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Samizdat

Ruminations hétéroclites sur le suicide, l'amertume, le divorce et la souffrance en milieu évangélique.

Épître de décembre, 1992





Paul Gosselin

NB: Le texte qui suit est un extrait d'une note envoyé à quelques ami(e)s en 1992



Je pensais vous écrire un petit mot pour vous donner des nouvelles de ma femme et moi pour l'année qui termine. Cet été, nous avons pu faire un voyage à Terre-Neuve. On a vu des glaciers, un site archéologique Viking et des "quelques" moustiques... Il n'y a pas trop longtemps j'ai terminé mes contrats à l'université. Curieusement, peu de temps après que je me suis mis sur le chômage (début oct.), mon ancien employeur m'a demandé de travailler encore pour lui un peu, car il lui restait quelques sous dans son budget de recherche. Je travaille donc, mais je ne travaille pas (je "mange" mon chômage...). Dans un certain sens, j'ai hâte que ça finisse quoique ce n'est pas mauvais de faire des sous (si seulement l'Université pouvait m'envoyer un chèque). C'est une situation un peu ambiguë.

Ah, mais il ne faut pas toujours se plaindre, car il y a toujours des gens ailleurs qui souffrent plus que nous. Cet été, j'ai perdu un ami chrétien de longue date. Il s'est suicidé. Pas très drôle, pas du tout, pas du tout. Même si j'étais un ami proche, je m'en suis pas douté du tout que ça allait si mal pour lui. D'autres se sont rendu compte qu'il pensait au suicide. Je savais, par contre, qu'il n'avait pas très bon moral depuis un bon moment, mais je ne me doutais pas qu'il pensait sérieusement à en finir. Les relations avec les filles, ça n'allait pas et il venait de perdre son travail et avait peu d'espoir d'en trouver d'autres. Il y avait beaucoup de destruction dans sa vie.

Depuis, je me rends compte que c'était un gars qui cherchait désespérément de l'amour, la famille qu'il n'avait jamais vraiment connue (sa famille biologique l'avait toujours méprisé). Il cherchait chez les autres (et les chrétiens surtout) cet amour pour panser ses blessures, mais il n'admettait pas vraiment qu'il fallût se tourner vers le Seigneur car les autres (humains), même chrétiens, ne sont que des blessés/blessants aussi. Il n'admettait pas vraiment que l'amour qu'il cherchait, seul le Seigneur pouvait le donner, car les autres ne peuvent pas toujours répondre à nos besoins les plus profonds. Ces moments-là sont durs, très durs, et pour continuer à suivre le Seigneur, on meurt un peu à nos espoirs et nos rêves sinon ces rêves/attentes peuvent littéralement nous tuer, car si on ne se méfie pas tout le sens de notre existence tourne autour de ces rêves/attentes. J'ai rencontré mon ami à deux reprises (une fois avec un autre chrétien) pour tenter de le dissuader de le faire, mais ça n'a pas marché. J'ai appris la nouvelle de son décès quelque temps plus tard, au cours de mes vacances. Je ne peux le juger, c'était mon ami. Je le confie au Seigneur. Ce que je sais c'est "Qu'Il essuiera toute larme..."

De manière générale, je trouve que ça devient de plus en plus dur de suivre le Seigneur. Je regarde ailleurs et je vois beaucoup de vieux couples évangéliques (10, 15 ans et + dans le Seigneur) de la génération née après la 2e guerre mondiale qui ont des difficultés dans leur mariage. Dans la majorité des cas, l'amertume les a isolés et éloigné de l'église, de Dieu et de l'un l'autre. Cela les mets dans une situation de vulnérabilité. La Parole nous dit:

Elle dit encore: "N'attristez pas le Saint-Esprit de Dieu, par lequel vous avez été scellés pour le jour de la rédemption. Que tout amertume, toute colère, toute calomnie, et toute espèce de méchanceté, disparaissent au milieu de vous. Soyez bons les uns envers les autres, compatissants, vous pardonnant réciproquement, comme Dieu vous a pardonné en Christ." (Eph. 4: 30-32)


L'amertume, c'est vraiment le SIDA des relations chrétiennes. Tranquillement ça bouffe toute notre énergie, ça nous vide et si en plus on la nourrit au lieu de la combattre ça peut détruire tout ce qu'on a de précieux. Le plus stupide là-dedans, c'est que l'amertume n'a pratiquement aucune influence sur la personne fautive, mais c'est celle qui la nourri qui en subit les pires conséquences; ulcères, tourments psychologiques, etc. Garder et nourrir l'amertume ça ne donne pas grand-chose. Mais plus on la nourrit, plus on devient légaliste et moins on a de miséricorde envers les autres. Moins on tolère ceux qui n'ont pas été illuminés comme nous. Évidemment, il y a toujours moyen de se venger de manière chrétienne et subtile, mais le Seigneur nous dit: "A moi la vengeance". Qu'on Lui laisse faire Sa justice. Ça implique vraiment marcher par la foi, parce que ce n'est pas toujours évident. Il nous faut vraiment espérer dans les choses invisibles dont nous parle la Parole, sinon c'est KO, GAME OVER.

En rapport à l'amertume, dans la vie d'individus, j'ai remarqué la progression suivante: d'abord, on vit un "mauvaise expérience" (ou plusieurs) soit avec des frères ou sœurs de l'assemblée ou encore carrément un conflit avec un pasteur. Les gens ne savent pas trop comment réagir, en général on essaie de garder le sourire et l'on y réussit peut-être, mais quelque chose dans le cœur meurt à la longue (surtout si les coups durs se répètent). Avec le temps qui passe, les gens se sentent de plus en plus aliénés de leur assemblée... et de la vie chrétienne aussi parfois. Après un bout de temps, les circonstances tragiques commencent à s'empiler, si l'amertume est nourrie l'on peut même finir par questionner l'idée d'un "Bon Dieu". On entendra alors des petites voix qui nous chuchotent "Maudis Dieu et meurt !". On laisse aller sa vie de prière et finalement on laisse aller les réunions et tranquillement le bateau commence à dériver... On se retrouve isolé des autres chrétiens et l'on a tendance à se tenir qu'avec d'autres chrétiens amers sinon avec des non-chrétiens. Je dis ça sans mépris, car j'ai eu à lutter moi-même avec certaines de ces choses et c'est très dur pour nos générations de chrétiens éduqués et critiques de vivre et de participer à la vie d'une assemblée et d'y être soumis dans une certaine mesure lorsqu'il se passe des "choses" qui ne devraient jamais arriver...

Chose certaine, ce n'est pas difficile de voir des fautes dans nos assemblées et chez nos dirigeants, mais il faut garder en tête froide que lorsqu'on est confronté avec les fautes des autres, il faut bien se demander si nous ferions tellement mieux si on était à leur place ?? Il se peut qu'on remplacerait leurs faiblesses avec nos forces, mais si on est honnête envers soi-même, on se rend compte qu'il se peut aussi que l'on remplacerait leurs forces par nos faiblesses. Très souvent, dans de tels cas, le "Grand Boss Céleste" se contente de frotter le nez de ses enfants (comme des petits chiots qui ne savent pas où aller...) dans leur propre merde jusqu'à ce qu'ils apprennent ce que veut dire le mot grâce. Dans mon cas c'est surtout l'histoire du serviteur impitoyable qui m'aide à garder une certaine perspective sur cette question.

Même avec leurs défauts, on a besoin de nos églises car c'est le lieu (imparfait) où Dieu verse sa grâce. On a besoin les uns les autres (avec toutes nos différences). On a besoin de nos pasteurs. Parfois il peut être nécessaire, dans des cas extrêmes, de changer d'église, j'en conviens, mais se passer d'église, NON. Les gens à la recherche de l'église "parfaite" se leurrent, ça n'existe pas ! On est tous en formation, on est tous des pécheurs sur lesquels le Seigneur est en train de travailler. Pasteurs, brebis, toute la "gang".

