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Une brève histoire de l'avenir :
un compte rendu





Une brève histoire de l'avenir, par Jacques Attali

Paul Gosselin – 7/11/2024

Pour ceux qui ne le connaissent pas, Jacques Attali est économiste, chef d'orchestre et l'auteur de nombreux ouvrages (même des romans). Il est connu davantage comme le conseiller de plusieurs présidents français. Depuis longtemps, il a une relation intime avec le pouvoir politique en France. Sur le plan idéologique Attali s'affiche ouvertement mondialiste et il est fort probable qu'il soit franc-maçon[1]. D'autre part Attali s'est donné le rôle d'oracle avec ses prédictions d'avenir publiées. Cela se compare au rôle de gourou/influenceur joué par Yuval Harari (historien militaire) au sein du Forum économique mondial (Davos).

Il est manifeste qu'Attali a les idées proches de la secte de Davos (et leur Great Reset), mais il semble avoir tenu des propos dénigrants Davos comme “ un hôtelier qui permet de gagner du temps ; c'est un économiseur de voyages d'affaires ”. Comme le note Graz (2003) plusieurs Davosiens font des déclarations semblables. Et si de tels propos n'étaient que de la poudre aux yeux afin d'éviter les questions sérieuses posées au sujet des projets et de l'influence de Davos ? Est-ce pensable de rassembler tant de gens chargés de pouvoirs industriels, politiques, médiatiques et financiers et tenant compte de toute la logistique (et questions de sécurité) que posent un tel événement annuel qu'à des fins de simple rencontre sociale ? C'est assez invraisemblable[2]. Peu importe, Attali doit avoir des idées compatibles avec Davos, car il figure sur la liste officielle des participants du Forum économique mondial.

Comme on peut le voir dans ce livre (Une brève histoire de l'avenir - 2009) Attali prend au sérieux son rôle d'oracle. Pendant un moment Attali fait un tour d'horizon des systèmes économiques du passé, tour d'horizon qui me rappelle des souvenirs d'un cours de théologie marxiste (ou matérialisme historique) que j'ai pris il y a bien des années et les modes de production. Dans ce texte Attali débite ses prédictions d'avenir du haut de son autorité pontificale, assuré de son infaillibilité, ce qui devient vite ennuyeux. Comme c'est l'habitude des pions de Davos, tandis qu'il émet ses prophéties d'avenir, il ne peut résister à la tentation de s'adonner à des petits jeux manipulateurs de peur afin d'étouffer les critiques et assurer leur servilité (2009 : 10)

La peur est un excellent outil pour à la fois distraire le troupeau des enjeux réels et la maintenir dans la bonne direction. On le voit bien ci-dessus, le message pas très subliminal est : “ N'osez pas rejeter mon projet, sinon ce sera l'Apocalypse ! Vous l'aurez voulu (et pas moi...). ” Touchant l'utilité politique de la peur, Attali n'hésite pas à en parler ouvertement. Dans un article publié dans l'Express, il a affirmé (2009)

Que c'est curieux qu'en 2009 Attali parlait de pandémie comme outil de manipulation social ! Un hasard sans doute... Et pour se faire une idée de l'oracle Attali, voici une petite déclaration prophétique (mondialiste) touchant l'avenir rayonnante qu'il nous propose (2009 :10)

