Première partie
Dans le contexte moderne, toute invitation efficace en enfer sera certainement offerte sous la guise d'une "planification scientifique" - comme l'a fait le régime d'Hitler. Tout tyran doit commencer par prétendre avoir ce que ses victimes respectent et offrir ce qu'elles veulent. La majorité [des gens] dans la plupart des pays modernes respecte la science et veut que [le gouvernement] soit planifié. Et donc, presque par définition, si un homme ou un groupe souhaite faire de nous leurs esclaves, il se décrira bien sûr comme une démocratie scientifique planifiée.*
(C. S. Lewis 1947/1975 : 74-75)Il y a un cauchemar qui m'assaille souvent. Je m'imagine me réveillant un matin et découvrant que l'Angleterre est devenue du jour au lendemain un État monolithique et totalitaire, sans que personne ne s'en aperçoive, sans révolution de gauche ou de droite, sans grande controverse constitutionnelle ou un dernier combat des défenseurs de la liberté individuelle.*
(Malcom Muggeridge 1979 : 202)
Paul Gosselin – anthropologue, auteur (17/12/2021)
L'expression « Après moi le Déluge » est une déclaration connue du roi de France, Louis XV. Exprimé moins poliment : « Qu'ils crèvent tous après mon départ, je m'en fous ! » Il faut admettre que ce serait difficile de trouver une expression plus distillée/synthétique du narcissisme. Mais on peut observer que cette génération de technocrates rivalise avec Louis XV pour le narcissisme. Voici un exemple assez extrême de narcissisme technocratique. Il s'agit du médecin américain Anthony Fauci, conseiller médical du président qui gère la crise du Covid aux États-Unis.
Contrairement à la situation au Québec, aux États-Unis il y a plusieurs voix de politiciens qui s'élèvent pour poser des questions sérieuses à ces technocrates. Manifestement, tout comme le Pape ne tolère pas très bien les remises en questions de ses jugements théologiques ou ecclésiastiques, des technocrates tels que Fauci ne tolèrent pas très bien les questions sérieuses sur leurs décisions et/ou politiques. En interview avec la journaliste Margaret Brennan à l'émission télé Face The Nation, (28/11/2021), on lui a demandé ce qu'il pensait de ses détracteurs. Voici sa réponse
Je veux dire, toute personne qui regarde cette situation attentivement se rend compte qu'il y a une nette saveur anti-science dans tout ça. Donc s'ils se lèvent et critiquent la science, personne ne saura de quoi ils parlent. Mais s'ils se lèvent et visent Tony Fauci, les gens pourront reconnaître qu'il y a une personne. Il y a un visage, il y a une voix que l'on peut reconnaître, on le voit à la télévision. Il est donc facile de critiquer, mais dans les faits ils critiquent la science, car je représente la science. C'est dangereux.*
Plutôt que de répondre directement aux questions qu'on lui pose sur ses politiques, il affirme que ses critiques s'attaquent à 'la Science', ce qui laisse entendre que la Science c'est lui, Anthony Fauci. Voilà une attitude tout à fait pontificale. On peut se demander alors : À quand une (auto-)déclaration de l'infaillibilité de Fauci ? Ça ne saurait tarder... Cette attitude pontificale de Fauci rappelle assez les paroles prescientes du mathématicien français, Alexandre Grothendieck, au sujet du rôle idéologique joué par les scienitifques, paroles publiées pourtant il y a cinquante ans (1971 : 42)
L'immense majorité des scientifiques est tout à fait prête à accepter ce rôle de prêtres et de grands prêtres de la religion dominante d'aujourd'hui. Plus que n'importe qui, ils en sont imbus, et cela d'autant plus qu'ils sont plus haut situés dans la hiérarchie scientifique. Ils réagiront à toute attaque contre cette religion, ou l'un de ses dogmes, ou l'un de ses sous-produits, avec toute la violence émotionnelle d'une élite régnante aux privilèges menacés. Ils font partie intégrante des pouvoirs en place quels qu'ils soient, auxquels ils s'identifient intimement et qui tous s'appuient fortement sur leurs compétences technologiques et technocratiques.