Il faut aussi se rendre compte que l'on a bien plus besoin de l'Eglise que l'on pense parfois. À bien des égards, sur le plan culturel, l'église évangélique ne m'attire pas, mais le Seigneur qui règne me demande d'y participer, même si ça implique mourir à certaines choses sur un plan temporaire (j'espère du moins). Je lui confie la réalisation de certains de mes espoirs et rêves. Je ne renonce pas à mon identité, à mes rêves, mais je laisse le Seigneur régler ça à sa manière. Oh ne vous inquiétez pas, je ne suis pas un extraterrestre! J'ai toujours des luttes, moi aussi, mais je sais que si je ne m'appuie pas sur sa grâce, je deviendrais facilement et rapidement un vieux "schnouque" cynique et amer. Il n'y a pas d'autres alternatives... Ça ne m'intéresse pas trop de finir comme ça. Faut dire aussi que garder son sens d'humour ça aide. J'ai remarqué que chez les ami(e)s qui semblent perdre la bataille avec l'amertume on ne rit plus. La joie disparaît... Ce n'est pas drôle (dans bien des sens).


L'amertume et le divorce
Comme je disais plus haut, notre génération est beaucoup confrontée par l'amertume. Dans des cas d'amis que je connais, l'amertume détruit d'abord la relation avec l'assemblée et avec le Seigneur et ensuite le diable est libre de les attaquer dans leur vie de couple. Depuis quelque temps maintenant, lorsque quelqu'un est sur le point de me parler de vieux couples chrétiens je veux quasiment me boucher les oreilles car trop souvent ce ne sont que de mauvaises nouvelles. Il y a une espèce de plaie de divorces qui se promène dans nos églises en ce moment et il semble que ce sont les chrétiens marginaux qui sont les plus visés. Par "marginaux" j'entends ceux qui pour une raison ou une autre ne participent pas activement dans une assemblée. Peu importe si on est marginal ou non, veillez sur vos mariages, ne les prenez pas pour du "cash", pour acquis. Mettez-les en ordre. Demandez la sagesse du Seigneur, car le diable joue dur ces temps-ci. Veillez surtout sur votre relation avec le Seigneur car c'est la source de la vie. Si vous laissez aller votre relation personnelle avec le Seigneur, vous serez désarmés lorsque les tentations et les attaques viendront. Vous lui aurez laissé la porte grande ouverte vous mêmes...

Je me rends compte aussi d'une chose, c'est que nous sommes mal préparés à tous ces coups durs qui arrivent depuis un bout de temps. On s'est gavé pendant tellement longtemps dans nos milieux évangéliques de l'idée bien nord-américaine que la vie chrétienne c'est une pluie de bénédictions sans arrêt et qu'il suffit d'un peu de volonté (foi) pour avoir ce que l'on veut. Si ça va mal, c'est qu'on n'a pas assez de volonté (foi). Évidemment dans les prêches que l'on entend sur ce sujet, on parle toujours de foi, mais si on y regarde de plus près on se rend compte que ce concept de foi n'est pas vraiment biblique et que ça s'inspire beaucoup plus de la pensée positive que de la Parole. Ce que l'on nous propose ressemble beaucoup plus à une recette pour avoir ce que l'on veut dans la vie. Dans la Parole, la foi est liée à une relation avec une PERSONNE. Une personne que l'on apprend à connaître et en qui l'on vient à faire confiance. Ce n'est pas une machine à bonbons dans laquelle on met notre 25¢ et que l'on nous donne notre joujou.

Un chrétien que je connais un peu a eu une grosse épreuve dernièrement. Alors qu'il était en voiture avec sa femme et son enfant, ils ont été impliqués dans un accident qui a coûté la vie sa femme et son enfant. Aujourd'hui il ne suit plus le Seigneur. Évidemment, la réalité de la grâce est toujours là et il peut revenir, mais Dieu seul sait ce qu'il fera. Un autre chrétien que je connais sa vie semble juste une suite de coups durs. Il fait son cours biblique pour devenir pasteur et après avoir fini on lui refuse le pastorat. Par la suite, il a de nombreux problèmes à se trouver un autre travail et a été sur l'aide sociale pendant assez longtemps. Il y a un an, il a perdu sa fille de 2 ans à un cancer au cerveau après que des tas de personnes ont prié pour elle. Elle est morte dans leurs bras dans d'affreuses souffrances. Depuis mars de cette année, sa femme l'a mis à la porte et veut le divorcer. Elle croit que, dans son cas, c'est justifiable et même que ce serait la "volonté du Seigneur". Ce gars-là a effectivement beaucoup négligé ses devoirs de mari, mais touchant l'initiative prise par sa femme, il n'y a dans cette situation aucune espèce de justification biblique pour un divorce[2]. Aujourd'hui il cherche à faire tout ce qui est possible pour réparer son mariage mais ça n'intéresse pas son épouse. Son cœur s'est endurci. Aujourd'hui elle n'assiste à aucune assemblée et cultive son amertume contre son mari et contre Dieu[3] qui lui a enlevé son enfant.

Je pourrais vous conter bien des histoires dans ce genre et il est probable que vous en connaissez quelques-unes aussi mais je pense que l'on se comprend. Notre génération se fait "prendre les culottes à terre[4]" par les épreuves et les tribulations. On ne s'y attend pas du tout. J'ai l'impression que ça vient de notre mentalité nord-américaine que tout nous est dû, que la vie chrétienne devrait être une suite ininterrompue de victoires d'exploits. Je crois que les pasteurs qui ont enseigné ces choses vont avoir à se repentir en publique ou seront mis de côté par le Seigneur éventuellement. Je ne blâme pas que les pasteurs ou évangélistes pour cet état de choses car s'ils ont eu tellement de succès à enseigner ses choses c'est que, nous, on avait envie de les entendre aussi. La Parole a toujours été là, on est sans excuses nous aussi. On avait juste à faire comme les juifs de Bérée (Actes 17: 10-11).

Si l'on regarde dans la Parole, il est clair dans l'Ancien Testament comme dans le Nouveau que la vie de ceux qui aiment Dieu n'est pas toujours un cadeau et qu'il n'y a pas de recette magique pour régler tous nos "bobos". Les Écritures nous disent que "Toute la création gémit et attend la révélation des fils de Dieu"(Rom. 8: 20-21). Jésus lui-même nous a clairement annoncé ce que le suivre pourrait signifier.

Observez un peu comment l'apôtre Paul annonçait la "bonne" nouvelle suivante aux nouveaux dans son ministère:

Et dans ses épîtres, pour encourager les chrétiens dont il avait la charge:


Combien de nos pasteurs auraient le courage d'en faire autant, je me le demande...De toute manière, est-ce un message que beaucoup veulent entendre? Malheureusement, si on ne nous l'enseigne pas du haut de la chair, la réalité se charge alors de nous l'apprendre et ça c'est beaucoup plus dur. Ce qui est le plus triste, c'est que de nombreux vieux chrétiens tombent parce que leur engagement était, au bout du compte, trop superficiel. Parfois on vient au Seigneur et l'on dit qu'on Lui a donné notre "vie". Mais qu'est-ce que ça veut dire "donner sa vie au Seigneur" ? Souvent pas grand-chose car, au fond, on suit le Seigneur en espérant que ça nous rapportera certains "dividendes". Ça dépend de la personne. Pour certains ça peut être très important d'avoir un époux (ou épouse) et si ça ne marche pas assez vite alors bonjours la visite. Pour d'autres ça peut être une exigence secrète que les chrétiens soient gentils avec lui (ou elle) car cette personne a subi XYZ choses avant de venir au Seigneur et si les chrétiens ne sont pas assez gentils à un certain moment là aussi c'est bonjour... Tant il y a de personnalités différentes tant il peut y avoir de petites idoles différentes cachées dans le fond du cœur. Et tôt ou tard, dans notre marche avec le Seigneur, on entendra Sa voix qui nous demande: "Et vous, ne voulez-vous pas aussi vous en aller ???" (Jean 6: 68)