Puisque les historiens nous rappellent que “ Ceux qui ignorent l'histoire sont condamnés à le répéter ”, il n'est pas inutile de signaler que les totalitaires du siècle passé (nazis et communistes) ont fait des promesses tout aussi fabuleuses d'un avenir rayonnant, mais dans les faits ils ont conduit leurs sujets à l'Enfer. Est-ce une exagération ? Eh bien songez que même si Attali ne se dit ni nazi ni communiste, il s'abreuve à la même source, soit la pensée des Lumières (moderne ou postmoderne[4]), élitisme d'une technocratie aboutissant inévitablement au totalitarisme, le même qui a nourri les nazis et les communistes. À la fin, il y a de bonnes raisons de croire que l'hyperdémocratie dont discute Attali ne soit rien d'autre qu'un régime totalitaire d'une puissance inégalée et qui fera passer Hitler et Staline pour de vulgaires amateurs. Sur ces questions je pense qu'Alduous Huxley[5] joue le jeu plus honnêtement et que l'hyperdémocratie dont discute Attali ne sera en fait rien d'autre qu'un régime où les élites traiteront les masses avec un mépris absolu tout en les gavant d'illusions. Voyez la prophétie de Huxley tiré de son Retour au meilleur des mondes qui explique le sort que réservent les élites (hypocrites) à la démocratie (1958/1990: 144)

Ainsi dans l'expression l'hyperdémocratie figure le mot démocratie, mais il me semble plus juste de considérer ce terme comme un appât, un leurre, et rien d'autre. Évidemment un intello français est toujours trop subtil pour jouer cartes sur table au même point que Huxley... Pour ça, il faut un Britannique ou un Américain. En somme, le concept d'hyperdémocratie d'Attali n'est qu'un piège à cons... La voix et la volonté du peuple, la secte de Davos s'en fout complètement. Par moments Attali fait de brefs lapsus (étranges) qui exposent un peu plus le fond de sa pensée sur l'avenir de la démocratie (2009 : 19)

Et voici un autre lapsus exposant la logique totalitaire de la pensée d'Attali. Dans la citation suivante, Attali laisse entendre que dans son Nouvel Ordre Mondial, médecins et profs auront un brillant avenir, c'est-à-dire devenir Polices de la Pensée, à la MK-Ultra ou ClockWork Orange[6] (2009 : 190)

Dans cette logique, la dissidence serait considérée comme une maladie mentale. Spécialiste de la littérature du Moyen Âge, même en 1949[7] CS Lewis avait bien compris le mépris des élites néo-totalitaires et de leur police de la pensée pour le peuple (2002 : 292)

Comme plusieurs néo-totalitaires mondialistes, Attali ne cache pas ses fantasmes de contrôle absolu sur le troupeau de la masse (moi et toi) et au chapitre 5 il note (2009 : 187-188)

Eh oui, vous avez bien compris. Sous un système de surveillance absolu[9], on pourra abolir la prison, car de toute manière on sera TOUS prisonniers... La prison, en brique, ciment et acier, sera donc inutile. Si un tel système de surveillance permanent évoque Big Brother que le roman 1984 d'Orwell avait mis à l'avant, dans un entretien avec Michel Salomon, Attali précise que ce n'est pas à cela qu'il pense (1981 : 272)

Mais bon, si ce système de surveillance absolu ne suffit pas à la tâche de gestion du troupeau, Attali a prévu d'autres mesures. Attali fit ces observations (1981: 274-75)

Ouais, le troupeau n'a d'intérêt pour Attali que s'il est productif. Manifestement c'est une perspective que rejette le romancier français Michel Houellebecq qui affirme assez sèchement (2021)

Voici un autre truc utile à savoir au sujet du monde merveilleux que prévoit Attali. Avant l'arrivée de son merveilleux Nouvel Ordre Mondial, doit survenir l'hyperconflit. Voici comment Attali la conçoit (2009 : 257)

Étonnant, mais dans ce qui précède certains éléments recoupent la description que fait l'Apocalypse de la dernière bataille de l'Armeggedon

Mais entraîné par l'enthousiasme, Attali dresse un portrait fort attachant de son utopie (2009 :191)

Un peu plus loin, Attali chante encore les louanges de son utopie déprimante (2009 :199)

Personnellement, tout cela me fait penser à un désert social et psychologique et à l'Enfer plutôt qu'à un Paradis/Utopie... Mais, réalisant que de tels aveux ne sont pas très vendeurs, pour éviter une réaction de rejet trop forte, Attali nous file un peu de poudre aux yeux avec ce beau Village Potemkine (2009 : 272, 274)