Et pour assurer leur pouvoir absolu sur la population les technocrates tels que Fauci (et le Dr. Olivier Véran en France ou le Dr. Horacio Arruda au Québec) n'ont pas hésité de sermonner la population à l'aide du mantra "Follow the Science". Je me souviens que, jeune étudiant universitaire, dans les années 1970 lors de mes cours d'anthropologie sociale on nous martelaient avec le mantra "La science est caractérisée par le DOUTE!!." C'était utile, je crois, surtout pour saper tout reste de convictions judéo-chrétiennes chez les étudiants. Mais bon, dans le contexte actuel les choses ont bien changées et les "grands médias" refusent cette liberté de douter des "experts" ou de leur "consensus". Ainsi le doute est devenue la nouvelle hérésie. Là on est TRES loin de la science véritable pour se retrouver plutôt dans le dogmatisme et l'idéologie. Si autrefois on me disait "La science est caractérisée par le doute", aujourd'hui si on endosse aveuglément le discours des propagandistes de la pensée unique covidiste (promue par l'État, les grands médias et Big Tech), il faudrait dire plutôt que "La science est caractérisée par la crédulité la plus béate et la plus servile"...
Ceci dit dans le monde francophone, la rhétorique des politiciens et technocrates est généralement plus subtile que celle employée par Fauci, mais le principe reste le même et le rôle que l'on fait jouer à la science est le même aussi. Et ce rôle c'est de s'appuyer sur « La Science » comme Vérité Absolue, un discours que nul ne saurait remettre en question sans tomber dans une hérésie digne de l'opprobre le plus vil. Et, à la fin, on about à un discours très efficace pour assurer le conformisme de la population aux politiques de l'État... On voit donc des autorités politiques/technocratiques exploiter la science comme une matraque, afin d'assurer la soumission totale de la population. Le mathématicien Grothendieck observait qu'une telle exploitation idéologique de la science exige le développement d'un mysticisme superstitieux autour de la science (1971: 41):
Les gens en général, bien qu'on leur enseigne certains des plus grossiers et des plus anciens résultats de la science, ont toujours eu peu ou pas de compréhension de ce qu'est réellement la science en tant que méthode. Cette ignorance a été perpétuée par tout l'enseignement primaire, secondaire, et même par l'importante partie de l'enseignement universitaire qui ne constitue pas une préparation à la recherche: la science y est enseignée dogmatiquement, comme une vérité révélée. Aussi, le pouvoir du mot “science” sur l'esprit du grand public est-il d'essence quasi mystique et certainement irrationnelle. La science est, pour le grand public et même pour beaucoup de scientifiques, comme une magie noire, et son autorité est à la fois indiscutable et incompréhensible. Ceci rend compte de certaines des caractéristiques du scientisme comme religion.