Des générations nées après la seconde guerre mondiale, il y a eu un changement immense à l'égard des vœux de mariage. La notion de s'engager "jusqu'à la mort nous sépare" reste dans le vocabulaire évangélique mais dans la réalité, dès que les difficultés surviennent et que le prix pour respecter ces engagements devient trop élevé, toutes sortes de raisonnements mondains ("j'ai le droit de m'épanouir", "Il faut que je commence à penser à moi-même!") se promènent dans notre tête pour se voir ensuite exprimés par nos lèvres et nos comportements. On fait tout sauf se rappeler ce qu'étaient les engagements qu'on a pris devant Dieu.

Les réalités sont dures et parfois on ne veut pas y faire face, mais la vie nous y force. Je pense qu'en général dans le mouvement de la Pentecôte on se leurre beaucoup sur notre niveau spirituel. On est bien fier d'avoir les dons de l'Esprit Saint et l'on s'en pette les bretelles en faisant "flasher" nos statistiques de croissance d'assemblées (relativement aux autres dénominations évangéliques).Mais, en Amérique du nord, on n'a jamais vraiment été éprouvé de manière sérieuse comme par exemple les frères et sœurs des pays communistes ou musulmans ont pu l'être. Comme Pierre qui croyait se connaître mais... "Seigneur, lui dit Pierre, pourquoi ne puis-je pas te suivre maintenant ? Je donnerai ma vie pour toi. Jésus répondit: Tu donneras ta vie pour moi ! En vérité, en vérité, je te le dis, le coq ne chantera pas que tu m'aies renié trois fois." (Jean 13: 36-37) On est peut être beaucoup plus bébé gâté et moins mature qu'on ne le pense.

Ne pensez pas que je suis rendu au point de croire que la vie chrétienne c'est juste faire son "purgatoire". Non. Je crois encore aux miracles et aux dons et j'y aspire toujours. On nous parle qu'au Québec qu'on est dû depuis longtemps pour un gros réveil. Je veux bien y croire, mais sans un mouvement profond de repentance dans le Corps de Christ, j'y crois pas du tout, c'est des rêves vains et rien de plus. Si on ne s'examine pas soi-même sur le plan corporatif pour réparer toutes nos divisions, nos blessures, nos coups bas et nos calomnies, le "réveil", on peut l'oublier. On s'apercevra peut-être que l'Esprit Saint est justement un Esprit SAINT qui souffle où il veut et qu'il ira s'amuser ailleurs où les gens sont plus ouverts à son action. On n'a pas de monopole dessus, quoi qu'on dise... Historiquement, les réveils ont toujours suivi un mouvement de repentance dans le peuple de Dieu au moment où l'Eglise était rendu impotente et corrompue. Assez souvent c'est un petit nombre de personnes qui ont tout déclenché. Si on espère un réveil juste à force de prière ou de louange (pas parce que c'est mauvais) on se leurre. Dans nos églises, on a tendance à croire que la repentance c'est bon juste pour les nouveaux, mais on en a besoin de la tête jusqu'aux pieds.

Lorsque je regarde l'état de l'Eglise en Amérique du nord ce que je ressens c'est autre chose qu'une pluie de bénédictions ou un gros réveil nous est réservé mais plutôt des choses dures.

Plus ça va moins c'est "payant' d'être chrétien. Je n'ai pas vraiment l'impression qu'on a appris grand chose de l'histoire d'Israël quand on regarde ce qui se passe parmi nous. Dans nos églises, on aime un peu trop entendre parler de bénédictions et pas assez d'une marche en intégrité devant notre Dieu. Depuis quand avez-vous entendu un sermon du genre suivant ?

Réfléchissez un peu aux premiers chrétiens qui ont bouleversé le monde antique. Ils ont secoué une génération blasée et saturée de philosophies et de religions à plus à n'en finir. Ils les ont conduits au Seigneur. Quel effet a-t-on sur notre génération ? Qu'avaient-ils qu'on n'a pas ? Je crois qu'ils avaient une marche intègre et aussi un engagement vis-à-vis le Seigneur jusqu'à la mort. On dit que c'est le sang des martyrs qui a propagé le christianisme plus que tout autre chose, car cette génération blasée a vu quelque chose de nouveau. Non pas une religion (car il en pleuvait déjà dans l'empire romain) mais des gens qui étaient prêts à mourir pour leur Seigneur et leurs convictions tout en gardant une attitude d'amour envers ceux qui les persécutaient. Serions-nous prêts à en faire autant ?? Nos convictions sont-elles aussi ancrées ?? Serions-nous mêmes prêts à donner à l'œuvre de Dieu s'il n'y avait plus de retour d'impôt ?? Resterions-nous chrétiens si c'était moins "payant" ??

Ah oui, tantôt je parlais de l'amertume... mais j'ai oublié l'essentiel. Gérer ou combattre l'amertume ce n'est pas un cadeau. Le pire c'est que règle générale, nous les bons chrétiens quand on patauge dans l'amertume, on fait tout dans ces circonstances sauf mettre en pratique ce que la Parole dit concernant comment régler nos conflits et l'on se cherche des raisons pour justifier notre désobéissance. Si, par "miracle", on applique la Parole souvent on l'applique tout de travers. Trop souvent on suppose que tout ce qu'il y a à faire dans les situations où des gens nous ont fait des coups bas ou lésés nos droits c'est de "pardonner" et d'oublier. Mais oublier ce n'est pas évident, surtout si on se frotte à ces mêmes gens et situations à tout bout de champ. La Parole nous livre une procédure de thérapie en trois étapes:

Pour être franc, il est rare, lorsqu'on est lésé, que l'on prenne même la peine de mettre en pratique juste la première étape de cette procédure. On se laisse croire que ce n'est "pas si grave que ça" même si on sait que ça nous mange et que notre relation avec la (ou les) personne(s) concernée(s) n'est plus la même. Si on se ferme la "boite" pour ne pas déranger l'harmonie et sauver les apparences, mais que c'est le moindrement sérieux ou que le bobo se répète un peu trop, ça ne pourra durer longtemps. L'amertume c'est comme un ver de terre, si on lui pille sur la tête pour le refouler, inévitablement il ressortira la tête ailleurs. C'est-à-dire que si on refoule notre amertume pour ne rien dire à la personne qui nous a fait du tort, on finira tôt au tard par en parler, mais à quelqu'un d'autre qui n'est pas concerné[5]. Ça s'appelle, en québécois, placotage, (ou le commérage) le péché favori des chrétiens car on n'a pas le droit de se saouler, de voler, tuer, etc. il nous reste juste que les péchés plus "subtiles". Lorsque la Parole dit "péché", on a tendance à penser qu'aux choses criminelles que je viens de mentionner mais ce n'est pas vraiment ça qui est l'intention de Matt. 18: 15-18. "Péché" ici c'est tout ce qui nuit à une relation et y met de l'irritation.

Il est évident que dans la vie, il peut y avoir des tas de petits irritants dans les relations qui ne méritent pas qu'on s'y arrête et qu'on oublie en peu de temps. Mais la réalité des choses est que même les "petits" irritants les plus insignifiants peuvent s'accumuler et, à la longue, finir par détruire une amitié, une relation autrefois très solide, si on ne fait rien. Ce qui intéresse Dieu ici ce n'est pas juste que la personne lésée soit compensée ou que le fautif soit obligé de se reconnaître coupable, mais que la relation d'amour soit restaurée. La preuve c'est que la Parole ne dit pas "S'il t'écoute, tu as gagné ton point", mais plutôt; "S'il t'écoute, tu as gagné ton frère". Le cœur du Père Céleste nous dit, à nous qui ont de la peine à pardonner; qu'il faut se réjouir car "ton frère que voici était mort et qu'il est revenu à la vie, parce qu'il était perdu et qu'il est retrouvé." (Luc 15: 32b) Dieu n'est pas tellement intéressé par qui a raison dans l'affaire, bien qu'un jour tout ce qui était caché sera dévoilé et justice sera vraiment faite[6]. Sa justice à Lui ! Ça veut dire que nous aussi, on sera passé au crible. Nos motivations, nos rancunes et nos préjugés exposés... pensez-y.