En fait de propagande, on peut douter que les nazis ou les bolcheviks aient fait mieux... Et vers la fin du livre, discutant du sort de la France dans son monde merveilleux de l'hyperdémocatie, Attali sert, en des termes assez hypocrites, un morceau pénible à avaler pour tout patriote, c'est-à-dire la fin de la France (2009 : 309)

Exprimé plus explicitement, en somme la France doit s'auto-saboter, au nom de l'hyperdémocatie. Enfin, lorsqu'un individu comme Attali, engagé au service d'un État, travaille ouvertement à saper la souveraineté de cet État, n'est-ce pas ce que l'on appelle la trahison de la nation ? N'est-on pas passible d'accusations criminelles dans un tel cas ?



Références

ATTALI, Jacques (1981) La médecine en accusation. pp. 263-279 dans L'avenir de la vie. Michel Salomon, éditeur (collection : Les Visages de l'avenir) - Paris : P. Seghers

ATTALI, Jacques (2009) Une brève histoire de l'avenir. édition remise à jour. [Paris]: Librairie Arthème Fayard, 310 p.

ATTALI, Jacques (2009) Changer, par précaution. L'Express - 3/5/2009

DEPAUW, Pierre-Alain (2022) Les mots de Christine Deviers Joncour sur Attali, le Covid et le plan de dépopulation. (Médias-Presse.info - 3 minutes - 14/3/2022) -> elle rappel un diner avec Attali en 1987/88...

GOSSELIN, Paul (2023) En 1946 C. S. Lewis décrivait avec précision la mentalité Davos... Samizdat - 29/7/2023

GRAZ, Jean-Christophe (2003) Qui gouverne ? Le Forum de Davos et le pouvoir informel des clubs d'élites transnationales. pp. 67 à 89 À Contrario

HOUELLEBECQ, Michel (2021) “Une civilisation qui légalise l'euthanasie perd tout droit au respect”. (Le Figaro - 5/4/2021)

HUXLEY, Aldous (1958/1990) Retour au meilleur des mondes. Plon [Paris] 155 p.

LEWIS, C. S. (2002) God in the Dock. (Walter Hooper ed.). Eerdmans Grand Rapids MI 347 p.

NIETZCHE, Friedrich (1882/1950) Le gai savoir. (traduit de l'allemand par Alexandre Vialatte) Éditions Gallimard Paris (coll. Folio/Essais 17) 373 p.

ORWELL, George (1949/2018) Mille Neuf Cent Quatre-Vingt-Quatre. Trad. de l'anglais par Josée Kamoun, Gallimard [Collection Du monde entier] 384 p.


Notes

[1] - Comme c'est le cas habituel, il est rare qu'un franc-maçon actif dans un poste d'influence avoue ouvertement qu'il est franc-maçon initié. Mais dans le cas d'Attali on détient un morceau de puzzle assez significatif, c'est-à-dire le fait qu'en 2022 Attali a prononcé la conférence qui suit dans une loge maçonnique.

Jacques Attali traite Identités, altérité / Soi et les autres. le jeudi 30 juin au Collège Maçonnique en visio. (COLLÈGE MAÇONNIQUE Les Entretiens d'Été du Collège - Jeudi 30 Juin 2022 à 19h30 - Identités, Altérité / Soi et les Autres)

Si cela ne prouve pas indubitablement qu'Attali soit franc-maçon, il est clair qu'Attali a des perspectives très proches des francs-maçons au point où ils trouvent naturel de lui donner de l'influence dans leur sein.

[2] - Mais cette question rappel une intuition proposée par CS Lewis dans son roman Cette puissance hideuse/That Hideous Strength (1949 - Ebook), c'est-à-dire que l'on peut être dans la présence d'organismes de facade, servant de distraction. Le pouvoir réel est ailleurs.

[3] - Et si Attali parle avec autant d'assurance de l'efficacité de la peur comme outil de manipulation social, il y a lieu de penser que les élites postmodernes ont fait auparavant des expériences en ce sens et que la démonstration a été faite...