En effet, ce scientisme que décrit si bien Grothendieck, de l'avis de von Hayek, aurait son origine au XIXe siècle dans l'école de pensée des Saint-Simoniens. Cette idéologie (Saint-Simon et son disciple Auguste Comte avaient même souhaité ériger une religion rationnelle). Sous l'emprise de la pensée des Lumières, le monde francophone a accordé aux scientifiques une autorité tout à fait comparable à celle que les Français accordaient au clergé catholique au Moyen Âge. On a donc échangé un clergé pour un autre et, troqué des soutanes pour des sarraus. Mais sous la crise du Covid, le monde francophone, plutôt qu'ériger devant les masses une Superstar hollywoodienne ou un Super Héro de la science (en sarrau blanc)[1] comme les Américains, a préféré jouer la carte ésotérique, c'est-à-dire de la complexité de la science, un savoir connu d'un TRÈS petit cercle d'initiés, savoir devant lequel les masses doivent obéissance aveugle et servile. C'est donc un appel constant aux anonymes et mythiques super héros, les comités d'experts et aux décisions mystérieuses prises dans leurs saints conclaves aux décisions indiscutables, ces comités de la SAGE[2] ou les sous-comités de l'OMS. Les masses, et même des médecins ou scientifiques compétents non initiés à cette caste sélecte[3], ne doivent donc PAS discuter, ni remettre en question ou contredire les édits de la prêtrise scientifique consacrée. Dans son livre, Les bâtards de Voltaire, John Saul émet quelques observations utiles au sujet des assises du pouvoir du technocrate postmoderne et son rôle idéologique (1993 : 27-28) :
Le technocrate est devenu l'intermédiaire indispensable entre le peuple et la divinité. À l'instar du prêtre d'antan, il détient la clé du tabernacle d'où il extrait de temps à autre, pour la distribuer, I'hostie, ces bribes du divin qui laissent le fidèle sur sa faim. L'hostie représente le savoir, la compréhension, la communication, l'illusion d'un accès au pouvoir. Et le tabernacle demeure ce qu'il a toujours été : le refuge caché de ce savoir qui fait du secret l'une des clés du pouvoir moderne.
Évidemment ce savoir dont fait allusion Saul ici est avant tout ce que l'on appelle La Science. C'est le Savoir Ultime en Occident. Mais revenons aux élites postmodernes et leurs intérêts idéologiques. Dans leur cas, garder le contrôle du discours sur la place publique et limiter les dérapages possibles est essentiel. Examinant l'influence des Lumières (et l'attitude élitiste/anti-démocratique qui l'accompagne inévitablement[4]), Saul nous éclaire comment le technocrate conçoit et joue son rôle public (1993 : 117) :
Les talents des technocrates ne conviennent pas aux débats publics ni à une relation ouverte avec le peuple. Ils gardent leurs distances, de façon à cacher leur mépris ou se montrent au contraire d'une affabilité ridicule. À croire qu'ils prennent les gens pour de parfaits imbéciles. Leurs dons innés les entraînent dans d'autres directions. Ce sont les maîtres de la structure, ils provoquent des querelles d'antichambre. Ils excellent dans l'art de manipuler l'information ou de la cacher. Ce sont des marchands de savoir, qu'ils vendent en contrepartie du pouvoir. Ils accordent une importance capitale au secret.
Saul explique l'attitude manipulatrice du technocrate et comment il conçoit son interaction avec les masses (1993: 127-128) :
Le technocrate moderne cherche à tout prix à initier le dialogue. De cette façon, dès le début de la conversation, il peut établir les paramètres de la discussion théorique sur le point de s'ouvrir. (...) L'auditoire visé accepte sans réfléchir le cadre qui lui est imposé. Après quoi, il se laisse prendre dans le tourbillon de la logique qui en découle, totalement absorbé par le va-et-vient du processus questions-réponses indissociable de la structure préétablie de l'échange. S'il arrive à suivre, il se sent satisfait; dans le cas contraire, lorsqu'il a le sentiment d'être largué en cours de route, il sombre dans le désespoir, miné par un sentiment d'infériorité. Quoi qu'il en soit, il n'a pas le temps de réfléchir ni de jauger les paramètres de base [de l'argument].
Comme on le voit, cette logique manipulatrice est la manifestation d'une attitude trempée à l'os d'un élitisme méprisant. On est tous des invités (d'honneur?) à leur dîner de cons. Dans un article rédigé lors des premiers mois de la crise du Covid pour le site The Conversation l'actuaire Christian Walter résume bien le narratif officiel au sujet de la crise du Covid chez la classe dirigeante française (2020) :
Le jeudi 12 mars, Emmanuel Macron déclarait que le principe qui guidait le gouvernement dans la crise sanitaire était la « confiance dans la science », le fait d'écouter « celles et ceux qui savent ». D'où la mise en place d'un Conseil scientifique puis d'un Comité scientifique. Dans l'interview donnée le 14 juillet à Léa Salamé, Macron a rappelé : « je crois à la rationalité scientifique »[5]. Une relation s'est donc établie entre régime de vérité et décision politique ; dans ces conditions, lorsque le consensus scientifique semble ne pas exister, la crise de confiance semble inévitable. Le président de la République a précisé cependant que « ce n'est pas à un politique de trancher le débat scientifique. La science a ses processus ».
Si on poursuit la lecture de l'article de Walter, on constate qu'il est convaincu que les (déplorables) contestations des politiques établis par la classe dirigeante (masques, confinements, vaccins, etc.) sont dues uniquement au fait que le public ne comprend pas la Science. Ce sont donc des ignorants qui n'ont RIEN compris[6]. La Solution Finale à cette crise de confiance à son avis exige donc une propagande mieux faite, omniprésente, plus convaincante. Comme on le voit ci-dessous, il n'exclut pas l'argumentum ad personam[7]. Par exemple, Walter note au sujet des fauteurs de troubles remettant en question les politiques de gestion de la crise (2020) :
La contestation des décisions gouvernementales ou les manifestations opposées à l'obligation du port du masque comme à Berlin ou encore les coronasceptiques de Londres, la profusion des voix qui contestent la vision médicale dominante, et l'existence de théories du complot semblent montrer le contraire. Cela peut signifier que les processus par lesquels la science doit contribuer à la clarification des débats publics en cherchant à “ dire le vrai ” ne sont pas compris : dans ce cas, il s'agirait de mieux les expliquer. Ou bien, plus fondamentalement, que l'absence apparente de consensus scientifique sur le SARS-CoV-2 pose la question de la confiance du public dans la capacité même de la science à “ dire le vrai ” ou, de manière moins métaphorique, à créer un consensus.
Évidemment Walter néglige de noter que chez les coronasceptiques il y a des individus aux qualifications scientifiques impeccables, même des prix Nobel et des individus comme Micheal Yeadon (ex-vice-président de Pfizer) qui connaissent à fond le processus de recherche qui aboutit à la production d'un vaccin ainsi que le processus de mise en marché de vaccins et les exigences que doit rencontrer un vaccin digne de ce nom. Et si Walter fait appel à l'expression théorie du complot c'est avant tout une arme psychologique pour mettre fin à toute discussion sérieuse et c'est également un indice de l'irritabilité de l'interlocuteur qui en a assez de ces questions dont il n'a pas envie de répondre.
Au Canada[8], lors d'un procès au Manitoba où des églises chrétiennes ont contesté les restrictions du Covid (les jugeant des violations de la Chartes des droits du Canada), le verdict du juge Glenn D. Joyal de la Cour suprême provincial a eu simplement comme effet de mettre les technocrates à l'abri de toute question sérieuse. Joyal a d'ailleurs insisté que ni le public ni le système juridique ne devaient se mêler de remettre en question leurs décrets insondables. En somme, comme une déclaration ex-cathedra du Pape, on les considère infailibles. Un article de la Canadian Justice Centre for Constitutional Freedoms explique ce qui suit (2021) :
Le juge en chef Joyal a déclaré : “ Dans le contexte de cette pandémie mortelle et sans précédent, j'ai déterminé qu'il s'agit très certainement d'un cas où une marge de manœuvre peut être accordée à ceux qui prennent des décisions rapides et en temps réel pour le bien et la sécurité du public ”.
Il a ajouté : “ ...déterminer si une restriction des droits est défendable sur le plan constitutionnel est une décision qui doit être guidée non seulement par les exigences des tests juridiques existants, mais aussi par l'humilité judiciaire requise qui découle de la reconnaissance du fait que les tribunaux n'ont pas l'expertise spécialisée pour remettre en question les décisions des responsables de la santé publique... ”.*
Le hic c'est que les requérants dans cette cause avaient déposé des rapports d'experts rédigés par le Dr Jay Bhattacharya, professeur à Stanford et épidémiologiste de renommée mondiale, le Dr Joel Kettner, ancien directeur de la santé publique du Manitoba et le Dr Thomas Warren, spécialiste des maladies infectieuses et microbiologiste médical. Les documents présentés à la Cour comprenaient plus de 2000 pages de données scientifiques et gouvernementales évaluées par des pairs. Il est manifeste que la décision du juge Joyal implique un refus d'examiner le bien-fondé de l'argumentaire des requérants. Il va sans dire qu'une telle décision contribue à établir/protéger une caste élite au-dessus de TOUTE remise en question. À la fin, cette décision aboutie à une situation où les technocrates peuvent faire absolument TOUT ce qu'ils veulent, sans se soucier des droits des citoyens inscrits dans la Charte des droits du Canada et n'ont de comptes à rendre à personne. Ce qui frappe ici est l'arrogance d'une telle décision qui communique clairement le message suivant: “ Les petits citoyens ne doivent pas se mêler des décisions des grands et de choses qui ne les regardent pas ”. Il est utile de rappeler qu'une telle situation correspond tout à fait à la gestion d'État sous un régime totalitaire[9].
Il y a un point significatif mentionné par le juge Glenn D. Joyal, c'est-à-dire le concept du “ bien et la sécurité du public ”, concept qui est sensé justifier la violation des procédures juridiques normales et le rejet de l'argument des témoins experts. À ces juges, il faut exiger une réponse honnête à ces questions : “ Qui définit ce qu'est le bien public ? ”. “ À quelle moralité s'appui votre concept de bien public ? ” “ D'où la tirez vous ? ” Comme on le verra dans la deuxième partie de cet article, la science ne peut rien pour établir un tel concept. En Occident, il y a 100 ans, ce concept était solidement ancré dans le consensus judéo-chrétien[10], mais en 2021 la classe dirigeante (politique, éducative, médiatique et juridique) a clairement rejeté ce concept judéo-chrétien[11]. Il faut donc débusquer et exposer le caractère idéologique (non neutre) de ce concept de bien public. Maintenir sa neutralité ce serait mentir. Évidemment ils ont tout intérêt de s'esquiver de ces questions. Il faut exiger que la classe dirigeante jette ses cartes sur la table...
La consécration des experts
Dans notre situation, il est impératif de poser la question suivante : Qui a donné ce pouvoir aux technocrates de la Covid et aux experts et en fonction de quels critères ? Il faut constater que cette classe de technocrates non élus qui jouissent actuellement de pouvoirs quasi absolus sur la population a été établie uniquement en fonction de considérations politiques ou idéologiques. Au Québec, une question posée en point de presse (décembre 2012) par Denis Lessard à François Legault (avant son élection comme Premier ministre) laisse entendre que le gouvernement Legault a justement préparé le terrain pour la crise du Covid en mettant en place les personnes jugées utiles (Point de presse de M. François Legault - 2012)
En campagne électorale, vous aviez dit: On va mettre en place des gens qui sont d'accord avec nous, qui pensent comme nous.
Il faut constater que cette classe de technocrates au pouvoir n'a pas d'accomplissements scientifiques ou médicaux à leur crédit que leurs détracteurs n'ont pas. Chez les dissidents au narratif officiel du Covid19, il y a des prix Nobel et des individus avec une expérience scientifique/médicale/clinique très profonde.
Sociologue à la London School of Economics, Eileen Barker a étudié l'exploitation idéologique de la science en Occident. Dans un article examinant ce phénomène dans le cadre du débat sur les origines, Barker fit part d'observations qui ont une portée significative sur l'exploitation idéologique de la science lors de la crise du Covid (1979 : 81-82) :
... ce qui suit est une description de quelques moyens par lesquels les membres de la communauté scientifique contemporaine répondent à la demande des consommateurs [pour une Vérité ou Savoir Sacré infaillible] en fournissant des solutions rassurantes aux tensions possibles qui pourraient surgir des revendications épistémologiques ou métaphysiques concurrentes de la science et d'un système de croyances particulier. Ainsi ils jouent le rôle d'une nouvelle prêtrise pouvant apposer un sceau d'approbation scientifique sur les différents systèmes théologiques ou idéologiques qui sont proposés. (...) Il est du devoir du prêtre de révéler une bonne compréhension des potentialités d'une véritable science qui fournit la voie nécessaire (et dans certains cas suffisante) vers la plus grande vérité de la connaissance ultime. Comme les prêtres d'autrefois, la nouvelle prêtrise peut remplir la fonction d'offrir un support cognitif à nos croyances, ainsi qu'un mépris cognitif à l'égard des croyances des autres, (...) La nouvelle prêtrise fournit des phrases telles que “ En tant que scientifique, je peux vous assurer que... ”, “ La science a clairement montré... ”, (...) ou simplement “ Il n'y a absolument rien dans la science qui soit contraire à la suggestion que... ”. Ce sont des phrases qui ont (on m'a assuré à plusieurs reprises) apporté un soulagement indicible à l'esprit de nombreuses personnes déchirées par la schizophrénie d'une époque qui ne sait pas comment combler la fossé entre une science sanctionnée par la société en tant qu'autorité épistémologique ultime et une croyance admise par le croyant pour son autorité ultime supérieure.[12]
Il faut constater que la nouvelle prêtrise scientifique à laquelle fait allusion Barker ci-dessus est bien établie dans tous les pays d'Occident. Ce sont donc les porte-paroles/incarnations de La Science. La référence à la Science établie leur autorité absolu... Évidemment le podium et la chaire où ils débitent leurs sermons, c'est la télé... Aux États-Unis, il y a Dr Anthony Fauci, directeur du National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID) ainsi que conseiller médical du Président. En France il y a le Dr Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé depuis février 2020. En Angleterre, Neil Ferguson (Imperial College à Londres) et, sous les auspices de l'OMS, la SAGE (ou le Strategic Advisory Group of Experts). Et au Québec il y a le Dr Horacio Arruda, sous-ministre adjoint à la Direction générale de la santé publique au ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec.
Si en milieu francophone on note une attitude à l'égard des technocrates d'une servilité moyenâgeuse, attitude très frileuse à l'idée de poser des questions sérieuses aux grands prêtres de la science, ces bonzes à qui on a confié la charge de déterminer les politiques de gestion de la crise du Covid, chez les anglophones, on est beaucoup moins réticents d'exiger des réponses. À ce sujet, le journaliste américain Pepe Escobar relate ce qui suit sur la contribution de Fauci à la science médicale, spécifiquement pour le traitement du Covid19 (2021) :
Le cardiologue clinicien Peter McCullough et son équipe de médecins de première ligne ont testé des protocoles prophylactiques [pour traiter le Covid19] utilisant, par exemple, l'ivermectine - "nous avions des données formidables provenant d'équipes médicales au Bangladesh" - et ils ont ajouté d'autres médicaments tels que l'azithromycine, le zinc, la vitamine D et la vitamine C par voie intraveineuse. Et tout cela alors qu'à travers l'Asie, on a fait appel à l'utilisation de lavages nasaux salins généralisés.
Le 1er juillet 2020, McCullough et son équipe ont soumis leur premier protocole révolutionnaire à l'American Journal of Medicine. Il est devenu le document le plus téléchargé au monde pour aider les médecins à traiter le Covid-19. McCullough s'est plaint l'année dernière que Fauci n'a jamais, à ce jour, publié quoi que ce soit sur la façon de traiter un patient souffrant du Covid.*
Voilà qui expose la différence entre ceux qui pratiquent la science véritable et ceux qui se contentent d'exploiter le prestige de la science à des fins autres...
Et pour la suite, la deuxième partie...
NB : les citations suivies d'un * sont traduits par l'auteur de cet article
-- (2012) Point de presse de M. François Legault, chef du deuxième groupe d'opposition. Version finale - Le mardi 4 décembre 2012, 11 h 20 - Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement
-- (2021) Manitoba Chief Justice rules Public Health Officials shouldn't be “second guessed”. (Canadian Justice Centre for Constitutional Freedoms - 21/10/2021)
-- (2021) COVID-19 : les points de presse des autorités : point de presse du premier ministre François Legault avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, M. Christian Dubé, le directeur national de la santé publique, M. Horacio Arruda, ainsi que le directeur de la campagne de la vaccination contre la COVID-19 au Québec, M. Daniel Paré. (La Presse – 66 minutes - 23/11/2021)
-- (2021) Transcript: Dr. Anthony Fauci on "Face the Nation". (CBS News - November 28, 2021) -> interview avec Margaret Brennan
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ENLOE, Chris (2021) Rand Paul, Ted Cruz roar back at Dr. Fauci, who claims criticism of him is 'dangerous' because 'I represent science'. (The Blaze - 28/11/2021)
ESCOBAR, Pepe (2021) Fauci as Darth Vader of The COVID Wars : A rollicking review of RF Kennedy Jr's The Real Anthony Fauci: Bill Gates, Big Pharma and the Global War on Democracy and Public Health. (The Asia Times/Zero Hedge – 25/11/2021)
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[1] - Fort possible que ce ne soit pas nécessaire d'aller jusqu'à là en France ou au Québec, car dans le monde francophone les technocrates sont déjà intouchables, leur parole jugée infaillible, donc au-dessus de toute remise en question sérieuse ou doute.
[2] - Mais quelle trouvaille marketing cet acronyme !! Imbattable.
[3] - Un rapport soumis par Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada (13/12/2021) expose comment se mettent en branle de tels comités au Canada
Les échanges “ Meilleurs cerveaux ” (ÉMC) des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) sont des réunions d'une journée, sur invitation seulement, qui réunissent des décideurs de haut niveau, des chercheurs et des spécialistes de la mise en œuvre pour discuter de sujets d'intérêt commun hautement prioritaires liés à la santé.
[4] - Malgré les “ Liberté, fraternité, égalité ! ”...
[5] - Belle déclaration de foi...
[6] - Assez curieux cet argument, car il pourrait laisser entendre que Walter est un franc-maçon exprimant (de manière plus ou moins subliminale) son mépris des non-initiés. Dans cette logique, seuls les initiés aux secrets de la Science (S majuscule obligatoire) peuvent comprendre le débat sur la crise du Covid. Encore que cette initiation ne leur donne pas nécessairement le droit de participer à ce débat. En fait, il est assez manifeste maintenant que la classe dirigeante préfère qu'il n'y ait aucun débat et qu'aucune question sérieuse qui ne leur soit posée...
[7] - Dans le cadre d'un débat, un argumentum ad personam est un mécanisme de rhétorique fréquemment considéré comme une manœuvre déloyale et ayant l'objectif de discréditer son adversaire sans lui répondre sur le fond de l'argument. Si on affirme que l'argumentum ad personam est considéré une manœuvre déloyale c'est que si une des parties y fait appel généralement cela implique que son argument est faible et qu'elle cherche à détourner l'attention de ce fait. On cherche donc à changer de sujet...
[8] - Au Québec, les allusions aux “ experts ” et à la “ science ” pour justifier les restrictions ou autres politiques de Covid sont monnaie courante. Par exemple, lors de son point de presse du 23 novembre 2021 annonçant le début de la vaccination des 5 à 11 ans contre la COVID-19 le premier ministre François Legault, a d'abord tenu à rassurer les parents sur la dose pédiatrique, qui est sécuritaire “ selon la science ”. Vers 12 minutes de ce point de presse Legault note : “ la dose pour enfants est environ 1/3 de la dose pour adultes, donc les scientifiques pensent que c'est sécuritaire. ” Commentaire répété dans la portion anglophone de la conférence : 23minutes “ Scientists have made very sure the vaccine is safe for children. ”
[9] - Dans son analyse de 1951, The Origins of Totalitarianism (édition anglaise..., cette étude se penche surtout sur le totalitarisme nazi et le communisme sous Staline), la politicologue Hannah Arendt expose le fait oublié que la gestion par décrets est un trait caractéristique de l'État totalitaire :
Sur le plan juridique, le gouvernement par la bureaucratie est le gouvernement par décrets, ce qui signifie que le pouvoir, qui dans le gouvernement constitutionnel ne fait qu'appliquer la loi, devient la source directe de toute législation. De plus, les décrets restent anonymes (alors que les lois peuvent toujours être attribuées à des hommes ou à des assemblées spécifiques), et semblent donc découler d'un pouvoir général qui n'a pas besoin d'être justifié. (...) Il est vrai que les décrets sont utilisés par tous les gouvernements en temps d'urgence, mais l'urgence elle-même est alors une justification claire et une limitation automatique. Dans les gouvernements par bureaucratie, les décrets apparaissent dans leur pureté nue comme s'ils n'étaient plus émis par des hommes puissants, mais étaient l'incarnation du pouvoir lui-même et l'administrateur seulement son agent accidentel. Derrière le décret, il n'y a pas de principes généraux que la simple raison peut comprendre, mais des circonstances en constante évolution que seul un expert peut connaître en détail. Les gens gouvernés par décret ne savent jamais ce qui les gouverne en raison de l'impossibilité de comprendre les décrets en eux-mêmes et de l'ignorance soigneusement organisée des circonstances spécifiques et de leur signification pratique dans laquelle tous les administrateurs maintiennent leurs sujets. (...) La règle du décret présente des avantages évidents pour la domination de territoires éloignés aux populations hétérogènes et pour une politique d'oppression. Son efficacité est supérieure simplement parce qu'elle ignore toutes les étapes intermédiaires entre l'élaboration et l'application, et parce qu'elle empêche le raisonnement politique du peuple par la rétention de l'information. (...) La bureaucratie totalitaire, avec une compréhension plus poussée de la signification du pouvoir absolu, s'est immiscée avec la même brutalité dans la vie privée et intérieure de l'individu. Le résultat de cette efficacité radicale qui tue la spontanéité intérieure des personnes sous son règne en même temps que leurs activités sociales et politiques, de sorte que la stérilité purement politique sous les anciennes bureaucraties a été suivie d'une stérilité totale sous le régime totalitaire.* (pp. 243-245)
[10] - Et c'est ce consensus judéo-chrétien qui permit au 18e siècle à un politicien comme William Wilberforce de rendre l'esclavage illégal dans l'Empire britannique (en s'appuyant sur le concept judéo-chrétien que même l'esclave était un homme, fait à l'image de Dieu et digne de vivre librement). Aujourd'hui, une telle initiative serait impossible...
[11] - Au Québec en particulier, on aime bien se gausser que le Québec est un « État laïque », concept mensonger qui affirme la neutralité religieuse de l'État. Dans les faits cette affirmation de la neutralité religieuse de l'État n'est qu'un bouclier pour protéger l'État québécois de questions sérieuses sur ses convictions idéologiques véritables. On ne veut PAS répondre à ces questions... On ne veut pas rendre des comptes. Le 16 juin 2019 fut adoptée par le Parlement du Québec la loi intitulée “ Loi sur la laïcité de l'État, loi qui fixe cette exigence dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Évidemment le concept d'État laïque EXCLUT toute influence judéo-chrétienne... L'élimination des crucifix sur des lieux publics et l'élmination de la prière lors de conseils municipaux ne sont que la très fine pointe de l'iceberg de leur programme...
À propos de la Loi sur la laïcité de l'État. (document)
[12] - Commentaires ajoutés en [] par l'auteur de cet article.