Mais je reviens un peu en arrière. Je disais qu'à la première étape que la Parole nous donne pour éviter l'amertume c'est d'approcher la personne qui nous a fait du tort seul à seul et de lui exposer notre point de vue sur la situation. Ça implique une rencontre face à face. PARLER à la personne concernée. Souvent c'est aussi douloureux pour la personne qui confronte que celle qui est confrontée. Pas un cadeau. Les personnes qui aiment confronter malheureusement sont justement celles qui devraient s'en abstenir. Confronter comme ça, c'est risqué c'est le moins qu'on puisse dire. Ça prend du courage car il y a de bonnes chances que la personne concernée ne voudra rien savoir. C'est un risque à prendre, mais c'est bien ce que la Parole nous demande de faire; c'est-à-dire s'exposer devant la source de nos problèmes, se rendre vulnérable. Ça implique aussi que l'autre personne peut nous renvoyer la balle en nous confrontant à nos fautes dans la situation. Trop souvent on ne veut même pas considérer faire ce pas d'obéir à la Parole parce que les autres (chrétiens) ne le font pas. On se cache derrière la désobéissance des autres. Pourquoi serais-je seul(e) à mettre en pratique ta Parole dans cette situation ?? Savez-vous ce que Jésus nous réponds ? "Si je veux qu'il demeure jusqu'à ce que je vienne, que t'importe ? Toi suis-moi." (Jean 21: 22) On n'a pas donné nos vies pour suivre le Seigneur juste quand tous nous félicitent et nous encouragent, mais aussi dans les circonstances difficiles. Nous sommes une génération aux engagements superficiels. Dès que les circonstances sont difficiles, on se trouve mille raisons pour briser nos engagements et changer nos loyautés. On a besoin de s'attacher à la GRACE.

Mais revenons à nos moutons... Lorsque l'on rencontre une personne contre qui l'on a quelque chose, il faut, tant que peut se faire, essayer de mettre les chances de notre côté pour que votre rencontre/confrontation réussisse. Ça aide beaucoup, si vous connaissez un peu les habitudes de la personne concernée, de choisir un moment où elle sera au moins un peu de bonne humeur, non pas fatiguée et irritable. Car si vous ne choisissez pas votre moment, vous risquez de "tomber mal" et de ne pas vous faire entendre objectivement. Quand la Parole dit "seul à seul" c'est vraiment ça. Car plus il y de gens autour pour mettre leur grain de sel là-dedans, moins il y de chances véritables de régler quoi que ce soit. Choisissez un moment où vous pouvez parler cœur à cœur sans distractions ou la présence de tiers. Lorsqu'il s'agit d'un conflit avec un pasteur la procédure est la même. C'est bon de prier avant de rencontrer la personne afin de demander la sagesse du Seigneur et non pas tomber sur la personne sur le coup d'une émotion juste après que la personne nous ait fait du tard. Vaut mieux laisser passer les émotions un peu, ce qui nous permet d'évaluer la situation de manière un peu plus objective. J'ai trouvé aussi qu'il est bon de réduire à liste des choses à régler à un ou deux items (les plus importants évidement). Parfois on perd notre temps et celle de l'autre personne parce qu'on n'a pas vraiment eu le courage de parler du "vrai" conflit/irritant. Mais trouver le vrai conflit prend parfois du temps dans certaines situations car on est des créatures complexes. Par ailleurs, essayer de régler une douzaine de choses en même temps c'est probablement un excellent moyen de perdre son temps. Du moins c'est mon expérience.

Ça m'est déja arrivé d'être en conflit avec un de mes pasteurs. J'aurais bien aimé trouver un verset spécial pour savoir comment régler un conflit avec un pasteur mais il n'y en avait pas. Dans mon cas j'ai tenté d'ignorer le problème pendant une période de 5 ans, mais j'ai fini par me rendre compte que la pression était montée à un tel point que je me prenais à parler du "bobo" à d'autres personnes non-concernées. Ça m'a fait réfléchir et j'ai fini par me décider de prendre contacte avec ce pasteur. Ce que j'ai choisi comme moyen initialement a été de lui écrire une (longue) lettre. Pour ma part je trouvais cette solution meilleure car je suis pas terrible en situation oral mais meilleur en écrit. Ecrire me permet de penser et peser mes paroles. Dire que je voulais dire sans rien oublier dans l'émotion d'une rencontre face à face. Mais ça c'est une question de personnalité. D'autres qui peuvent être bien plus à l'aise dans la parole il leur seraient pas utile d'écrire quelque chose. L'important c'est de COMMUNIQUER, de vider son sac. D'ailleurs j'ai fini par avoir une rencontre face à face avec le pasteur après qu'il avait lu ma lettre. Tout n'a pas changé mais au moins j'ai vidé mon coeur et, plus important encore, j'ai obéit au Seigneur. Ça n'a pas été facile du tout et j'avais une certaine crainte d'être mis à porte de l'église pour avoir osé reprendre un pasteur (c'est des choses qui arrivent…) mais ça a fait du bien réellement de parler enfin. Je confie le reste au Seigneur. C'est dur de tolérer une situation où notre église n'est pas pleinement dans la volonté du Seigneur, où les leaders font des choses avec lesquelles on n'est pas d'accord mais si on est le moindrement honnête face à nous mêmes le Seigneur doit avoir les mêmes sentiments à notre égard aussi. Il doit se demander souvent "Quand changera-t-il/elle ?" car dans le fond on le sait qu'on n'est pas, nous autres non plus, exactement comme le Seigneur nous voudraient…

Ne pensez pas que je suis rendu un "expert" sur la réconciliation et les solutions aux irritations entre frères et sœurs car j'ai encore bien des choses à apprendre. Il m'arrive encore des situations où je ne sais vraiment comment appliquer la Parole. Je me confie en Lui.

Bon enfin, je pense avoir plutôt vidé mon sac, j'ai plus grand chose d'autre à dire. J'espère de ne pas vous avoir trop irrité avec mes pensées sombres. Oui, en ce Noël et la Nouvelle Année qui vient je vous souhaite le trésor de la paix et de la grâce du Seigneur. Qu'Il vous garde et vous conduise dans ces temps-ci.


Je vous ai toujours à cœur.


Notes

[1]- La version Bonne Nouvelles Aujourd'hui est intéressante aussi, elle dit: "Prenez garde que personne ne se détourne de la grâce de Dieu. Prenez garde que personne ne devienne comme une plante amère qui pousse et fait du mal à beaucoup de personnes par son poison."

[2]- La Parole nous indique, selon les paroles de Jésus lui-même, que seul l'infidélité peut-être prétexte à divorce entre chrétiens. (Matt. 5: 32)

[3]- J'ai lu un excellent livre sur ce sujet dernièrement. Ça s'appelle Déçus par Dieu. par Philippe Yancey et c'est disponible chez Vida. Il n'évite pas les questions dures.

[4] - Expression québécoise impliquant une personne prise totalement au dépourvue par un événement.

[5]- La Parole nous met en garde contre ça: (Jacques 5: 11-12).

[6]- N'oublions pas "Ne jugez point, afin que vous ne soyez point jugés. Car on vous jugera du jugement dont vous jugez, et l'on vous mesurera avec la mesure dont vous mesurez." (Matt. 7: 1-2) Dans la prière du Notre Père Jésus nous enseigne: "Pardonne-nous nos offenses, comme [de la même manière que ???] nous aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés." (Matt. 6: 12). L'indifférence, le sarcasme, la haine, le mépris, etc dont on traite les autres nous seront rendu. Justice sera faite. OUCH !!