[4] - Et enracinée dans le même mythe d'origines matérialiste...

[5] - N'oublions pas que le frère d'Alduous Huxley, soit Julian (1887-1975) fut un mondialiste notoire, et cofondateur de l'UNESCO, l'organisme éducatif et scientifique des Nations Unies.

[6] - Film dystopique par Stanley Kubrick - ClockWork Orange (1971)

[7] - La citation qui suit est tirée de The Humanitarian Theory of Punishment, publié initialement dans 20th Century : An Australian Quarterly Review. Vol. 3 no. 3 1949 pp. 5-12. Article republié dans le recueil God in the Dock/Dieu au banc des accusés.

[8] - Ce qui fait penser à l'accréditation d'entreprises aux normes ISO-9001...

[9] - À mon sens, un tel système de surveillance absolu n'est qu'une expression parmi tant d'autres du mépris des élites pour le peuple. Et si on est attentif, on constate que ces élites postmodernes n'hésitent pas d'exprimer leur mépris du peuple. On l'a vu avec le mépris exprimé par les grands médias des MAGA américains, du mouvement Brexit anglais, des gilets jaunes en France, et le mépris de Justin Trudeau des camionneurs canadiens (deplorables), des nationalistes italiens... Idem plus récemment avec Biden qui a traité les partisans de Trump comme du “garbage”, des ordures... Entre autres, tout mouvement nationaliste attire le mépris des élites postmodernes, car eux sont engagés envers une idéologie mondialiste. Ça explique... Dans cette optique nationalisme = [nécessairement] fascisme...

Ainsi aux yeux des élites postmodernes le peuple DOIT prendre son trou tout à fait servilement, sinon on lui crache dessus et on n'hésitera pas à violer ses droits (pensez aux comptes de banque des camionneurs canadiens gelés par l'État, ce qui est du vol, sanctionné par l'État). Si les pions de Davos méprisent autant la liberté du peuple (liberté d'expression, liberté politique, liberté économique), c'est qu'il le craint également. C'est ce qui le motive à tenter de le contrôler de toutes sortes de manières, ce qui se manifeste dans des efforts d'imposer une identité digitale (combinant tout document émis par État, transactions financières, communications et déplacements). Comme on le sait tous, en Chine c'est un fait accompli.

[10] - C'est-à-dire un totalitarisme hypocrite...

[11] - Une rumeur circule sur le web qu'il y aurait eu une édition de 1980 du livre de Michel Salomon où aurait figuré la citation suivante (d'Attali) :

Si je peux confirmer que cette citation ne figure pas dans l'édition 1981, elle me semble malgré tout fidèle à la pensée d'Attali, même si elle l'exprime plus brutalement... Notons par ailleurs que l'exemplaire du recueil L'avenir de la vie (Michel Salomon, éditeur 1981) que j'ai pu consulter avait vu sa reliure modifiée (passé de couvert mou à couverture rigide). Évidemment une telle opération peut permettre (au besoin) de remplacer un chapitre gênant par un autre révisé... Ça ne prouve rien, mais c'est tout de même une coïncidence étrange. Il se peut également que cette citation soit bien d'Attali, mais mal attribué, c'est-à-dire paraissant dans un autre ouvrage publié par lui (plutôt que le recueil de Salomon).

George Orwell[12] - Voir aussi Joël 3 : 9-15.

[13] - George Orwell a bien compris cette logique, car dans son roman 1984, il fit expliquer par un de ses personnages maléfiques (O'Brien) le stade final du processus cauchemardesque initié par les totalitaires (1949 : Troisième Partie - Chapitre III) :

Qui sait si ce n'est pas à un truc semblable auquel pensait Nietzsche, qui dans son essai Le gai savoir décrit la fin de l'esprit libre qui poursuit jusqu'au bout ses convictions (1882/1950: 290) et qui est prêt à expérimenter la: