculté de théologie évangélique de Vaux sur Seine, dans son livre Révélation des origines. Blocher oppose une approche “ littéraire ” à l'interprétation “littérale” qui suppose la simple historicité chronologique des six jours de la création. D'après lui, la forme de semaine attribuée à la création est celle d'un arrangement artistique, un anthropomorphisme sobre qui n'a nul besoin d'être pris au sens littéral.[11] C'est ainsi que l'on pense pouvoir éviter le conflit avec les thèses modernes d'un univers extrêmement ancien, ce qui laisse place à un développement évolutionniste.
Parmi les composantes fréquentes de l'“ hypothèse du cadre ”, opposée à une lecture chronologique des sept jours de Genèse 1 et 2, figure la proposition du Dr Kline pour qui Genèse 2:5 (“ aucun arbuste; aucune herbe des champs n'y germait encore (...) l'Eternel Dieu n'avait pas fait pleuvoir sur la terre ”) implique des processus providentiels qui n'auraient jamais pu avoir lieu en six jours de vingt-quatre heures.
Il en tire la conclusion que la Genèse n'enseigne pas une séquence chronologique de la création, mais “(...) un cadre figuratif, où les données de l'histoire de la création ont été organisées dans un souci autre que celui de la stricte chronologie des événements”.[12]
Dès lors, comment évaluer[13] cette “hypothèse du cadre”, avec la dichotomie qui la caractérise? Personne ne voudrait désapprouver à la légère des intellectuels chrétiens évangéliques aussi distingués, si la question ne s'avérait d'une très grande importance pour toute l'herméneutique biblique. L'enjeu est ici beaucoup plus fort que la question évidemment complexe de l'âge de la terre. Car même si la préférence allait à un cosmos très ancien, la méthode envisagée comporte des risques beaucoup trop élevés par rapport aux affirmations de la vérité contenues dans toute la Bible. Car, dans l'intérêt de cette théorie, ils ont introduit une dichotomie, potentiellement désastreuse, entre la forme littéraire et une interprétation viable des textes bibliques au plan de l'histoire et de la chronologie. Il serait naïf de croire que ce dualisme herméneutique à longue portée peut être tout simplement abandonné à la fin du deuxième chapitre de la Genèse, sans être appliqué à d'autres textes, dans la mesure où ils contredisent les spéculations naturalistes[14] de type courant.
Je ne connais personne qui ait une analyse plus perspicace de ce problème que Jean-Marc Berthoud, un érudit réformé de Lausanne en Suisse. Lors d'un échange de lettres (aujourd'hui publiées) avec le professeur Henri Blocher, Berthoud démasque la présomption fondamentale qui préside au fonctionnement de la théorie du cadre.[15] Sa critique de Blocher porte sur la substitution d'une approche “ littéraire ” à l'interprétation “littérale” (ou “ littéraliste ”) de la Bible.[16]
En réaction à ce dualisme entre forme littéraire et réalité historique, Berthoud écrit : “(...) l'opposition littéraliste-littéraire que l'on voit partout dans votre livre est un schéma inadapté aux réalités bibliques (...). Vous partez du présupposé non formulé que ce que vous appelez raffinement littéraire et lecture littérale s'excluent l'un l'autre presque obligatoirement.”[17] Berthoud déclare, bien à propos, que cette scission axiomatique entre un style littéraire et un sens littéral, décrit une position philosophique totalement étrangère à la Bible.
“ Quelle difficulté alors pour lui (l'Auteur de l'univers) à faire coïncider la forme littéraire la plus complexe, la plus raffinée, avec la manière dont il aurait lui-même créé toutes choses en six jours? L'ordre artistique ne s'oppose donc aucunement à l'ordre semblable des faits, à moins évidemment que l'Auteur du récit ne soit autre que le Créateur des faits décrits (...). C'est par conséquent votre constante opposition de l'interprétation littéraire à l'interprétation littérale que je mets en question. Car le débat véritable n'est aucunement prose contre poésie, interprétation littéraire contre interprétation littérale, mais interprétation vraie contre interprétation fausse. La véritable opposition est style littéral vrai contre style littéraire faux. ”[18]
James B. Jordan a abordé de manière similaire cette dichotomie inutile :
“L'hypothèse du cadre” (...) dit que les six jours ne sont pas des laps de temps, mais seulement une convention littéraire favorable à une création en six étapes. Le problème fondamental avec ce point de vue est qu'il oppose sans nécessité une interprétation théologique à une interprétation littérale (...). La dimension théologique de la création en six jours réside exactement dans le fait qu'il s'agit d'une séquence temporelle (...). Dieu n'a aucune raison de créer le monde en six jours, si ce n'est comme modèle à suivre pour l'homme, créé à son image. Là où la Bible utilisera plus tard un modèle théologique de trois jours, de six jours ou de sept jours, celui-ci s'inscrira toujours dans le cours du temps, avec un début et une fin. L'hypothèse du cadre, à l'instar du platonisme, transforme la séquence temporelle en un simple corpus d'idées. En se voulant théologique, “l'hypothèse du cadre” passe complètement à côté de la théologie biblique. ”[19]
Jean-Marc Berthoud pense que cette scission entre “littéraire” et “littéral” (ou, selon Jordan, “théologique” et “littérale”) incarne une sorte de renouveau philosophique du nominalisme, tel qu'il était pratiqué par l'érudit médiéval, William d'Occam. À propos du genre d'exégèse pratiquée par Blocher, Berthoud déclare qu'“il s'agit en fait ici d'une exégèse nominaliste (...). Pour Occam, la forme du nom (d'où “nominalisme”) n'avait aucune relation véritable avec la chose nommée ou signifiée. De même ici (dans “l'hypothèse du cadre”), la forme littéraire n'a pas de relation véritable avec la réalité temporelle de la création”.[20]
La séparation effectuée par Occam entre les choses et leurs représentations mentales n'est pas de faible importance dans la façon dont on regarde le monde, et dont on interprète les textes littéraires (anciens ou modernes).
Dans son commentaire sur la seconde distinction d'Occam, dans le premier livre de son Commentaries on the Four Books of (Lombard's) Sentences (Question VI, E), Paul Vignaux remarque que, d'après cette procédure nominaliste classique, “il ne s'agit pas des choses réelles que nous connaissons, mais de propositions au sujet de ces choses (...). Le contenu de la pensée importe peu; le point de vue présenté ici est purement formel (...). Le type de logique qui est à l'origine du nominalisme transforme un concept mental en rien de plus qu'une parole; le processus de connaissance n'aboutit pas à une véritable apppréhension par l'intellect d'un contenu externe, mais donne un nom à une chose qui lui est extérieure, de sorte que la pensée joue le rôle d'une sorte d'algèbre”.[21]
En dernier ressort, cette perspective ne nous laisse rien, sinon une collection de mots. Vignaux pose la bonne question : “Que savons-nous? Des propositions, composées de termes, qui ne sont que les signes des choses.”[22] On pourrait ainsi dire que d'authentiques connexions externes entre diverses réalités sont remplacées par des relations entre des mots (en une sorte d'algèbre verbale, comme le suggère Vignaux). Les déclarations d'Occam dans Distinctions XXX du Livre I de son Commentaries on the Four Books of Sentences (Question I, S) indiquent que les relations exprimées par des paroles humaines “(...) n'ont aucune réalité propre en dehors de l'esprit”.[23]
Le nominalisme est une évasion hors du “réalisme” (qui, lui, pose une relation réelle entre le texte littéral et les faits historiques, les événements et les personnes mentionnés dans le texte).[24] Comme Berthoud l'écrit ailleurs : “Dans l'esthétique de la Bible (et de la grande littérature qui s'en inspire), la forme est mariée à la vérité et la vérité commande toujours la forme.”[25] À propos de ce genre d'évasion nominaliste hors de la réalité (ou “de la vérité de l'être”), T. F. Torrance note sans ambages dans son livre Theological Science:
“Le problème ici est de savoir, si la vérité se préoccupe surtout des références à la réalité des choses que l'on affirme, ou plutôt des liens logico-syntaxiques entre ces déclarations, de telle sorte que celles-ci doivent être repérées à l'intérieur d'appareils idéologiques. Une double erreur semble se dissimuler ici : (a) la réduction de la vérité à des idées, l'erreur étant ici que les seules idées suffisent à expliciter leur relation à l'être (la réalité); (b) la réduction de la vérité à des affirmations, l'erreur étant alors de croire que les seules affirmations suffisent à définir le lien avec ce qui est dit. L'une implique la “ conversion ” des propositions universelles en entités abstraites, l'autre laisse entendre qu'en fin de compte la science ne s'occupe que de propositions. Cela représente une mutation de la connaissance intuitive de la réalité vers la connaissance abstraite, soit de l'idéal soit du symbolique, avec dans les deux cas une déviance eu égard à la vérité de l'être. ”[26]
En ce qui concerne le réalisme et la distinction dualiste entre “ littéral ” et “ littéraire ” dans les premiers chapitres de la Genèse, il ne faut pas oublier que chaque proposition philosophique, en particulier lorsqu'elle contrôle l'exégèse, doit être examinée à la lumière des Écritures. Est-ce que les Écritures fonctionnent sur la base de ce genre de présupposé ou à partir d'un présupposé différent? Le professeur Meredith Kline a certainement raison lorsque, après avoir proposé sa théorie du cadre, il déclare : “lorsqu'on distingue une simple description et une figure poétique de ce qui est sans nul doute (purement) conceptuel, le seul guide, ici, comme toujours, est la comparaison avec le reste des Écritures.”[27]
Ailleurs dans les Écritures, un genre littéraire sophistiqué (tel la présentation en strophes ou sous forme d'hymne de Philippiens 2:5-11, par exemple) ne paraît pas évacuer le sens littéral et historique des grandes étapes de l'humiliation et de l'exaltation du Christ. S'il n'existe pas ici de dichotomie entre la forme littéraire et les faits historiques et chronologiques, pourquoi devrait-il y en avoir dans Genèse 1 et 2 ? Ne pourrait-on pas imputer cette dichotomie à un facteur externe aux Écritures plutôt qu'à des considérations herméneutiques internes?
De plus, la façon dont le Nouveau Testament mentionne Genèse 1-11 non seulement ne suggère pas une dichotomie entre la forme littéraire de ces chapitres et leur véracité littérale, chronologique et historique, mais exclut-il, sans aucun doute possible, une telle procédure. Les Notes bibliographiques et techniques examinent cette question en détail.
Nous avons émis l'idée qu'un facteur externe aux Écritures a dû inciter certains exégètes chrétiens distingués à recourir à un mode d'interprétation qui torture les textes, lesquels, malgré leur richesse littéraire, ont toujours été considérés comme faisant référence clairement à des réalités historiques et chronologiques. Le Dr Hugh Ross précise la nature de ce facteur :
“Je vois la communauté des scientifiques, y compris les astronomes et les astrophysiciens, comme un ethnos (peuple). Dieu nous demande de les atteindre, tout comme il nous le demande pour tout autre groupe sur la planète. Bien qu'il nous avertisse que la simplicité enfantine de la foi en Jésus sera une pierre d'achoppement pour beaucoup, nous avons involontairement placé une autre barrière sur leur chemin : le dogme d'une terre vieille de quelques milliers d'années. Je ne peux imaginer de notion plus choquante pour cette communauté... ”[28]
De la même manière, le Dr Blocher parle de ceux qui remettent en cause les idées du naturalisme sur les origines anciennes, opinions associées à la thèse du développement évolutif, comme les équivalents intellectuels des pilotes kamikazes qui se projettent avec fracas sur le monde académique :
“ A nos yeux, les adversaires des opinions établies, émouvants comme des kamikazes du monde académique, font preuve de légèreté à deux moments décisifs : quand ils minimisent la valeur des recoupements et des convergences entre les travaux des savants “ officiels ”, et quand ils attribuent à la Genèse, sans tolérer la discussion, un sens que d'autres lecteurs n'y trouvent pas, et qu'eux mêmes ne justifient que par le seul a priori du littéralisme. ”[29]
Ainsi, pour éviter d'offenser la “ communauté scientifique ” et pour ne pas faire partie des volontaires kamikazes, certains conservateurs chrétiens ont importé une procédure philosophique étrangère à l'interprétation des Écritures, savoir une dichotomie inutile entre la forme littéraire et la vérité historique.
Il serait faux de ne pas louer ces intellectuels chrétiens pour leur sincère désir d'atteindre les intellectuels inconvertis avec un minimum d'offense. Il faut aussi reconnaître qu'ils n'ont aucune intention d'amoindrir la vérité des Écritures.[30] Mais, à mon avis, lorsque leur approche est comparée à l'usage des Écritures par les Écritures, elle présente un net déficit. Tout en appréciant la sincérité de leur foi et leurs efforts pour atteindre ceux qui sont perdus, on ne peut les suivre, et ce pour deux bonnes raisons. En premier lieu, l'introduction dans les Écritures d'une procédure d'interprétation étrangère (la dichotomie entre la forme et le fait) obscurcit involontairement la pure lumière que la Parole de Dieu fait briller sur notre compréhension de la réalité espace/temps, aussi bien que sur l'autorité transcendante qui la contrôle. En second lieu, ces intellectuels causent un grave tort aux sciences naturelles, précisément parce que ce n'est pas en voilant la lumière de la vérité divine que ceux qui sont dans les ténèbres peuvent être appelés à la repentance et à une restructuration complète de leur mode de pensée, au niveau le plus profond.[31]
Cet ouvrage a été écrit avec la certitude qu'il existe de meilleures méthodes; l'une tiendrait à une lecture réaliste (et non nominaliste) des Écritures, l'autre consisterait à s'interroger, au niveau des présupposés et de l'expérimentation, sur les théories naturalistes des origines, encore largement acceptées (bien que déjà à un moindre degré). Le chapitre suivant porte sur l'âge de l'univers et constitue un pas dans cette direction.
Est-ce que Genèse 2:5 implique une lecture non-chronologique de la semaine de création?
Dans son article “ Because It Had Not Rained ”,
le professeur Kline examine les implications de Genèse 2:5 : “ Il
n'y avait encore aucun arbuste des champs sur la terre, et aucune herbe des
champs ne germait encore : car l'Éternel Dieu n'avait pas fait pleuvoir
sur la terre, et il n'y avait point d'homme pour cultiver le sol. ”[32]
Il soutient que cette observation, faite par Moïse, sur la dépendance des plantes à l'égard de l'eau (ou bien de la “ pluie ” ou de l'irrigation par l'homme) implique que “ (...) l'œuvre de la providence (...) était une partie du gouvernement du monde, dans la mesure où le monde existait déjà, avant que chaque nouvel acte de création ne soit produit (...). Si l'organisation de Genèse 2 ne portait pas sur un lieu déterminé, Genèse 2 devrait contredire ce que Genèse 1 enseigne (sans même parler de la révélation naturelle), c'est-à-dire que la végétation précède l'homme sur la terre (...). Le principe du modus operandi de la divine providence scellé en Genèse 2:5ss est aussi opérant pendant la période de création que dans l'action ordinaire de la Providence aujourd'hui ”.[33]
Kline fait alors observer que l'allusion de Genèse 2:5 à l'action normale de la providence de Dieu dans le monde créé rend totalement impossible sa limitation à six jours de vingt-quatre heures.[34] Il écrit :
“ En contradiction avec Genèse 2:5, la théorie
du jour de vingt-quatre heures présuppose obligatoirement l'utilisation
d'autres moyens que les causes secondes ordinaires dans l'œuvre providentielle
de Dieu. Pour prendre un exemple, ce fut pendant l'œuvre du “ troisième
jour ” que les eaux furent rassemblées dans des mers,
que le sol sec apparut et se couvrit de végétation (Genèse
1:9-13). Selon la théorie en question, tout se fit en vingt-quatre
heures. Mais les continents à peine émergés (de dessous
les mers) ne peuvent s'assécher aussi rapidement par le processus
ordinaire d'évaporation. Et pourtant, selon le principe révélé
en Genèse 2:5, ce processus d'évaporation était le
même en ce temps là qu'aujourd'hui.
Le résultat frise de fait l'absurde quand on cherche une synchronisation entre Genèse 2:5 et Genèse 1 interprété selon le schéma de sept jours de vingt-quatre heures. Selon cette interprétation, la végétation fut créée au cours de ce que nous pouvons appeler le “ mardi ”. Ainsi, la situation de la terre dépourvue de végétation, décrite en Genèse 2:5, ne peut correspondre qu'à celle du mardi matin. Elle ne peut être localisée plus tôt, car Genèse 2:5 suppose l'existence d'un sol sec, qui ne doit apparaître que le “ troisième jour ” (...). En conséquence, les théoriciens des vingt-quatre heures doivent penser que le Tout-Puissant a hésité à créer la végétation le matin du mardi, parce que la pluie ne viendrait que plus tard ce même jour! ”[35]
En somme, le professeur Kline défend l'idée que Genèse 2:5 attribue l'absence de végétation à des causes naturelles et “ qu'ayant été confronté à l'évidence des procédures providentielles ordinaires ”, on est “ obligé de rejeter l'interprétation chronologique rigide de Genèse 1, pour la raison qu'elle présuppose nécessairement des opérations providentielles radicalement différentes de celles de la période de création. Si Genèse 2:5 évacue certaines interprétations traditionnelles respectueuses de la structure chronologique de Genèse 1, elle avalise de la même manière l'interprétation moins traditionnelle qui voit dans la cadre chronologique de Genèse une représentation figurative de la durée totale de la création et estime qu'à l'intérieur de ce cadre figuratif, les données historiques de la création ont obéi à des considérations non strictement chronologiques.[36]
Notre réponse
Un examen plus attentif de la finalité des récits de Genèse
1 et 2 et de leurs interconnexions devrait permettre de lever la contradiction
apparente entre l'œuvre du troisième jour (Genèse 1) et
l'information de Genèse 2 concernant le statut des plantes et de l'eau,
dans l'ordre de création. Cela priverait ainsi de tout fondement la
théorie selon laquelle les six jours de la création doivent
être interprétés autrement que comme une séquence
chronologique.
Nous devons tout d'abord noter que dans le contexte des premiers chapitres de la Genèse elle-même, rien n'indique que deux histoires différentes de la création ont été grossièrement accolées (l'une dans le premier chapitre, et l'autre dans le second), en négligeant diverses incompatibilités, de telle façon qu'il faudrait (avec les libéraux) reconnaître deux sources contradictoires de documentation (“ P ” et “ J ”), ou considérer (avec beaucoup d'évangéliques) le premier chapitre comme un agencement littéraire et non comme une vraie séquence chronologique. Or le professeur Umberto Cassuto, très sagement, nous rappelle “ que nous sommes accoutumés aux schémas de pensée hellénistes alors que nous devons garder en tête le mode de penser sémitique ”.[37]
Cassuto applique à la technique hébraïque d'écriture de l'histoire le principe suivant : “ d'abord la déclaration de portée générale et ensuite les détails particuliers ”.[38] Les divergences apparentes entre les deux récits de Genèse 1 et 2 disparaissent si on réalise que : “Selon la méthode hébraïque courante, un exposé général - Genèse 1 - est suivi (en Genèse 2:4ss) d'une description détaillée. ”[39] Ce qui veut dire que seul le chapitre 1 constitue une cosmogonie, tandis que Genèse 2:4ss isole certains détails, plus intéressants pour l'histoire de l'humanité et l'irruption du mal, avant de s'étendre sur leur signification.
“ Lorsque nous lisons la Torah, telle quelle, comme un exposé continu, nous ne trouvons aucune contradiction entre la première déclaration, selon laquelle le monde a d'abord été une masse d'eau, et ce qui nous est dit à propos de la terre sèche, au début de la présente section. Partant du récit des premiers stades de la création en Genèse 1, notre section ne récapitule pas toute l'histoire mais décrit simplement l'état de la terre au dernier stade de la création, lorsque seul l'homme était absent. Le manque d'harmonie ne se présente que si nous séparons les passages unis et si nous traitons notre section comme une narration indépendante; alors, naturellement, nous aurons besoin d'y trouver le commencement de l'histoire de la création. La contradiction apparaît alors, mais seulement quand nous regardons comme une preuve ce que la contradiction est supposée prouver; c'est là un exemple clair d'a priori! La thèse des deux récits, sans unité, ne nous aide pas à résoudre le problème inhérent au texte, mais provoque au contraire l'apparition d'un nouveau problème. ”[40]
Contrairement au mode de pensée grec qui invente des problèmes en supposant l'existence de deux récits contradictoires, Cassuto montre que le “ second récit ” n'a rien d'une nouvelle cosmogonie. Ce verset de Genèse 2:4 n'est pas, comme nous l'avons vu avec E. J. Young, une signature qui clôt Genèse 1, mais un en-tête, un curseur qui signale une section ayant une logique différente. Comme le dit Cassuto, Genèse 2:4 est “ une brève esquisse de l'ensemble (...). Un récit de la formation de l'une des créatures du monde matériel, alors que le “ second récit ”, long, détaillé, met en scène la création de l'être central du monde moral (...). Cette répétition est en accord avec le principe stylistique qui présente en premier la proposition générale et ensuite l'élaboration détaillée; ce principe se trouve communément dans la Bible, mais aussi dans les textes littéraires de l'ancien Orient ”.[41] Cassuto cite à cette occasion The Midrash of R. Eliezer b. R. Jose the Galilean, édition d'Enelow, p.24 (cf. Rashi en ii 8) : “ Celui qui écoute peut penser que c'est une autre narration, alors qu'il s'agit simplement de développer ce qui précède. ”[42]
En gardant à l'esprit cette façon de comprendre Genèse 2:4ss, l'affirmation de Genèse 2:5 : “ Il n'y avait encore sur la terre, dans les champs, aucun arbuste; aucune herbe des champs n'y germait encore. En effet, l'Éternel Dieu n'avait pas fait pleuvoir sur la terre, et il n'y avait pas d'homme pour cultiver le sol (...) ” (Synodale) est en parfaite harmonie avec la lecture chronologique des six jours de la création selon Genèse 1. Il n'y a pas d'autre explication de la semaine de création. Au lieu de cela, ce verset focalise l'attention sur un aspect de l'ordre déjà créé, et en expose les détails. En ce qui concerne la première proposition du verset 5 (“ il n'y avait pas encore sur la terre, dans les champs, aucun arbuste, aucune herbe des champs n'y germait encore ”), Cassuto donne l'explication suivante :
“ La narration commence par une description des conditions antérieures à la création de l'homme. Il n'y avait pas de siah des champs et d'esebh des champs, qui n'ont pas encore germé, le mot hébraïque terem signifie pas encore... ”
Que signifient le siah des champs et l'esebh des champs mentionnés dans ce verset 5? Les commentateurs modernes considèrent couramment ces termes comme une description du règne végétal dans son ensemble, de ce fait, il s'ensuit que cette section contredit le chapitre précédent, selon lequel la végétation est apparue le troisième jour. Toute interprétation de cette sorte introduit quelque chose dans le texte qui n'y figure pas, ce qui provoque la contradiction. Ce verset dit que ces espèces manquaient, cela signifie simplement que ces espèces n'étaient pas encore présentes, mais que d'autres étaient là. Si nous voulons comprendre la signification de siah des champs et d'esebh des champs, dans le contexte de ce verset, nous devons jeter un coup d'œil à la fin de cette narration. Là il est dit, dans les paroles adressées par l'Éternel Dieu à Adam, après qu'il eut péché : “ la terre produira pour toi des épines et des chardons, tu te nourriras de l'herbe des champs ” (Genèse 3:18). Les mots esebh des champs rejoignent exactement l'expression de notre verset 5; tandis que les mots épines et chardons, synonymes de siah des champs, sont une particularisation du concept général, transmis auparavant (cf. un des sihim en Genèse 21:15). Ces espèces n'existaient pas ou ne se trouvaient pas sous la forme que nous connaissons, elles ne poussent qu'après la transgression de la loi de Dieu par Adam, et c'est là une conséquence de sa chute, si elles apparurent dans le monde ou bien reçurent leur forme présente. Adam, qui ne pouvait plus jouir des fruits du jardin d'Eden, fut contraint de cultiver la terre (Genèse 3:23 - la même phrase que dans ce verset 5) de façon à manger du pain ; et la proposition citée ci-dessus, “ et tu mangeras l'esebh des champs ” (3:18), correspond aux mots qui suivent immédiatement après : “ à la sueur de ton front tu mangeras ton pain ” (3:19). Ainsi l'expression esebh des champs correspond au blé et à l'orge et aux autres espèces de céréales avec lesquelles on fabrique du pain; et il est évident que les champs de blé et d'orge n'existaient pas sur la terre jusqu'à ce que l'homme commence à la cultiver. Dans les espaces sauvages, la terre produisit d'elle-même, comme punition de l'homme, des ronces et des chardons - cette siah des champs que nous voyons pousser aujourd'hui sur la terre d'Israël, après la pluie. Là, se trouvent les deux raisons données dans notre verset pour l'absence de ronces et de céréales selon le même ordre que les deux précédentes propositions qui sont là pour expliquer : ni ronces ni graines des champs n'étaient encore sur la terre, parce que l'Éternel Dieu n'avait pas fait pleuvoir sur la terre ; et les graines des champs n'avaient pas encore germé, parce qu'il n'y avait pas d'homme pour cultiver la terre.
L'Écriture souligne à diverses reprises que le troisième jour, Dieu dit : “ Que la terre produise de la verdure, de l'herbe portant semence, des arbres donnant du fruit selon son espèce et ayant en eux leur semence (...). La terre produisit (...). Dieu vit que cela était bon (...). ” Ces plantes qui avaient besoin de quelque chose d'autre, en plus de la semence, étaient exclues : à cette catégorie appartenaient toutes les espèces de céréales, qui, même sous forme de spécimens isolés, avaient pu exister ça et là depuis le commencement, mais qui ne se trouvaient que sous forme de graines, jusqu'à ce que l'homme commence à cultiver le sol; et d'un autre côté, les ronces et les chardons, ou siah des champs, dont les semences étaient incapables de se propager et de donner des pousses vertes jusqu'à ce qu'il pleuve. Après la Chute et l'expulsion d'Adam du jardin d'Eden, lorsqu'il fut contraint de cultiver la terre et que la pluie commença à tomber, les ronces et les chardons se répandirent sur la terre avec les céréales - le siah des champs et l'esebh des champs.[43]
Henri Blocher, dans son livre Révélation des origines, abandonne, à la suite de Kline, la lecture chronologique de Genèse 1, en faveur de la “ théorie du cadre ” (Framework Hypothesis) qu'il considère comme la meilleure manière d'expliquer Genèse 2:5.
Est-ce qu'Augustin défendait une forme d'hypothèse du cadre
?
Même une lecture superficielle de l'œuvre de Saint Augustin sur
les six jours de la création révèle une compréhension
du mot “ jour ” différente de celle de son mentor
Saint Ambroise de Milan, qui considère le jour de création comme
une simple période de vingt-quatre heures.[44]
Au vu de sa position, certains ont suggéré qu'Augustin doive
être rangé dans la catégorie des partisans de la “ théorie
du cadre ”.[45] Il est évident
cependant que ses propos ne semblent pas du tout justifier son inclusion dans
l'école des concordistes,[46]
dont la théorie du cadre est une variante plus sophistiquée.
Dans La génèse au sens littéral en douze livres, (De Genesi ad litteram libri duodecim) Augustin se préoccupe en particulier des difficultés liées à la traduction dans les faits de la phrase “ Que la lumière soit ” et à la succession des jours et des nuits.[47] Il semble surtout vouloir donner un sens à deux faits à première vue contradictoires : tout d'abord, quand Dieu parle et que la réalité physique vient à exister, elle semble apparaître en une fraction de seconde, alors que, selon la Genèse, cela se passe en six jours pour l'ensemble de l'œuvre de création.
Il propose comme solution possible la signification symbolique du six, “ nombre parfait ” (parfait parce qu'il est la somme de 1+2+3 = 6). Cela signifierait que les six jours de création expriment la perfection de Dieu, de façon à ce que ses créatures, les anges en particulier, puissent la contempler. Dans le Livre IV, il écrit :
“ L'explication la plus probable est celle-ci : les sept jours de notre temps, comme les sept jours de la création, nommés et comptés, se suivent les uns les autres et marquent la division du temps, mais ces six premiers jours arrivent sous une forme qui ne nous est pas familière. A partir de là, le soir et le matin, comme la lumière et les ténèbres, c'est-à-dire le jour et la nuit, n'ont pas produit le même changement que le mouvement du soleil tel que nous le perçevons. Nous sommes donc forcés d'admettre qu'il en est bien ainsi, en ce qui concerne les trois premiers jours, qui sont décrits et numérotés, avant la création des corps célestes. ”[48]
La thèse d'Augustin semble être que tout a été créé en un jour (ou même en une fraction de seconde) : “ Et de cette façon nous devons nous représenter le monde, au moment où Dieu créa toutes choses ensemble, lorsque le premier jour fut créé ”,[49] et : “ Ainsi, dans tous les jours de création, il y a un seul jour, qui ne doit pas être compris dans le même sens que notre mot jour... ”[50] Mais en même temps, il maintient fermement la sextuple répétition d'un jour de création :
“ Dans ce récit de la création, l'Écriture Sainte nous dit que le Créateur acheva son œuvre en six jours, et ailleurs, sans contradiction, que le Créateur a créé toutes choses ensemble. Il s'ensuit donc qu'il créa toutes choses ensemble, et que simultanément il créa les six jours, ou sept, ou plutôt un seul jour répété six ou sept fois. ”[51]
Ce qui amène Augustin à une position plus surprenante que ses spéculations sur la signification des parties aliquotes : 1+2+3 = 6 du nombre six. Il suggère alors que le sens premier de l'apparition de la lumière et la création de tout en un seul jour, avec sa sextuple répétition dans l'univers physique au cours des jours suivants, se rapporte à la connaissance que les anges ont de l'œuvre parfaite de Dieu.[52]
La position très complexe d'Augustin semble résumée avec une grande justesse par John H. Taylor :
“ Pour Augustin, les jours de création ne sont pas des périodes de temps, mais plutôt des catégories, dans lesquelles les créatures sont classées pour des raisons didactiques, afin de décrire toutes les œuvres de création qui, en réalité, furent créées simultanément. La lumière du premier jour n'est pas la lumière visible dans le monde, mais l'illumination de créatures intellectuelles (les anges). Le matin est en rapport avec la connaissance qu'ont les anges des créatures qu'ils contemplent dans la vision de Dieu; le soir est en rapport avec la connaissance qu'ont les anges des créatures, telles qu'elles existent, avec leur appartenance particulière au créé. ”[53]
Donc, quoi qu'Augustin ait pu dire sur la signification du mot “ jour ”, il ne l'a pas envisagé comme (et Taylord nous le rappelle ci-dessus) une longue période de temps (ce qui en revanche est essentiel pour la “ théorie du cadre ”). En fait, dans La Cité de Dieu, il dit clairement ce qu'il entend par durée du monde depuis Adam jusqu'au Déluge, durée qu'il fixe à 2 262 années.[54]
Ce qui préoccupe réellement Augustin est moins la durée de la création que d'opérer le rapprochement de deux conceptions très différentes de la réalité : d'un côté, le concept néo-platonicien d'intelligences pures (par exemple, les anges) qui contemplent les essences absolues ou les formes (c'est-à-dire telles qu'elles se manifestent dans les choses apparues durant les six jours), et d'un autre côté le concept hébraïque de la création divine soudaine mais maîtrisée des diverses “ espèces ” à partir de rien. Son approche particulière des six jours résulte évidemment d'une tentative de synthèse entre ces deux philosophies disparates, dans une formulation fidèle selon lui “ à la lettre ” aux enseignements de Genèse 1-2. Il serait donc anachronique de lui imputer une réinterprétation délibérée du mot “ jour ” transformé en de longues périodes de temps, pour justifier un lent développement des espèces. Son but est surtout d'abréger la durée du temps réel de création (en un jour ou même en un instant), et non de l'étendre à de longues périodes de temps.[55]
Le Nouveau Testament présuppose la chronologie et la vérité
historique des chapitres 1 et 2 de la Genèse
Ceux qui acceptent l'autorité du Nouveau Testament accordent aux citations
de Genèse 1-11 données dans ses trente-sept livres une extrême
importance pour une juste compréhension du texte fondamental. Une étude
attentive des allusions du Nouveau Testament aux onze premiers chapitres de
l'Écriture Sainte montre qu'il n'y a pas la moindre trace de la “ théorie
du cadre ” dans les écrits apostoliques. Tous d'un commun
accord soutiennent clairement, au contraire, la parfaite vérité
de l'histoire chronologique de ces premiers récits, c'est-à-dire
une lecture littérale, plutôt que littéraire.
Hubert Thomas a rassemblé une grande quantité de témoignages pertinents dans son petit livre Mentions de la création (Genèse 1-11) dans le Nouveau Testament.[56] L'introduction dit ceci :
“ Trois points principaux ressortent en effet de la liste que nous présentons. Ces trois points confirment que le Nouveau Testament ne peut en aucun cas être cité à l'appui d'une théorie évolutionniste. Premièrement (et sans exception), les références à la création et tout particulièrement les citations de Genèse 1 à 11 concernent des événements historiques. Tous se situent sur le même plan que la mort historique du Seigneur Jésus-Christ à Golgotha. Dans la mesure où le Nouveau Testament se rapporte à la création ex nihilo et à la création d'Adam et Ève, à la naissance de Caïn et Abel et au Déluge, il n'y a aucune légende et aucune parabole; il s'agit toujours de personnes et d'événements ayant une signification historique et universelle.
Deuxièmement (et sans aucune exception), la création est toujours mentionnée comme un événement unique qui advint à un moment particulier du passé. La création a eu lieu; elle a été achevée. Des événements se produisirent qui ont corrompu le monde, et maintenant une nouvelle création est attendue, qui prendra place dans l'avenir en un moment bien précis.
Troisièmement, les détails de la création donnés
dans les chapitres 1 à 3 du livre de la Genèse sont littéralement
vrais, historiques et d'une importance primordiale. La doctrine du Nouveau
Testament est fondée sur ces citations, mais elle ne serait pas valide
et serait même erronée, si ces événements primordiaux
n'étaient pas historiquement vrais. Considérons par exemple
l'entrée du péché dans le monde. Si Adam n'était
pas la tête fédérale de tout le genre humain, alors
le Christ Jésus (le dernier Adam) n'est pas la tête fédérale
de la nouvelle création. ”
Hubert Thomas classe les références du Nouveau Testament à Genèse 1-11 en six catégories :
Le Créateur et la création du monde
Matthieu 13:35 : “ Je publierai des choses cachées depuis la fondation du monde. ”
Marc 13:19 : “ Car la détresse en ces jours, sera telle qu'il n'y en a point eu de semblable depuis le commencement du monde que Dieu a créé jusqu'à présent, et qu'il n'y en aura jamais. ”
Jean 1:3 : “ Toutes choses ont été faites par elle (la Parole), et rien de ce qui a été fait n'a été fait sans elle. ”
Actes 4:24 : “ ... Seigneur, toi qui a fait le ciel, la terre, la mer, et tout ce qui s'y trouve. ”
Actes 14:15 : “ ... nous vous exhortons à renoncer à ces choses vaines, pour vous tourner vers le Dieu vivant, qui a fait le ciel, la terre, la mer, et tout ce qui s'y trouve. ”
Romains 1:20 : “ En effet, les perfections invisibles de Dieu, sa puissance éternelle et sa divinité, se voient comme à l'œil nu, depuis la création du monde, quand on les considèrent dans ses ouvrages. Ils sont donc inexcusables... ”
2 Corinthiens 4:6 : “ Car Dieu, qui a dit : ‘La lumière brillera du sein des ténèbres!' a fait briller la lumière dans nos cœurs pour faire resplendir la connaissance de la gloire de Dieu sur la face de Christ. ”
Colossiens 1:16 : “ Car en lui ont été créées toutes les choses qui sont dans les cieux et sur la terre, les visibles et les invisibles, trônes, dignités, dominations, autorités; tout a été créé par lui et pour lui. ”
Hébreux 1:10 : “ Toi, Seigneur, tu as au commencement fondé la terre, et les cieux sont l'ouvrage de tes mains. ”
Hébreux 11:3 : “ C'est par la foi que nous reconnaissons que l'univers a été formé par la Parole de Dieu, en sorte que ce qu'on voit n'a pas été fait de choses visibles. ”
2. La création de l'homme et de la femme
Matthieu 19:4-6 : “ Il répondit : N'avez-vous pas lu que le Créateur, au commencement, fit l'homme et la femme... ”
Marc 10:6 : idem.
Matthieu 19:8: “ Il leur dit : C'est à cause de la dureté de votre cœur que Moïse vous a permis de répudier vos femmes; au commencement, il n'en était pas ainsi. ”
Actes 17:26 : “ Il a fait que toutes les nations humaines, issues d'un seul homme, habitent sur toute la face de la terre; il a déterminé les temps fixés pour eux et les bornes de leurs demeures. ”
1 Corinthiens 6:16 : “ Ne savez-vous pas que celui qui s'attache à la prostituée est un seul corps avec elle? Car, il est dit, les deux deviendront une seule chair. ”
1 Corinthiens 11:8-9 : “ En effet, l'homme n'a pas été tiré de la femme, mais la femme a été tirée de l'homme; et l'homme n'a pas été créé à cause de la femme, mais la femme à cause de l'homme. ”
Éphésiens 5:31 : “ C'est pourquoi l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, et les deux deviendront une seule chair. ”
1 Timothée 2:13-14 : “ Car Adam a été formé le premier, Ève ensuite; et ce n'est pas Adam qui a été séduit, c'est la femme qui, séduite, s'est rendue coupable de transgression. ”
Apocalypse 2:7 : “ Que celui qui a des oreilles écoute ce que l'Esprit dit aux Églises : au vainqueur je donnerai à manger de l'arbre de vie qui est dans le paradis de Dieu. ”
Apocalypse 22:2 et 14 : “ ... se trouve l'arbre de vie... ”
3. La Chute
Romains 5:12 : “ C'est pourquoi, de même que par un seul homme le péché est entré dans le monde, et par le péché la mort, et qu'ainsi la mort a passé sur tous les hommes, parce que tous ont péché... ”
Romains 5:14 : “ Cependant, la mort a régné depuis Adam jusqu'à Moïse, même sur ceux qui n'avaient pas péché par une transgression semblable à celle d'Adam, lequel est une figure de celui qui devait venir. ”
Romains 5:17 : “ Si par la faute d'un seul, la mort a régné par lui seul, à bien plus forte raison ceux qui reçoivent l'abondance de la grâce et du don de la justice règneront-ils dans la vie par le seul Jésus-Christ. ”
Romains 8:19-20 : “ Aussi la création attend-elle avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise à la vanité - non de son gré, mais à cause de celui qui l'y a soumise - avec l'espérance qu'elle aussi sera libérée de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté glorieuse des enfants de Dieu. ”
1 Corinthiens 15:21-22 : “ Car, puisque la mort est venue par un seul homme, c'est aussi par un homme qu'est venue la résurrection des morts. Et comme tous meurent en Adam, de même tous revivront en Christ. ”
2 Corinthiens 11:3 : “ Toutefois, de même que les serpent séduisit Ève par sa ruse, je crains que vos pensées ne se corrompent et ne s'écartent de la simplicité et de la pureté qui est en Christ. ”
Apocalypse 20:2 : “ ... le serpent ancien, qui est le diable et Satan... ”
4. Les patriarches
Matthieu 23:35 : “ ... afin que retombe sur vous tout le sang innocent répandu sur la terre, depuis le sang d'Abel le juste jusqu'au sang de Zacharie, fils de Bérékia, que vous avez tué entre le temple et l'autel. ” (Et Luc 11:52).
Luc 3:34-38 : “ ... fils de Jacob, fils d'Isaac, fils d'Abraham, fils de Térah, fils de Nahor, fils de Seroug, fils de Rehou, fils de Péleg, fils d'Héber, fils de Chilah, fils de Caïnam, fils d'Arphaxad, fils de Sem, fils de Noè, fils de Lémek, fils de Mathusalem, fils d'Hénoc, fils de Yered, fils de Maléléel, fils de Cenam, fils d'Énosh, fils de Seth, fils d'Adam, fils de Dieu. ”
Hébreux 11:4-7 : “ C'est par la foi qu'Abel offrit à Dieu un sacrifice de plus grande valeur que celui de Caïn; par elle il fut déclaré juste, Dieu lui-même rendant témoignage à ses offrandes; et par elles, quoique mort, il parle encore... C'est par la foi que Noé, divinement averti de ce qu'on ne voyait pas encore et saisi d'une pieuse crainte, construisit une arche pour sauver sa famille, c'est par elle qu'il condamna le monde et devint héritier de la justice qui s'obtient par la foi... C'est par la foi qu'Abraham obéit à l'appel de Dieu. ”
Hébreux 11:23 : “ C'est par la foi que Moïse, à sa naissance fut caché pendant trois mois par ses parents, car ils virent que l'enfant était beau et ne craignirent pas l'édit du roi. ”
Hébreux 12:24 : “ ... de Jésus le médiateur d'une nouvelle Alliance; et du sang de l'aspersion qui parle mieux que celui d'Abel. ”
1 Jean 3:12 : “ Ne faisons pas comme Caïn, qui était du Malin et qui égorgea son frère... ”
Jude 11 : “ Malheur à eux! Car ils ont suivi la voie de Caïn; c'est dans l'égarement de Balaam que, pour un salaire, ils se sont jetés; et c'est par la révolte de Koré qu'ils ont péri! ”
Jude 14 : “ C'est aussi pour eux qu'Hénoc, le septième patriarche depuis Adam, a prophétisé en ces termes : ‘Voici que le Seigneur est venu avec ses saintes myriades...' ”
5. Le Déluge
Matthieu 24:37 : “ Comme aux jours de Noé ainsi en sera-t-il à l'avènement du Fils de l'homme. ”
Luc 17:26 : “ Ce qui arriva aux jours de Noé arrivera de même aux jours du fils de l'homme... ”
1 Pierre 3:20: “ ... qui avaient été rebelles autrefois, lorsque la patience de Dieu se prolongeait, aux jours où Noé construisit l'arche dans laquelle un petit nombre de personnes, c'est à dire huit, furent sauvées à travers l'eau. ”
2 Pierre 3:5 : “ En effet, ils oublient volontairement qu'il y eut, autrefois, des cieux et une terre qui, par la Parole de Dieu, surgit du milieu de l'eau et formée par l'eau... ”
2 Pierre 2:5 : “ S'il n'a pas épargné le monde ancien, mais s'il a préservé huit personnes, dont Noé, prédicateur de la justice, lorsqu'il fit venir le déluge sur un monde d'impies (...) ”
6. Les allusions à la création
Éphésiens 3:9 : “ ... et de mettre en lumière la dispensation du mystère caché de toute éternité en Dieu, le Créateur de toutes choses. ”
Jacques 3:9 : “ Par elle, nous bénissons le Seigneur notre Père, et par elle, nous maudissons les hommes faits à l'image de Dieu. ”
Apocalypse 3:14 : “ ... Voici ce que dit l'Amen, le témoin fidèle et véritable, l'auteur de la création de Dieu. ”
Apocalypse 4:11 : “ Tu es digne, notre Seigneur et notre Dieu, de recevoir la gloire, l'honneur et la puissance, car tu as créé toutes choses, et c'est par ta volonté qu'elles existent et qu'elles furent créées. ”
Apocalypse 10:6 : “ Puis il jura par celui qui vit aux siècles des siècles, qui a créé le ciel et la terre et ce qui s'y trouve, la mer et ce qui s'y trouve, il jura qu'il n'y aurait plus de délai. ”
Apocalypse 14:7 : “ Il disait d'une voix forte : ‘Craignez Dieu et donnez-lui gloire, car l'heure de son jugement est venue; prosternez-vous devant celui qui a fait le ciel, la terre, la mer et les sources d'eaux!' ”
Romains 1:25 : “ ... eux qui ont remplacé la vérité de Dieu par le mensonge et qui ont adoré et servi la créature au lieu du Créateur, qui est béni éternellement. Amen ! ”
Romains 16:25 : “ A celui qui a le pouvoir de vous affermir selon mon Évangile et la prédication de Jésus-Christ, conformément à la révélation du mystère tenu secret dès l'origine des temps. ”
1 Timothée 4:4 : “ Or, tout ce que Dieu a créé est bon, et rien n'est à rejeter, pourvu qu'on le prenne avec actions de grâces. ”
Hébreux 4:10 : “ Car celui qui entre dans le repos de Dieu se repose aussi de ses œuvres, comme Dieu s'est reposé des siennes. ”
Hébreux 9:26 : “ ... car alors, le Christ aurait dû souffrir plusieurs fois depuis la fondation du monde. Mais maintenant, à la fin des siècles, il a paru une seule fois pour abolir le péché par son sacrifice. ”
Rien dans aucun de ces versets, ni dans le contexte plus large où ils s'intègrent, ne désigne autre chose que le sens littéral et chronologique des six jours de la création et de l'histoire des patriarches. La position anti-littérale et le climat “ littéraire ” et délétère de la théorie du cadre ne reçoivent pas le moindre appui dans le Nouveau Testament. Nulle exégèse sérieuse de Genèse 1 et 2, dans le texte hébraïque, ne la révèle. Cette théorie du cadre ne peut venir que d'une vision du monde étrangère à celle de la Bible. Notre prochain chapitre en donnera les véritables origines.
[1] - Cet article est le sixième chapitre du livre La doctrine biblique de la Création. Éditions La Lumière/Christian Focus Publications 2011 Villefranche dAlbigeois France 268 p.. Cité avec permission. Ce livre est en vente chez Lulu. Douglas Kelly est professeur de théologie systématique à la Faculté Réformée de Charlotte en Caroline du Nord aux États-Unis et il a étudié en France, en Ecosse et en Amérique.
[2] 1 L'exception apparente de cet usage universel, soulignée par Hugh Ross dans Creation and Time (NavPress, Colorado Springs, Col., 1994), 47, dans Osée 6:2 : " Il nous rendra la vie dans deux jours, le troisième jour il nous relèvera " n'est pas une claire exception. Puisque ce que dit la prophétie n'est pas absolument certain (s'agit-il dune promesse de restauration d'Israël sur la terre? Ou bien de la résurrection de Christ et ainsi de son peuple en lui?), nous ne sommes pas en position de réfuter la séquence de trois jours normaux. Au moins, une telle référence est trop faible pour déstabiliser l'usage universel dans l'Écriture du caractère ordinal indiquant qu'il s'agit de jours solaires.
[3] Henry M. Morris, The Genesis Record, 55, 56.
[4] Le docteur Gleason Archer, éminent
connaisseur évangélique de l'Ancien Testament, a argumenté
contre les implications évidentes de ce passage d'un jour de vingt-quatre
heures de la façon suivante : " En aucune manière cela
ne démontre qu'un intervalle de vingt-quatre heures fut impliqué
dans les six premiers " jours ", pas plus que les huit jours de
célébration de la fête des Tabernacles ne prouve que le
séjour dans le désert avec Moïse ne dura que huit jours.
" (Dans " A Response to the Trustworthiness of Scripture in Areas
Relating to Natural Science ", Hermeneutics, Inerrancy, and Bible,
éd. Earl D. Radmacher et Robert D. Preus (Academic Books, Grand Rapids,
Michigan, 1986), 329.
Avec tout le respect dû, nous devons répondre. Sa comparaison analogique entre l'observance de la semaine de Sabbat et l'observance annuelle de la fête des Tabernacles ne prouve pas que le modèle de la semaine que l'humanité doit suivre n'implique aucune relation directe avec la semaine de création. De même, le Pentateuque qui affirme clairement que les huit jours de la fête des Tabernacles a pour but de rappeler les quarante années de séjour au désert, ce qui met clairement en évidence que la semaine de six jours de travail suivis par un jour de repos est un parallèle exact de l'activité divine durant la semaine de création. C'est une procédure illogique de vider les sept jours de la création de leur signification temporelle, parce que la fête de Tabernacles durait huit jours chaque année plutôt que quarante années chaque année! Cette sorte d'argument contre le mot yom signifiant 24 heures, pour un excellent bibliste semble bien indiquer la faiblesse exégétique dArcher, contre les jours de création, pour insinuer qu'ils ne sont pas des jours solaires. Tout cela n'est pas loin des catégories de désespoir exégétique.
[5] Morris, op. cit., 56.
[6] Ross, op. cit., 49.
[7] Ibid.
[8] Un résumé sur Arie Noordzij, God's Word en der Eeuwen Getuigenis dE. J. Young, The Days of Genesis, dans Westminster Theological Journal, vol. XXV, n°1 (novembre 1962), 3-5.
[9] Meredith Kline, Commentary on Genesis in The New Bible Commentary Revised, édité par D. Guthrie et al. (Wm. B. Eerdmans Publishing Co., Grand Rapids, Michigan, 1971), 81, 82.
[10] Henri Blocher, Révélation des origines (Presses Bibliques Universitaires, Lausanne, 1979 et 1988). Traduction anglaise : In the Beginning (InterVarsity Press, Downers Grove, Illinois, 1984).
[11] Blocher, op. cit., 43.
[12] Meredith Kline, "Because It Had Not Rained" in The Westminster Theological Journal, vol. XIX, 164.
[13] Des détails précis et l'évaluation de cette " preuve " en faveur dune lecture non-chronologique des six jours de la création se trouvent dans les Notes techniques et bibliographiques à la fin de cet article.
[14] Le naturalisme est une doctrine philosophique selon laquelle rien n'existe en dehors de la nature, et qui exclut le surnaturel. La nature remplace Dieu.
[15] Dans le périodique Positions Créationnistes, n°12, mai 1990, publié par le Comité de l'Association Création Bible et Science.
[16] Ibid., 5ss.
[17] Ibid., 5, 6.
[18] Ibid., 7,8.
[19] James B. Jordan, Through New Eyes: Developing a Biblical View of the World (Wolgemuth & Hyatt Brentwood, TN, 1988), 11.
[20] Berthoud, Ibid., 7.
[21] Paul Vignaux, " Nominalisme ", Dictionnaire de théologie catholique, Tome 13, Première partie, A. Vacant et al., éditeurs (Letourzey et Ane, Paris, 1936), 743.
[22] Ibid., 747.
[23] Ibid.
[24] Thomas F. Torrance a suggéré que le nominalisme gagne de l'influence quand la culture présente une relation détériorée entre l'existence et le langage. Dans sa discussion de l'usage réaliste du langage symbolique, dans les systèmes scientifiques, Torrance dit que : " Tout va mal, si le langage formel ne prouve pas qu'il est un système approprié de représentation, ou si la relation entre les symboles que nous employons et les réalités qu'ils représentent est détériorée, car alors les systèmes symboliques brisent les liens du contrôle objectif de la réalité et placent dessus seulement une signification ambiguë qui induit en erreur." (Reality and Evangelical Theology, 62). Le nominalisme se focalise alors sur la forme des mots (qui sont là pour représenter seulement les phénomènes individuels, et non pas les réalités universelles) dont la référence à la réalité, au dessus d'eux, ne peut être qu'indirecte. Mais avec le réalisme, les signes ou les mots remplissent proprement leur fonction sémantique lorsque nous attendons d'eux les réalités qu'ils signifient. Par leur corrélation avec ces réalités, ils cessent d'être l'objet d'attention en eux-mêmes, mais ils servent comme média transparents, au travers desquels ces réalités apparaissent (Ibid., 96).
[25] Dans le périodique Positions Créationnistes, n° 11, février 1990.
[26] Thomas F. Torrance, Theological Science (Oxford University Press, Londres, 1969), 142, 143.
[27] Kline, op. cit., 82.
[28] Ross, op. cit., 71, 72.
[29] Blocher, op. cit., 17, 18.
[30] Les évangéliques qui défendent la " théorie du cadre " ne veulent jamais aller aussi loin que certains nominalistes qui déconnectent la signification d'un texte de sa réalité externe. Cela n'est pas leur intention, et dans ce sens ils ne sont certainement pas " nominalistes ". Mon seul souci est de suggérer que leur évacuation de la claire signification temporelle des six jours, inconsciemment, ouvre la porte, selon l'épistémologie et l'herméneutique modernes, à cette sorte d'abus, lorsqu'elle est poussée jusqu'au bout.
[31] Abraham Kuyper a consacré la seconde division de Principle of Sacred Theology au sujet des sciences endommagées par le péché, p. 56-219.
[32] Voici la traduction dAndré Chouraqui calquée sur le texte hébraïque : " Tout buisson du champ n'était pas encore en terre, toute herbe du champ n'avait pas encore germé : oui, IHVH Élohim n'avait pas fait pleuvoir sur la terre, et de glébeux, point, pour servir la glèbe. "
[33] Kline, art. cit., 147,149,151.
[34] N.d.t. : Il s'ensuit que Kline raisonne comme un géologue actualiste. Voir R. Hooykaas, Continuité et discontinuité en géologie et biologie, Seuil, 1970.
[35] Ibid.,151, 152.
[36] Ibid., 153, 154.
[37] Umberto Cassuto, A Commentary on the Book of Genesis: Part I. From Adam to Noah, Traduit par Isra‘l Abrahams (The Magnus Press, The Hebrew University, Jérusalem, 1961), 91.
[38] Ibid., 20.
[39] Ibid., 89.
[40] Ibid., 90.
[41] Ibid., 91.
[42] Ibid., 92.
[43] Ibid., 100, 101, 102.
[44] Ambroise, op. cit., 42, 43.
[45] Voir Hugh Ross, Creation and Time, 45.
[46] L'interprétation concordiste suppose que les jours de la Genèse représentent les longues ères dont parlent les géologues.
[47] Voir Livre I, chapitres 9-12; Livre IV, chapitres 14-35, et Livre V, chapitres 1-23 de The Literal Meaning of Genesis, John H. Taylor.
[48] Ibid., Livre IV, chapitres 18.
[49] Ibid., Livre V, chapitre 23.
[50] Ibid., Livre IV, chapitre 26.
[51] Ibid., Livre IV, chapitre 33.
[52] Voir en particulier les chapitres 22 à 35 du Livre IV, Ibid. pour ce qu'il entend par ce que les anges ont comme connaissance de la lumière et de la réalité créée selon un et six.
[53] Ibid., 9.
[54] Augustin, La Cité de Dieu, Livre 15, chapitre 20.
[55] Sans discuter ici les détails de cette question, nous devons noter que la tentative d'annexer Augustin dans les rangs des théistes évolutionnistes est aussi anachronique que la tentative de le mettre dans les rangs des protagonistes de la " théorie du cadre ". Certes, avec son arrière fond de néo-platonisme, Augustin essaye de combiner la théorie platonique des " causes séminales " (ou des formes rationnelles) avec les " espèces " créées de la Genèse. Cependant, en parlant de ces deux concepts, Augustin souligne l'idée biblique de création instantanée de semences (graines) de diverses espèces (ou causes séminales). Il ne donne pas l'impression de laisser la moindre place pour de longues périodes, nécessaires à un développement par évolution, à partir d'une espèce, ou de causes séminales vers une autre espèce. Il laisse le temps pour une croissance normale des plantes et des autres êtres vivants (ou causes séminales), d'après leur espèce. Il écrit dans La signification littérale de la Genèse, Livre IV, chapitre 33 : " Car dans sa sagesse, toutes choses ont été créées, et le mouvement que nous voyons maintenant dans ses créatures, mesuré par l'intervalle de temps dans lequel chacune remplit ses propres fonctions, en raison des causes implantées en elles, qui ont été distribuées par Dieu dans les semences au moment de la création, quand Il parle et la chose arrive. Il commande et elles sont créées. De ce fait, la création n'a pas eu lieu lentement, de telle façon qu'un lent développement puisse intervenir dans ces choses. Le temps opère le développement de ces créatures, selon les lois qui leur sont propres, mais il n'y eut pas de longs intervalles de temps, lorsqu'elles reçurent ces lois, lors de la création. " (Op. cit., 141, 142). Ce sujet est discuté avec soin dans le livre de Henry Woods, Augustin and Evolution: A Study in Saint's De Genesi ad litteram (New York, 1924).
[56] Hubert Thomas, Mentions de la création (Genèse 1-11) dans le Nouveau Testament (Association Création, Bible et Science, Lausanne, 1993).